LE SECRET DES
PETROGLYPHES OU LE SECRET DES HOMMES EN NOUVELLE-CALEDONIE : QUELQUES
SUGGESTIONS
Bibliographie : je
renvoie à l’excellent CD de Fernand Jammes et à l’ouvrage magistral
de C. Sand qui dresse un inventaire quasi exhaustif des
pétroglyphes calédoniens.
Langues australiennes
et langues calédoniennes.
Il y a des langues d’origine
australienne en Calédonie : quatre au nord et sur la côte est, une seule
sur la côte ouest, le tiri :
1 le tiri, dans la région de La Foa et de Couli , apparenté au biri australien ;
2 le tipindjé , dérivé du pitjentara
près d’Alice Spring en Australie aujourd’hui ;
3) le nemi
parlé à Hienghène . Le nemi est apparenté à certains dialectes australiens dits
paama-yanga [parama, de birman, cf. les noms de Hienghène, de yanga , et de Tanghène, de lyanga].
Ainsi, le mot chanem qui signifie excrément en
Hienghène et correspond à bomaign (de
gonaym) en langue de Balade et à boné en langue de Maré se retrouve dans le kechua amérindien huanu (d’où vient notre mot
guano) et dans l’australien guna,
gunong, ganing ;
4) le yalayu parlé à
Bondé, Gomen, Paimboa, Balade, Belep, Pam ; il est apparenté aussi aux
langues australiennes dites paama –yanga ;
5) le paici, parlé vers Touho,
avec en finale le suffixe –ik
indiquant le langage (cf. le nom d’un lieu où justement il y a des pétroglyphes,
Linderalique de lyndral-ik, à rapprocher de Aranda, de lynda en Australie, et de lyanga, nom de certaines langues
australiennes) apparenté aussi aux langues appelées paama -yanga en Australie .
Dans mon enfance, j’entendais des injures d’origine australienne, comme kouinda, con, dérivé de l’australien
kounthia , kouna signifiant
vagin en australien. De même pour
konyaos, même sens, ou bunan, anus,
Aussi ne faut-il pas s’étonner si
avec ces langues sont arrivées d’Australie
la hache- ostensoir et la « hache
de Poya » (voir mon blog sur le
serpent de mer et les flèches faîtières), ainsi que la « fourchette de
cannibale » (voir mon blog du même nom), les palissades autour du grand
chef dont les planches sont des tjurunga emblématiques de la circoncision et surtout les rites de la subincision, de la superincision et de la circoncision et
les pétroglyphes qui commémorent ces cérémonies totémiques. Les influences
papoues plus tardives, peut-être du XVII e siècle , (Pouébo) n’ont pu réussir à
effacer
l’ancienne empreinte australienne
Quels sont les noms
des deux groupes d’auteurs des pétroglyphes calédoniens ?
1) Au Nord et sur la
côte est : les Menehune, des pêcheurs venus des Philippines (Mindanao) en passant par l’Australie et le Vanuatu.
Jules Durand , cité par Coquilhat , nous dit que les Ouébias
de Pouébo désignaient les premiers
habitants du nom de Menehune,
une forme qui se retrouve en Polynésie jusqu’à
Hawaï. Menehune, à rapprocher de Mindanao, nom d’une île des
Philippines, se retrouve dans Marino (de marehuno), nom d’une langue parlée à Maëwo (Vanuatu), dans Farino (de marehino) en Nouvelle-Calédonie ou
Mérina [de merehuna] à Madagascar. On peut songer
aussi en Papouasie à la tribu des Marind’anim
et en Australie au groupe de tribus du
nom de Merino,dont font partie les
Ngatatara et les Apatanguru, , avec
le nom du Mont Merino de marehuno cité par Roheim, L’énigme du sphinx, p.133, et à Nanene , de Menehune, à rapprocher de Nenumbo , nom d’une île Santa Cruz
aux Salomon (cf aussi Imbo
en Australie).
.
Gabriel Païta, ce descendant
de la grande chefferie des Kambwas, dans Gabriel
Païta, témoignage Kanak, D’Opao au pays de la Nouvelle-Calédonie, par Jérôme Casaumayou et Thomas de
Dekker, l’Harmattan, leur donne le nom
de Ti : « si l’on en croit les récits des anciens, les premiers hominiens d’Opao (de la Nouvelle-Calédonie) avaient la
peau rouge ; ils étaient velus et de petite taille.
