jeudi 10 mars 2016

LE SECRET DES PETROGLYPHES

LE SECRET DES PETROGLYPHES OU LE SECRET DES HOMMES EN NOUVELLE-CALEDONIE : QUELQUES SUGGESTIONS 
Bibliographie : je renvoie à l’excellent  CD de Fernand Jammes et à l’ouvrage magistral de C. Sand qui dresse  un inventaire quasi exhaustif des pétroglyphes calédoniens.
Langues australiennes et langues calédoniennes. 
Il y a  des langues d’origine australienne en Calédonie : quatre au nord et sur la côte est, une seule sur la côte ouest, le tiri :  
1 le tiri, dans la région de La Foa et de Couli , apparenté au biri australien ;
2 le tipindjé , dérivé du pitjentara près d’Alice Spring en Australie aujourd’hui ;  
3)  le nemi parlé à Hienghène . Le nemi est apparenté à certains dialectes australiens dits paama-yanga [parama, de birman, cf. les noms de Hienghène, de yanga , et de Tanghène, de lyanga].   Ainsi, le mot chanem qui signifie excrément en Hienghène et correspond à bomaign (de gonaym) en langue de Balade et à boné en langue de Maré se retrouve dans  le kechua amérindien huanu (d’où vient notre mot guano) et dans l’australien guna, gunong, ganing ; 
4) le yalayu parlé à Bondé, Gomen, Paimboa, Balade, Belep, Pam ; il est apparenté aussi aux langues australiennes dites paama –yanga ;   
5) le paici, parlé vers Touho,  avec en finale le suffixe –ik indiquant le langage (cf. le nom d’un lieu où justement il y a des pétroglyphes, Linderalique de lyndral-ik, à rapprocher de  Aranda, de lynda en Australie,  et de lyanga, nom de certaines langues australiennes) apparenté aussi aux langues appelées paama -yanga en Australie .  Dans mon enfance, j’entendais des injures d’origine australienne, comme kouinda, con, dérivé de l’australien kounthia ,  kouna signifiant vagin en australien. De même pour konyaos, même sens, ou  bunan, anus,
Aussi ne faut-il pas s’étonner si avec ces langues  sont arrivées d’Australie la hache- ostensoir et  la « hache de Poya » (voir mon blog sur le serpent de mer et les flèches faîtières), ainsi que la « fourchette de cannibale » (voir mon blog du même nom), les palissades autour du grand chef dont les planches  sont des tjurunga  emblématiques de la circoncision et surtout les rites  de la subincision,  de la superincision et de la circoncision et les pétroglyphes qui commémorent ces cérémonies totémiques. Les influences papoues plus tardives, peut-être du XVII e siècle , (Pouébo) n’ont pu réussir à effacer
l’ancienne  empreinte australienne
Quels sont  les  noms des deux groupes d’auteurs des pétroglyphes calédoniens ?
1) Au Nord et sur la côte est : les  Menehune, des pêcheurs venus des Philippines (Mindanao) en passant  par l’Australie et le Vanuatu. 
Jules Durand , cité par Coquilhat , nous dit que les Ouébias de Pouébo  désignaient les premiers habitants du  nom de   Menehune, une forme  qui se retrouve en Polynésie jusqu’à Hawaï. Menehune, à rapprocher de Mindanao, nom d’une île des Philippines,  se retrouve dans Marino (de marehuno), nom d’une langue parlée à Maëwo (Vanuatu), dans Farino (de marehino) en Nouvelle-Calédonie ou  Mérina [de merehuna] à Madagascar. On peut songer aussi en Papouasie à la tribu des Marind’anim et en Australie  au groupe de tribus du nom de Merino,dont font partie les Ngatatara et les Apatanguru, , avec le  nom du Mont Merino de marehuno  cité par Roheim, L’énigme du sphinx,  p.133, et à Nanene , de  Menehune,  à rapprocher de Nenumbo , nom d’une île Santa Cruz  aux Salomon (cf  aussi Imbo en Australie).
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 Gabriel Païta,  ce descendant de la grande chefferie des Kambwas, dans Gabriel Païta, témoignage Kanak, D’Opao au pays de la Nouvelle-Calédonie,  par Jérôme Casaumayou et Thomas de Dekker,  l’Harmattan, leur donne le nom de Ti : « si l’on en croit les récits des anciens, les premiers hominiens  d’Opao (de la Nouvelle-Calédonie) avaient la peau rouge ; ils étaient velus et de petite taille.
« Puis vint un jour le peuple des Ti [ou encore   les Tibawé, avec arrêt à Lifou]…Venus de la mer, ces grands hommes au corps couvert de tatouages s’établirent dans la région de Ponérihouen, sur la côte orientale de la Grande Terre, et apportèrent ici l’art des pétroglyphes. »Notons que les noms  de Tchambouen, lieu  où précisément on trouve de beaux pétroglyphe, et de Tchamba proviennent peut-être du mot  tibawe (tchambayé).


2° Sur la Côte ouest, les Gorounas, d’origine birmane,  papoue et australienne.
 Toujours selon Gabriel Païta :« si l’on en croit les récits des anciens, les premiers hominiens  d’Opao (Obawé,  la Nouvelle-Calédonie) avaient la peau rouge ; ils étaient velus et de petite taille. Dans le Nord, on les appelait les Gorouna.
Le mot Gorouna  est à rapprocher du nom d’une ethnie de Birmanie, les karenni, karen (métathèse de wigar, garwi, cf. les nom des Ouigours) de petite taille (ni ?). Nous retrouvons leur nom sur la côte est  de la Calédonie dans les toponymes  de Paa (de parama, de  Birmanie) goumen (de gomeni, de karen-ni) et de Kaala (de barama, de  Birmanie, cf. Baaba,  Balabio,  Balade , Bouloupari, de balobari, et Balade ) -gomen (i). Les pluriels Gomeni ou gomeri viennent,  par métathèse religieuse d’évitement, de Gorouni : gorouni est devenu Gonero, puis Gomero et Gomeno.   Le plus clair de tous ces  noms qui viennent de karen-ni,  les Karen de petite taille (ni), est encore, soit celui d’une tribu australienne du lac Eyre, les Ngameini, soit  celui de l’île N’Gameini aux Salomon (à rapprocher de Ouaménie et Cueménie en Calédonie), et c’est une île où l’on trouve la poterie   lapita.
Essayons maintenant de déterminer d’où vinrent les diverses vagues d’immigrants gorouna en Nouvelle-Calédonie.

Les migrations à partir de la Papouasie, de l’Australie  et de N’Gameini aux Salomon.
Les migrations avant  la Papouasie
Après la Birmanie (cf. le nom de Khmer, de Kamoro, au Cambodge,  ainsi que le nom des premiers habitants du Japon et de Corée , les Jomons, de komon, et cf. le mot chaman) , certains rameaux de ces grands navigateurs   sont allés  aux Comores (Komor) ,à Madagascar et jusqu’ en Afrique noire  (Cameron, de kameron). Les nôtres ont notamment passé par les Philippines (les Chamorro ou Morros ), l’Indonésie (sur l’île de  Sulawesi [Célébès en français ] sur le site de Talepu où a été trouvé, avec des pierres taillées datées par luminescence de 110 000 ans ,  ce qui serait le plus ancien pétroglyphe ,  gravé par les futurs premiers  migrants australiens) ,  la Papouasie, puis par l’Australie.
 1) En Papouasie-Nouvelle-Guinée, on  trouve la minorité actuelle  des Kamoros (méta    thèse de  Gorouna ), en Irian Jaya (Papouasie occidentale) et en  Nouvelle-Bretagne, l’île de Ouatom , avec une  poterie dite ouatom ( lapita ) qui se retrouve en Nouvelle-Calédonie . Le nom de Ouatom vient de (gw)arono devenu waromo, puis watomo,  par métathèse  vocalique de gorouna donnant garono, à rapprocher des  noms  de Koutomo et de Tomo, ainsi que de celui de Ouatom ( ce n’est pas une coïncidence, même si c’est absolument le même  nom que pour l’île de Nouvelle-Bretagne ; il est  écrit parfois Uatom ouWatton, comme le surnom du chef de Païta Titéma Watton) ;
2) en Australie, en particulier dans le sud-ouest du Queensland et nous retrouvons, cités par Roheim, dans Héros phalliques et symboles maternels dans la mythologie australienne,  p. 302,  304 et 305 , près d’Alice Spring:
Nguamina à Palm- Paddock,
Ungwamina, la maison ou uma des Gomina, chez les Aranda de l’Ouest (pétroglyphes de la chenille),
et gommera, o. cit.  p. 157,  traduit par guérisseurs,  chez les Yuin (sud est de l’Australie) étudiés par A. W. Howitt dans Native Tribes, p. 519.
Roheim cite,  p.122 , une  tribu des Ngameni comme faisant partie d’une région où l’on trouve des tjurunga, soit le territoire arrosé à l’est par le Darling et se prolongeant à l’ouest jusqu’au lac Eyre, englobant notamment les tribus du lac Eyre  dont les Ngameni;
3) au Vanuatu, sur l’île de    Anatom , Aneytum, ou  Aneito (de N’gameinu, devenu aneino, puis aneito ) et sur l’île de Vaté,à  Eton (de aneiton).
La préhistoire des Gorounas : avant la Birmanie.
 Petits –Poucets d’un nouveau genre,  ces nomades ont semé sur leurs routes des traces de leur passage : les pétroglyphes.
Les Gorounas  portent plutôt dans l’histoire le nom de  Ouigours (métathèse de  gourou), d’Avars ou d’Ibères (de ouiber, cf. les Berbères). C’est sous ce nom qu’ils laissent des pétroglyphes un peu partout : en Irlande (Iberia, le pays des Ibères, est le nom latin de l’Irlande, le pays d’Eire), en forêt de Fontainebleau,  aux Antilles (Guadeloupe),  en Amérique centrale (Nicaragua) et en Amérique du Sud (Vénézuela). Je traite du sujet dans mon blog Les Ligures au teint basané coldcase28.blogspot. fer/
L’élément déclencheur des migrations : -1350 avant J. C., l’éruption volcanique du Witori en Nouvelle-Bretagne.
Le nom du volcan est apparenté au nom de la peuplade des ouigouri, cf. les Ouigours et les Gorounas.  Cette éruption changea le climat de toute la région et elle entraîna le départ de nombreuses populations.
Comparaisons avec la Papouasie, le Morbihan, et le Nicaragua.
Les motifs végétaux gravés sur les pétroglyphes sont très  rares, probablement parce que les auteurs des pétroglyphes  étaient des pêcheurs – chasseurs- cueilleurs  et ne pratiquaient pas l’agriculture ; l’igname sauvage, quelques fruits comme une sorte de prune indigène ,le gui,  le concombre , et surtout le sagoutier peuvent néanmoins avoir inspiré des pierres de fécondité.  
C. Haddon a publié  en 1894, The decorative Art of British New Guinea , de plus de 300 pages, ouvrage réimprimé de nos jours , où l’auteur affirme, p. 137, que les motifs géométriques en forme de méandre ne se trouvent que dans les deux districts de Daudai et du  Golfe Papou. On trouve de nombreuses illustrations dans cet ouvrage dont certaines planches : la planche II, par exemple, avec ses cercles de fécondité sur une pipe en bambou gravé du Détroit de Torrès .
Luc Chevalier, dans Nouveaux pétroglyphes du Nord, Etudes Mélanésiennes n° 12-13 de décembre 1959, consultable sur le net a comparé un pétroglyphe de Papouasie(ci-dessous) à ceux de Calédonie.