« Puis vint un
jour le peuple des Ti [ou encore les Tibawé, avec arrêt à Lifou]…Venus de la mer, ces grands hommes au corps
couvert de tatouages s’établirent dans la région de Ponérihouen, sur la côte
orientale de la Grande Terre, et apportèrent ici l’art des pétroglyphes. »Notons que les noms de Tchambouen,
lieu où précisément on trouve de beaux
pétroglyphe, et de Tchamba proviennent
peut-être du mot tibawe (tchambayé).
2° Sur la Côte ouest,
les Gorounas, d’origine birmane, papoue
et australienne.
Toujours selon Gabriel Païta :« si l’on en croit les récits des anciens, les
premiers hominiens d’Opao (Obawé, la Nouvelle-Calédonie) avaient la peau
rouge ; ils étaient velus et de petite taille. Dans le Nord, on les
appelait les Gorouna.
Le mot Gorouna est à rapprocher du nom d’une ethnie de
Birmanie, les karenni, karen (métathèse
de wigar, garwi, cf. les nom des Ouigours)
de petite taille (ni ?). Nous
retrouvons leur nom sur la côte est de
la Calédonie dans les toponymes de Paa (de parama, de Birmanie) goumen (de gomeni, de karen-ni) et de Kaala (de
barama, de Birmanie, cf. Baaba, Balabio, Balade ,
Bouloupari, de balobari, et Balade ) -gomen (i). Les pluriels Gomeni ou gomeri viennent, par métathèse religieuse d’évitement, de Gorouni : gorouni est devenu Gonero, puis Gomero et Gomeno. Le plus clair de tous ces noms qui viennent de karen-ni, les Karen de
petite taille (ni), est encore, soit
celui d’une tribu australienne du lac Eyre, les Ngameini, soit celui de
l’île N’Gameini aux Salomon (à
rapprocher de Ouaménie et Cueménie en Calédonie), et c’est une île où l’on
trouve la poterie lapita.
Essayons maintenant de déterminer d’où vinrent les diverses
vagues d’immigrants gorouna en Nouvelle-Calédonie.
Les migrations à partir
de la Papouasie, de l’Australie et de
N’Gameini aux Salomon.
Les migrations
avant la Papouasie
Après la Birmanie (cf. le nom de Khmer, de Kamoro, au
Cambodge, ainsi que le nom des premiers
habitants du Japon et de Corée , les Jomons,
de komon, et cf. le mot chaman) , certains rameaux de ces
grands navigateurs sont allés aux Comores (Komor) ,à Madagascar et jusqu’ en Afrique noire (Cameron, de kameron). Les nôtres ont notamment passé par les Philippines (les Chamorro ou Morros ), l’Indonésie (sur
l’île de Sulawesi [Célébès en français
] sur le site de Talepu où a été
trouvé, avec des pierres taillées datées par luminescence de 110 000 ans ,
ce qui serait le plus ancien pétroglyphe
, gravé par les futurs premiers migrants australiens) , la Papouasie,
puis par l’Australie.
1) En
Papouasie-Nouvelle-Guinée, on trouve la
minorité actuelle des Kamoros (méta thèse de Gorouna ), en Irian Jaya (Papouasie
occidentale) et en Nouvelle-Bretagne, l’île
de Ouatom , avec une poterie dite ouatom ( lapita ) qui
se retrouve en Nouvelle-Calédonie . Le nom de Ouatom vient de (gw)arono devenu waromo, puis watomo, par métathèse vocalique de gorouna donnant garono,
à rapprocher des noms de
Koutomo et de Tomo, ainsi que de
celui de Ouatom ( ce n’est pas une
coïncidence, même si c’est absolument le
même nom que pour l’île de Nouvelle-Bretagne ; il est écrit parfois Uatom ouWatton, comme le surnom du chef de
Païta Titéma Watton) ;
2) en Australie,
en particulier dans le sud-ouest du Queensland et nous retrouvons, cités par
Roheim, dans Héros phalliques et symboles
maternels dans la mythologie australienne, p. 302,
304 et 305 , près d’Alice Spring:
Nguamina à Palm-
Paddock,
Ungwamina, la maison ou
uma des Gomina, chez les Aranda de l’Ouest (pétroglyphes de la chenille),
et gommera, o. cit. p. 157, traduit par guérisseurs, chez les Yuin
(sud est de l’Australie) étudiés par A. W. Howitt dans Native Tribes, p. 519.