Les auteurs de ce pétroglyphe papou.
Paul Rivet s’était attiré des quolibets incrédules lorsqu’il avait parlé de blancs de type aïnou  au pays des Papous, appartenant à la même race que nous retrouvons au nord du Japon, les Ainous, aujourd’hui en voie d’extinction par métissage. Or, le capitaine Morrell, dans  The Captain [Morrell] and « the Cannibal »,  de James Fairhead, Yale University Press, 378 pages, Londres, 2015,  p.  242, nous  raconte une expédition à l’intérieur de la Papouasie, dans Ramu Valley. Il  apprit,  chez les Garias (de gomeria),  d’un certain chef  Bivartoo,  qu’une race de blancs, aujourd’hui éteinte, avait bâti des cités sur les rives d’un fleuve  dans une grande vallée, la Vallée de Ramu.
L. Chevalier  cite aussi une comparaison  intéressante de L. Bonnemère, dans Archéologie et Pétroglyphes.(Bulletins et
Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris, Paris, 4e série, t.6, 1895) avec les représentations des dolmens du Morbihan, -tout aussi obscures (Voir mon blog  concernant  les représentations gravées sur les mégalithes tardifs de Bretagne en lien avec la circoncision), sur mon blog, coldcase28.blogspot. fr/

Les pétroglyphes calédoniens : des pierres de fécondité d’inspiration australienne, liées aux cérémonies de la circoncision, de la superincision pratiquée en Calédonie, à Ticopia et dans le Pacifique , et de la subincision, destinées à assurer la  multiplication magique d’espèces totémiques animales , selon l’ethnologue d’inspiration psychanalytique Geza Roheim, qui a travaillé sur le terrain en Australie. 
 Le hongrois Geza Roheim, dans Héros phalliques et symboles maternels dans la mythologie australienne, p.  142 sqq.,  a étudié ce qu’il appelle les cercles concentriques en rapport selon lui avec les rites de la fertilité, -ces cercles  étant un motif qu’on retrouve souvent gravé sur les pétroglyphes calédoniens.
Le duvet, andatta :
Roheim « écrit,op. cit.  p. 132 : « Le caractère « sacré » d’une cérémonie totémique est défini par l’absence des femmes et par l’emploi d’andata. » Le mot andatta est donc une proclamation que le rite totémique utilisant du duvet blanc d’oiseau collé sur le corps au moyen de sang est utilisé pour la circoncision (subincision ou superincision) . Le cacatoès blanc à huppe jaune, choisi comme totem par certaines tribus, a pu fournir le duvet en Australie et en Papouasie.





Luc Chevalier, dans son article,  Nouveaux pétroglyphes du Nord, Etudes Mélanésiennes n° 12-13 de décembre 1959, consultable sur le net,   reproduit (ci-dessus, en bas  à droite) un motif de pétroglyphe de Ponérihouen (Bhnaghra , altération de inquabara andatta,  nom chez les Arandas du sud, Roheim, L’énigme…, p.127, de la cérémonie d’initiation où inquabara désigne un tjurunga ] , comme le nom du site pétroglyphique de Néounda, de anda (ta), représenté sur un beau timbre calédonien) extrait de Luquet, figure 94 qui selon moi pourrait représenter les pulviplumes du dindon de Latham fossile.
Les Américains  appellent ce duvet « down powder » (c’est-à-dire  duvet en poudre,  sur l’extrémité des plumes, le bout de la plume se désagrégeant  en une fine poussière de kératine). Les pulviplumes existaient déjà chez le dinosaure. Elles  se trouvent chez les psittacidés (cacatoès blanc),  columbiformes, les oies  etc.  Le cas extrême est celui d’un phasianidé, le Lophophorus  impejanus,  vivant en Inde, en Afghanistan et au Pakistan ainsi qu’en Assam, peut-être apparenté au goura de Guinée. .  Chez lui,  les pulviplumes forment une énorme tache blanche sur le dos, toute resplendissante : on dirait de petites  perles de nacre d’un blanc éclatant,  très brillantes,  jetées en vrac sur son plumage : il est si beau que le Népal l’a choisi comme emblème national.
Gifford Miller, de l’Université du Colorado, Boulder,  a étudié un fossile, Genyonis newtoni, ancêtre de l’émeu, dont il a retrouvé des œufs braisés par l’homme en Australie datant d’il y a 50000 ans. Le Genyonis newtoni  était, comme l’oie, riche en duvet.     
Les pieds ou flèches (avec 2 ailettes représentant les deux morceaux de peaux retombant de chaque côté du pénis incisé) Ils représentent, selon Roheim, p.128, le pénis incisé.
Les wondjina ou wondzina, wondzad, wondjad, op. cit.,  p. 177-179 et 233-234, liés à l’éclair, à la pluie et au serpent arc-en-ciel.
Dans les grottes de Kimberley, on trouve des peintures rupestres avec des représentations  d’un homme gigantesque, haut d’environ 4 mètres , et portant une coiffure en forme de fer à cheval,le (g)upi,le blasonnant comme initié,   avec une ligne qui  représenterait  l’éclair. Les retouches permanentes dont elles sont l’objet sont censées provoquer la pluie. On trouve dans diverses grottes des têtes sans bouche et entourées d’une sorte d’auréole que les indigènes appellent ungud ou wondjina, ce qui désigne le serpent arc- en- ciel. Les wondzina sont une cause déterminante de la croissance et de la multiplication des  espèces.Photo n°1
Ci-dessus (première photo) deux serpents arc-en-ciel  avec des points jaunes (œufs) représentant deux femmes mythiques et la Voie lactée.
On peut voir une  tache noire sous une  tête auréolée de rayons ou de poils. Ces derniers sont des objets cérémoniels constitués de baguettes  appelées lyampa par les Aranda et  kililin ou ilyin par les Pitjentara, les Jumu et  les Pindupi  (Roheim, L’énigme du Sphinx, p. 128 de l’édition française, cité par Roheim, Héros phalliques et symboles maternels, p.128). Les baguettes  sont, soit  piquées dans cheveux, soit travaillées en forme de croissant ou d’arc, rappelant une demi-lune avec des rayons. Cette tache  est ce que les autochtones  appellent  le sac à charbon de bois (altawaritji), Roheim, L’énigme…, p. 130 et 146,  ambilia- ijura , poche marsupale, -ikura, - avec deux tjurungas (planchettes cérémonielles) à l’intérieur  : il s’agit de l’amnios qui enveloppe l’embryon dans le ventre de la mère,  terme  employé aussi bien pour les humains que pour les animaux.