Roheim cite, p.122 ,
une tribu des Ngameni comme faisant partie d’une région où l’on trouve des tjurunga,
soit le territoire arrosé à l’est par le Darling et se prolongeant à l’ouest
jusqu’au lac Eyre, englobant notamment les tribus du lac Eyre dont les Ngameni;
3) au Vanuatu, sur
l’île de Anatom
, Aneytum, ou Aneito
(de N’gameinu, devenu aneino, puis aneito ) et , sur l’île de Vaté,à
Eton (de aneiton).
La préhistoire des Gorounas : avant la Birmanie.
Petits –Poucets d’un
nouveau genre, ces nomades ont semé sur
leurs routes des traces de leur passage : les pétroglyphes.
Les Gorounas portent plutôt
dans l’histoire le nom de Ouigours (métathèse de gourou),
d’Avars ou d’Ibères (de ouiber, cf.
les Berbères). C’est sous ce nom
qu’ils laissent des pétroglyphes un peu partout : en Irlande (Iberia, le pays des Ibères, est le nom
latin de l’Irlande, le pays d’Eire), en forêt de Fontainebleau, aux Antilles (Guadeloupe), en Amérique centrale (Nicaragua) et en
Amérique du Sud (Vénézuela). Je traite du sujet dans mon blog Les Ligures au teint basané coldcase28.blogspot.
fer/
L’élément déclencheur des migrations : -1350 avant
J. C., l’éruption volcanique du Witori en Nouvelle-Bretagne.
Le nom du volcan est
apparenté au nom de la peuplade des ouigouri,
cf. les Ouigours et les Gorounas. Cette éruption changea le climat de toute la
région et elle entraîna le départ de nombreuses populations.
Comparaisons avec la
Papouasie, le Morbihan, et le Nicaragua.
Les motifs végétaux gravés sur les pétroglyphes sont
très rares, probablement parce que les
auteurs des pétroglyphes étaient des
pêcheurs – chasseurs- cueilleurs et ne
pratiquaient pas l’agriculture ; l’igname sauvage, quelques fruits comme
une sorte de prune indigène ,le gui, le
concombre , et surtout le sagoutier peuvent néanmoins avoir inspiré des pierres
de fécondité.
C. Haddon a publié en 1894, The
decorative Art of British New Guinea , de plus de 300 pages, ouvrage réimprimé
de nos jours , où l’auteur affirme, p. 137, que les motifs géométriques en
forme de méandre ne se trouvent que dans les deux districts de Daudai et
du Golfe Papou. On trouve de nombreuses
illustrations dans cet ouvrage dont certaines planches : la planche II,
par exemple, avec ses cercles de fécondité sur une pipe en bambou gravé du
Détroit de Torrès .
Luc Chevalier, dans Nouveaux pétroglyphes du Nord, Etudes Mélanésiennes n° 12-13
de décembre 1959, consultable sur le net, a comparé un pétroglyphe de Papouasie(ci-dessous)
à ceux de Calédonie.
Les auteurs de ce
pétroglyphe papou.
Paul Rivet s’était attiré des quolibets incrédules lorsqu’il avait
parlé de blancs de type aïnou au pays
des Papous, appartenant à la même race que nous retrouvons au nord du Japon,
les Ainous, aujourd’hui en voie d’extinction par métissage. Or, le capitaine Morrell,
dans The Captain [Morrell] and
« the Cannibal », de James
Fairhead, Yale University Press, 378 pages, Londres, 2015, p. 242,
nous raconte une expédition à
l’intérieur de la Papouasie, dans Ramu Valley. Il apprit,
chez les Garias (de gomeria), d’un certain chef Bivartoo, qu’une race de blancs, aujourd’hui éteinte,
avait bâti des cités sur les rives d’un fleuve
dans une grande vallée, la Vallée de Ramu.
L.
Chevalier cite aussi une
comparaison intéressante de L. Bonnemère, dans Archéologie et
Pétroglyphes.(Bulletins et
Mémoires de la Société
d’anthropologie de Paris, Paris, 4e série, t.6, 1895) avec les représentations des dolmens du Morbihan, -tout
aussi obscures (Voir mon blog concernant
les représentations gravées sur
les mégalithes tardifs de Bretagne en lien avec la circoncision), sur mon
blog, coldcase28.blogspot. fr/
Les pétroglyphes calédoniens : des pierres de
fécondité d’inspiration australienne, liées aux cérémonies de la circoncision,
de la superincision pratiquée en Calédonie, à Ticopia et dans le Pacifique , et
de la subincision, destinées à assurer la
multiplication magique d’espèces totémiques animales , selon l’ethnologue
d’inspiration psychanalytique Geza Roheim, qui a travaillé sur le terrain en
Australie.