Ci-dessus (2e photo) des têtes wondjina fraîchement repeintes (cercles de fécondité de la Voie lactée ) dans une grotte australienne, Roheim, Héros phalliques … p. 335
 Autres figures dans la partie droite de la grotte de Kimberley,Roheim, op. cit. ,  p.176 , montrant la présence de  deux cercles concentriques faisant comme un « soleil » (est-ce les seins nourriciers postiches arborés par les initiateurs au cours de la cérémonie d’initiation transférant la « paternité »  sociale de la mère à l’oncle maternel, à un mâle par conséquence ?),   une femme dont les organes sexuels sont clairement indiqués,  des points représentant des nénuphars ou lis  comestibles ou des œufs de serpent  des mains et un kangourou.
Le petit python vert sacré, vivant aujourd’hui encore à Lifou, et importé par les Tibawés (Engyralis australis  ou Morellia viridis).  
A Lifou on trouve encore aujourd’hui  un petit python arboricole qui a la curieuse habitude de se  lover en entonnoir pour recueillir l’eau de pluie, peut-être parce qu’il n’y a pas de rivière sur cette île, afin d’y attirer les oiseaux assoiffés dont il se nourrit après la pluie. Il n’appartient pas à la faune locale et a suivi les Tibawés sur  leurs pirogues comme un protecteur sacré de leurs cérémonies de circoncision  à partir de Talepakamale aux  îles Mussau (Nouvelle-Bretagne) d’où il semble originaire. Son nom local, de ligoro, le serpent (wi) enroulé (gyro),  a servi souvent,  par métaphore  à désigner les atolls à une lagune centrale, au moins à l’époque de leur nomination, puis tout atoll avec de l’eau,  par exemple Erakor, Vanikoro, etc.
Les lyampa des Aranda  appelés kililin et ilyin par les Pitjentara, les Jumu et les Pindupi.
Les baguettes de longueur variée, plongées dans le sang et recouvertes de copeaux à une de leurs extrémités (Roheim, L’énigme du Sphinx, p. 128 de l’édition française,cité par Roheim, Héros phalliques et symboles maternels, p.128) sont   sont, soit piquées dans les cheveux (haute coiffure de branchages appelée upi), soit travaillées en forme de croissant ou d’arc (cf. le serpent arc-en-ciel), rappelant une demi-lune avec des rayons. On les imprègne de sang, tout particulièrement la partie médiane de la demi-lune et l’extrémité des rayons. Pour Roheim, « l’arrangement en forme de croissant teint du sang de la subincision  représente l’orifice de la subincision, tandis que les petites baguettes trempées dans le sang représenteraient le pénis».
Les waninga (en anglais thread- cross) ou ngapa-tjinbis, Roheim, L’énigme du sphinx, p. 137.
Ces objets  ont la forme  des   croix enveloppées ou non  et croix dites grecques, d’Anjou ou de Lorraine,  Roheim, Héros phalliques…  p. 18. Ce sont des  croix à une ou à deux branches au centre d’un enveloppement en V .La traverse supérieure est plus longue que la traverse inférieure, alors que, dans notre croix de Lorraine,  c’est l’inverse. L’enveloppement en V est une suite de constellations, dont les Pléiades, annonciatrices de pluie et donc de fin de saison sèche. La barre inférieure est peut-être E Crux de la Croix du Sud (waratjupi- tjipi, c’est-à-dire des  tjurungas,  mots signifiant « attachés tout autour » ou plutôt « ensemble »), dont les étoiles sont binaires, ce qui a dû faire songer les Aborigène à leurs héros duels, unis comme des Siamois, et surtout comme  la mère et son fils. Les  deux morceaux de bois attachés ensemble  représentent un jeune garçon et un démon femelle.
Ce sigle très répandu de par le monde, comme la circoncision, quelle que soit sa forme, qu’il a pour mission de symboliser,  a  fait l’objet de deux articles sur son extension de  Carl Schuster. Ce dernier  le retrouve en Amérique du Sud et en Extrême-Orient. Il a exposé ses vues   dans « Joint- marks.  A possible index of cultural contacts between America, Oceania and the far East” . Koninklijk Institut voor de Tropen. Medeling n°XCIV. Afdeling Culturele em Physiche Anthropologie, n° 39. Amsterdam, 1951,  et dans  « V- shaped chest- markings. Distribution of a design- motiv in and around the Pacific » Anthropos.  Posieux, t. XLVII, 1952, pp. 99-118, n° 39. Amsterdam, 1952.
Dans certains de leurs dialectes, les Australiens appellent la Voie lactée yulparari, qui est le lieu où demeurent les ancêtres,  une  barrière,une palissade , ;  mais le mot palissade signifie rangée défensive de  tjurungas , Roheim,L’énigme du sphinx, p.130, et ils lui associent la Croix du sud , les Pléiades, et  les Nuages de Magellan ,Roheim,  L’énigme du sphinx,    136.  Les deux taches sombres de  la Voie lactée : deux objets cérémoniels composés de deux tjirungas disposés en croix et entourés de ficelle.  Ils représentent la Voie lactée sous l’aspect de deux serpents arc-en-ciel mâle et femelle accouplés  dont les étoiles sont les œufs, -jaunes comme la lumière diffusée  naturellement, voir les photos des peintures de la grotte de Kimberley ci-après) aux objets rituels liés à la cérémonie de la circoncision, comme les cercles concentriques de fécondité.

Image d’une étoile de  la Voie lactée imitant les cercles de fécondité.


Le bois  vertical des waninga est une tige garnie de  branches d’une longueur qui varie d’un ou deux centimètres à deux ou même trois mètres : entre les branches, on tend des fils  représentant le serpent et le cordon ombilical,  confectionnés avec des cheveux humains ou des poils de roussettes, d’’oppossums et de bandicoot- lapins, et recouverts de duvet d’oiseau blanc  et de peinture d’ocre rouge. Les waninga se portent sur la tête et sont alors appelés upi : ce sont les  emblèmes du Serpent Arc-en-ciel qui mue et perd sa peau,   ils symbolisent les hommes initiés.

Les pétroglyphes calédoniens  sont des cercles concentriques de fécondité, des pierres totémiques, c’est-à-dire capables d’engendrer magiquement des animaux.
Pour Roheim,  le cercle concentrique représente un nombril en relation avec  le cordon ombilical, -c’est un euphémisme, lui dirent les aborigènes qu’il interrogea,  pour le vagin, précisons  le vagin dans le pénis incisé de la subincision ou de la superincision calédonienne, mal décrite par Leenhardt, car elle semble avoir été bien plus lourde et le pendant de la subincision, mais sur la face supérieure de l’urètre (Voir internet à superincision).  Ajoutons une précision supplémentaire : dans la commune de Hienghène, près de Ouaré où existe un beau pétroglyphe représentant un cercle de fécondité (reproduit sur les timbres de Calédonie, où les images sont très heureusement choisies) sur la propriété de mon ami Similien  Nahiet, fils d’un coutelier de Saint- Etienne et d’une femme d’Ouvéa,  existent quelques pétroglyphes sur une grosse roche au bord de mer. A ma demande, Similien  avait interrogé un ancien sur leur signification et ce dernier  lui répondit  que les cercles concentriques comme celui de Ouaré  étaient un symbole femelle, dans lequel le mâle était caché : allusion à la superincision pratiquée en Calédonie qui,  comme la circoncision et la  subincision australiennes (pratiquées toutes les deux sur le même initié)  affirment la prééminence du rôle du mâle dans la  naissance d’un enfant.
Les  pierres qu’il étudie sont pour lui des symboles maternels, appelés par les Aborigènes des  tjurunga ou churinga  (kuntanka dans d’autres dialectes, comme celui de Pidjentara).Ils peuvent être de bois ou de pierre.







Il existe d’ailleurs d’autres objets cérémoniels du même type appelés pirnmal, plus longs et plus fins, qui sont des bâtons de fécondité: ce qu’on appelle à tort la « hache de Poya » n’a rien d’énigmatique, c’est un pirnmal qui reflète l’influence australienne et qui prouve l’existence calédonienne de ces tjurunga.
 Le centre totémique  (Roheim, Héros phalliques…, p. 168), figuré sur bois ou sur la roche du pétroglyphe, est l’endroit où l’ancêtre totémique   est en quelque sorte descendu »,  , cherchant un endroit où se fixer ; c’est  le centre de multiplication magique des animaux pris comme totems,et  toujours situé dans des régions où l’animal correspondant était prolifique à un moment donné , mais dont l’ espèce était  menacée parce qu’elle avait été  trop   chassée  ou pêchée et que ses œufs éventuels avaient été mangés, comme les œufs de l’ancêtre de l’émeu.
Souvent, le centre totémique est reproduit par tatouage sur le corps du « totémite », ainsi que sur le sol au voisinage. Roheim, Héros phalliques…, p .140, rapporte que des exécutants  d’une cérémonie de l’émeu  portaient sur leur dos des cercles concentriques tatoués, ainsi que des traces de pas des ancêtre émeus .
 Il ne faut pas confondre ces cercles concentriques qui  représentent  le lieu originel mythique des animaux convoités  avec le motif appelé « soleil »,  qui représente  en Australie et en Calédonie la collerette de l’iguane, disparu en Calédonie. Frilled-lizard500.jpg