Le hongrois Geza Roheim, dans Héros phalliques et symboles maternels dans
la mythologie australienne, p. 142 sqq.,
a étudié ce qu’il appelle les cercles concentriques en rapport selon
lui avec les rites de la fertilité, -ces cercles étant un motif qu’on retrouve souvent gravé
sur les pétroglyphes calédoniens.
Le duvet, andatta :
Roheim « écrit,op. cit. p. 132 : « Le caractère « sacré » d’une cérémonie totémique est défini
par l’absence des femmes et par l’emploi
d’andata. » Le mot andatta est donc une proclamation que
le rite totémique utilisant du duvet blanc d’oiseau collé sur le corps au moyen
de sang est utilisé pour la circoncision (subincision ou superincision) .
Le cacatoès blanc à huppe jaune, choisi comme totem par certaines tribus, a pu
fournir le duvet en Australie et en Papouasie.
Luc Chevalier, dans son
article, Nouveaux pétroglyphes
du Nord, Etudes
Mélanésiennes n° 12-13 de décembre 1959, consultable sur le net, reproduit (ci-dessus, en bas à droite) un motif de pétroglyphe de
Ponérihouen (Bhnaghra ,
altération de inquabara andatta,
nom chez les Arandas du sud, Roheim, L’énigme…,
p.127, de la cérémonie d’initiation où
inquabara désigne un tjurunga ] ,
comme le nom du site pétroglyphique de Néounda, de anda (ta), représenté sur un beau timbre calédonien) extrait de
Luquet, figure 94 qui selon moi pourrait représenter les pulviplumes du dindon
de Latham fossile.
Les Américains appellent ce duvet « down powder » (c’est-à-dire duvet en poudre, sur l’extrémité des plumes, le bout de la
plume se désagrégeant en une fine
poussière de kératine). Les pulviplumes existaient déjà chez le dinosaure.
Elles se trouvent chez les psittacidés
(cacatoès blanc), columbiformes, les
oies etc. Le cas extrême est celui
d’un phasianidé, le Lophophorus impejanus, vivant en Inde, en Afghanistan et au Pakistan
ainsi qu’en Assam, peut-être apparenté au goura de Guinée. . Chez lui,
les pulviplumes forment une énorme tache blanche sur le dos, toute
resplendissante : on dirait de petites
perles de nacre d’un blanc éclatant,
très brillantes, jetées en vrac
sur son plumage : il est si beau que le Népal l’a choisi comme emblème
national.
Gifford Miller, de
l’Université du Colorado, Boulder, a
étudié un fossile, Genyonis newtoni,
ancêtre de l’émeu, dont il a retrouvé des œufs braisés par l’homme en Australie
datant d’il y a 50000 ans. Le Genyonis
newtoni était, comme l’oie, riche en
duvet.
Les pieds ou flèches (avec 2 ailettes représentant les deux morceaux de
peaux retombant de chaque côté du
pénis incisé) Ils représentent,
selon Roheim, p.128, le pénis incisé.
Les wondjina ou
wondzina, wondzad, wondjad, op.
cit., p. 177-179 et 233-234, liés à
l’éclair, à la pluie et au serpent arc-en-ciel.
Dans les grottes de
Kimberley, on trouve des peintures rupestres avec des représentations d’un homme gigantesque, haut d’environ 4
mètres , et portant une coiffure en forme de fer à cheval,le (g)upi,le blasonnant
comme initié, avec
une ligne qui représenterait l’éclair.
Les retouches permanentes dont elles sont l’objet sont censées provoquer la
pluie. On trouve dans diverses grottes des têtes sans bouche et entourées d’une
sorte d’auréole que les indigènes appellent ungud
ou wondjina, ce qui désigne le
serpent arc- en- ciel. Les wondzina
sont une cause déterminante de la croissance et de la multiplication des espèces.Photo n°1
Ci-dessus (première photo)
deux serpents arc-en-ciel avec des
points jaunes (œufs) représentant deux femmes mythiques et la Voie lactée.