L’évolution du motif des cercles concentriques  de fécondité en Calédonie.
Haddon évoque ce qu’il appelle l’ « angularisation » des cercles en losanges en Papouasie. Peut-être est-ce dû à la difficulté de graver un cercle régulier sur le bois. En tout cas, telle  est bien  la signification des losanges que nous rencontrons sur les chambranles mélanésiens. la langue tirée est peut-être un pénis .
Les lignes droites parallèles qu’on trouve aussi sous ce premier motif sont le résultat d’une autre  évolution du dessin initial. Elles rappellent pareillement la cérémonie dont les autochtones s’enorgueillissaient.
D’autre part, avec l’introduction de l’agriculture concernant les ignames et les taros, il y a apparition de pierres à ignames et de pierres à taros qui , sans cesser d’être des centres totémiques de multiplication des tubercules, sont aussi des catalyseurs magiques de pousse.
Le sens de certains motifs totémiques animaux  d’après ceux qu’on observe en  Australie.
A Sur la côte, la pêche
Effigie de poisson sur les pétroglyphes : 4592 b (numérotation de F. Jammes).
Le poisson-perroquet en Australie.  Roheim, Héros phalliques…,  p.  170 :
« Le centre de multiplication du perroquet consiste en une pierre ovoïde partiellement enterrée dans le sol suivant son axe longitudinal. Cette pierre est le perroquet lui- même. On creuse autour de la pierre, et, ce faisant, on proclame que le perroquet doit se multiplier et fournir une pêche abondante. A mesure que la terre est enlevée, on l’éparpille vers le nord et vers le sud et on prononce les noms de différents endroits où le poisson est censé pulluler [et qui sont représentés sur le tjurunga , au sol et sur le corps du célébrant par des cercles concentriques]. Après avoir enlevé ainsi une certaine quantité de terre, on retire la pierre de son trou et on la dépose tout à côté sur le flanc. On s’adresse à elle en ces termes : « A marée basse, tu seras couchée de cette manière. » On la peint ensuite avec du charbon et de l’ocre jaune et rouge mêlé à de la graisse, on la replace dans son trou, et on amoncelle de la terre tout autour. On tend des branches d’arbre par-dessus la pierre pendant un moment, puis on  traîne ces branchages sur un sentier en direction de l’océan. »  Ainsi est-on assuré que les poissons quitteront leur rocher maternel et descendront jusqu’à la mer.
B) Sur le bord des creeks ou des rivières comme la Coulé ou à Canala : l’anguille.
  C) Des animaux calédoniens  aujourd’hui disparus : l’iguane et le dindon de Latham.
 1) L’iguane, représenté par une sorte de soleil (la collerette du reptile), Roheim, Héros phalliques…, p.170.
 Il doit être précisé que le mot iguane, d’origine caraïbe et avec un i préposé,  doit être réservé aux reptiles américains, mais le terme apparenté, goana ou godarge en australien , gosana à Ouvéa , amène Roheim  à s’en servir.
Au Nicaragua, existent justement, comme en Guadeloupe,  des pétroglyphes qui semblent reproduire la collerette du saurien (ci-dessous) et ressemblent aux pétroglyphes calédoniens.



A la cérémonie du lézard à collerette (en anglais lace- lizard ou  frilled –lizard, Chlamydosaurus kingi),  les exécutants se décorent de façon à ressembler aux iguanes. Dans l’Australie méridionale , les lignes en zigzag ou les méandres qui figurent sur certains pétroglyphes comme sur certaines planchettes totémiques australiennes et qui sont tatouées en blanc sur la poitrine des participants  représentent les marques que porte  l’iguane sur son (Roheim, op. cit. , p . 142).
 Ils nettoient un trou dans le sol avec des branchages et dessinent différents sentiers le long desquels les iguanes seront censés se rendre vers diverses régions où  ils seront ensuite capturés. Finalement, des tiges sont enroulées à l’intérieur du trou, puis tirées avec vigueur le long des sentiers, -entraînant ainsi, dit-on, les iguanes, rite qui rappelle celui du perroquet de mer.
 Les iguanes sont très convoités des aborigènes qui sont friands de certains morceaux, notamment  de la graisse et les grands muscles de la queue. Ces sauriens ont certes disparu de Calédonie, mais il reste un nom comme Gosana à Ouvéa et l’on peut imaginer qu’à l’époque de la création de ces pétroglyphes où déjà ils commençaient à se raréfier, ils existaient encore. On  songe à des  variétés  du lézard à collerette, d’une laideur terrifiante. Lorsque ce dernier est attaqué, il gonfle et étale la collerette qui entoure son cou, et prend un aspect farouche qui est censé terroriser l’adversaire. Il est appelé à collerette à cause du large repli de peau qu'en temps normal il tient appliqué sur son cou et ce repli en fait un symbole tout naturel pour la circoncision australienne.
La collerette (ou chlamyde) est pourvue de « baleines » cartilagineuses et lorsque l'animal se sent en danger, il ouvre sa gueule en grand et déploie sa collerette, formant une vaste tache menaçante jaune et rosée. Il semblerait que cette collerette, richement vascularisée, intervienne aussi dans la thermorégulation de l'animal.
 Il lui arrive de marcher en « bipède » ;  il se tient alors en équilibre sur sa longue queue, tandis que ses pattes antérieures pendent le long de son corps.
On le trouve en Papouasie, en Australie du nord et dans le Queensland et une de ses variétés  a dû exister au Nicaragua, de nikar -igua (n), le pays du Serpent likar, cf.  ligur) -iguane, où les autochtones en ont fait un motif de pétroglyphe.