On peut voir une tache noire sous une tête auréolée de rayons ou de poils. Ces
derniers sont des objets cérémoniels constitués de baguettes appelées
lyampa par les Aranda et
kililin ou ilyin par les Pitjentara,
les Jumu et les Pindupi (Roheim, L’énigme
du Sphinx, p. 128 de l’édition française, cité par Roheim, Héros phalliques et symboles maternels,
p.128). Les baguettes sont, soit piquées dans cheveux, soit travaillées en
forme de croissant ou d’arc, rappelant une demi-lune avec des rayons. Cette
tache est ce que les autochtones appellent le sac à
charbon de bois (altawaritji), Roheim,
L’énigme…, p. 130 et 146, ambilia- ijura , poche marsupale, -ikura, - avec deux tjurungas
(planchettes cérémonielles) à l’intérieur
: il s’agit de l’amnios qui
enveloppe l’embryon dans le ventre de la mère,
terme employé aussi bien pour les
humains que pour les animaux.
Ci-dessus (2e
photo) des têtes wondjina fraîchement
repeintes (cercles de fécondité de la Voie lactée ) dans une grotte
australienne, Roheim, Héros phalliques
… p. 335
Autres figures dans la partie droite de
la grotte de Kimberley,Roheim, op. cit.
, p.176 , montrant la présence de deux cercles concentriques faisant comme un
« soleil » (est-ce les seins nourriciers postiches arborés par les
initiateurs au cours de la cérémonie d’initiation transférant la
« paternité » sociale de la mère à l’oncle maternel, à un mâle
par conséquence ?), une femme dont les organes sexuels sont
clairement indiqués, des points représentant
des nénuphars ou lis comestibles ou des
œufs de serpent des mains et un
kangourou.
Le petit python vert sacré, vivant
aujourd’hui encore à Lifou, et importé
par les Tibawés (Engyralis australis ou Morellia viridis).
A Lifou on trouve encore
aujourd’hui un petit python arboricole
qui a la curieuse habitude de se lover
en entonnoir pour recueillir l’eau de pluie, peut-être parce qu’il n’y a pas de
rivière sur cette île, afin d’y attirer les oiseaux assoiffés dont il se
nourrit après la pluie. Il n’appartient pas à la faune locale et a suivi les
Tibawés sur leurs pirogues comme un
protecteur sacré de leurs cérémonies de circoncision à partir de Talepakamale aux îles Mussau
(Nouvelle-Bretagne) d’où il semble originaire. Son nom local, de ligoro, le serpent (wi) enroulé (gyro), a servi souvent, par métaphore
à désigner les atolls à une lagune centrale, au moins à l’époque de leur
nomination, puis tout atoll avec de l’eau,
par exemple Erakor, Vanikoro, etc.
Les lyampa des Aranda
appelés kililin et ilyin par les Pitjentara, les Jumu et
les Pindupi.
Les baguettes de longueur
variée, plongées dans le sang et recouvertes de copeaux à une de leurs extrémités
(Roheim, L’énigme du Sphinx, p. 128
de l’édition française,cité par Roheim, Héros
phalliques et symboles maternels, p.128) sont sont, soit piquées dans les cheveux (haute coiffure
de branchages appelée upi), soit
travaillées en forme de croissant ou d’arc (cf. le serpent arc-en-ciel),
rappelant une demi-lune avec des rayons. On les imprègne de sang, tout
particulièrement la partie médiane de la demi-lune et l’extrémité des rayons.
Pour Roheim, « l’arrangement en
forme de croissant teint du sang de la subincision représente l’orifice de la subincision, tandis que les petites baguettes trempées dans le sang
représenteraient le pénis».
Les waninga (en
anglais thread- cross) ou ngapa-tjinbis, Roheim, L’énigme
du sphinx, p. 137.
Ces objets ont la forme
des croix enveloppées
ou non et croix
dites grecques, d’Anjou ou de Lorraine, Roheim, Héros
phalliques… p. 18. Ce sont des croix à une ou à deux branches au centre d’un enveloppement
en V .La traverse supérieure est plus longue que la traverse inférieure, alors que,
dans notre croix de Lorraine, c’est
l’inverse. L’enveloppement en V est une suite de constellations, dont les Pléiades,
annonciatrices de pluie et donc de fin de saison sèche. La barre inférieure est peut-être E Crux de la Croix du Sud (waratjupi- tjipi, c’est-à-dire des tjurungas, mots signifiant « attachés tout autour » ou plutôt « ensemble »),
dont les étoiles sont binaires, ce
qui a dû faire songer les Aborigène à leurs héros duels, unis comme des Siamois,
et surtout comme la mère et son fils.