2) Le talégalle de Latham en Calédonie,  Megapodius mollistructor Balouet 1989 .
On trouve ce talégale   en Australie dans le nord du Queensland et dans la  Nouvelle- Galles du sud jusqu’à Illawara. Or, ce dindon existait à  l’île des Pins (voir Paul Griscelli,  bulletin n°29, 2e tr.  1976, « Deux oiseaux fossiles de Nouvelle-Calédonie ») et sur la grande Terre. Il avait été aperçu  par William Anderson (Notes manuscrites) lors du second voyage de Cook  et celui-ci le nomma Tetrao australis, trouvant qu’il ressemblait aux tétras d’Ecosse, précisant qu’il, était noir  et sans plumes sur les pattes , à la différence du coq de bruyère ou grouse.  Ce mégapode   fut encore aperçu en 1860 par Verreaux et des Murs qui le décrivent comme un dindon des broussailles (les insulaires de  Morari [Boulari] , au Mont-Dore, l’appelaient ndino). Balouet, qui en a trouvé des ossements fossiles, l’appelle Megapodius mollistructor, nouvelle espèce.
Le Sylviornis neocaledoniae Poplin 1980, dont le statut est très débattu,  pourrait n’en être qu’une variété (Mourer- Chauviré et Balouet, monographie de 2005)
  Il ne faut pas confondre ces dindons de grande taille avec le du des Kounié , une sorte de poule noire aptère ,Megapodius eremita, analogue à des volatiles voisins aux Salomon (Megapodius eremita, mégapode mélanésien), au Vanuatu (Megapodius layardi),  et en Papouasie (Megapodius decollatus).
Roheim, Hérosq phalliques… , p.131, nous apprend qu’un pulapa (danse des hommes) pitjentara correspond au mythe du totem du dindon australien apparenté au Megapodius mollistructor, nouvelle espèce.
D) Les insectes à métamorphose comme les chenilles ou les libellules  ou à mue comme les hannetons, les criquets, ou les sauterelles, qui perdent leur peau, dépouilles ou exuvies, ont piqué la curiosité des Aborigènes.
La chenille de bancoulier (witchetty grub en anglais), de couleur blanche, si appréciée des Australiens comme du Sud-est asiatique en général et que , aux dires de l’introducteur de Roheim dans Héros phalliques…, les femmes détectent avec un flair incroyable.
 Son goût, cru ou à peine grillé », rappelle, dit-on, celui du rôti de porc ou des œufs frits. Ce sont les larves d’un lépidoptère, Endoxyla leucomochia. En tant qu’aliment  (ce sont pourtant des charançons !), elles sont  les héritières  des vers de sagoutiers de Papouasie , que l’on consomme partout en Asie du sud, parfois aussi sous forme de farine.
Art aborigène : cercle de fécondité, sentiers (en marron) et chenilles (en vert).


 Ci-dessus, sur la fig.7 à gauche et au milieu, ce pourrait être des représentations du totem des  chenilles de Ouégoa, à côté d’une croix enveloppée à droite  ( les Pléiades, annonciatrices de pluies et donc de fin de saison sèche, donc de chenilles abondantes . ) et de deux   cercles concentriques  de reproduction totémique. A Farino et à Sarraméa, les chenilles sont encore aujourd’hui très appréciées.  






Dans Roheim, p.302, op. cit. , 2e figure, pour la représentation australienne des chenilles.
 
                                 
                   
























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