Les deux morceaux de bois attachés
ensemble représentent un jeune garçon et
un démon femelle.
Ce sigle très répandu de par
le monde, comme la circoncision, quelle que soit sa forme, qu’il a pour mission
de symboliser, a fait l’objet de deux articles sur son
extension de Carl Schuster. Ce
dernier le retrouve en Amérique du Sud
et en Extrême-Orient. Il a exposé ses vues
dans « Joint- marks. A possible index of cultural contacts between
America, Oceania and the far East” . Koninklijk Institut voor de Tropen.
Medeling n°XCIV. Afdeling Culturele em Physiche Anthropologie, n° 39.
Amsterdam, 1951, et dans « V- shaped chest- markings. Distribution
of a design- motiv in and around the Pacific » Anthropos. Posieux,
t. XLVII, 1952, pp. 99-118, n° 39. Amsterdam, 1952.
Dans certains de leurs
dialectes, les Australiens appellent la Voie lactée yulparari, qui est le lieu où demeurent les ancêtres, une barrière,une
palissade , ; mais le mot palissade
signifie rangée défensive de tjurungas , Roheim,L’énigme du sphinx, p.130, et ils lui associent la Croix du sud , les Pléiades, et les Nuages de Magellan ,Roheim, L’énigme
du sphinx, 136. Les deux taches sombres de la Voie lactée : deux objets cérémoniels
composés de deux tjirungas disposés en croix et entourés de ficelle. Ils
représentent la Voie lactée sous l’aspect de deux serpents arc-en-ciel mâle et
femelle accouplés dont les étoiles sont
les œufs, -jaunes comme la lumière diffusée naturellement, voir les photos des peintures
de la grotte de Kimberley ci-après) aux objets rituels liés à la cérémonie de
la circoncision, comme les cercles concentriques de fécondité.
Image d’une étoile de la Voie lactée imitant les cercles de
fécondité.
Le bois vertical des waninga est une tige garnie de branches d’une longueur qui varie d’un ou deux
centimètres à deux ou même trois mètres : entre les branches, on tend des
fils représentant le serpent et le cordon
ombilical, confectionnés avec des
cheveux humains ou des poils de roussettes, d’’oppossums et de bandicoot- lapins,
et recouverts de duvet d’oiseau blanc et
de peinture d’ocre rouge. Les waninga se
portent sur la tête et sont alors appelés upi :
ce sont les emblèmes du Serpent
Arc-en-ciel qui mue et perd sa peau, ils symbolisent les hommes initiés.
Les pétroglyphes calédoniens sont des cercles concentriques de fécondité,
des pierres totémiques, c’est-à-dire capables d’engendrer magiquement des
animaux.
Pour Roheim, le
cercle concentrique représente un
nombril en relation avec le cordon
ombilical, -c’est un euphémisme, lui dirent les aborigènes qu’il interrogea, pour le vagin, précisons le vagin dans
le pénis incisé de la subincision ou
de la superincision calédonienne, mal décrite par Leenhardt, car elle
semble avoir été bien plus lourde et le pendant de la subincision, mais sur la
face supérieure de l’urètre (Voir
internet à superincision). Ajoutons une précision supplémentaire : dans
la commune de Hienghène, près de Ouaré où existe un beau pétroglyphe
représentant un cercle de fécondité (reproduit sur les timbres de Calédonie, où
les images sont très heureusement choisies) sur la propriété de mon ami
Similien Nahiet, fils d’un coutelier de
Saint- Etienne et d’une femme d’Ouvéa, existent quelques pétroglyphes sur une grosse
roche au bord de mer. A ma demande, Similien avait interrogé un ancien sur leur
signification et ce dernier lui répondit
que les cercles concentriques comme
celui de Ouaré étaient un symbole femelle, dans lequel le mâle était caché : allusion à la superincision pratiquée
en Calédonie qui, comme la circoncision
et la subincision australiennes
(pratiquées toutes les deux sur le même initié)
affirment la prééminence du rôle du mâle dans la naissance d’un enfant.
Les pierres qu’il
étudie sont pour lui des symboles maternels, appelés par les Aborigènes des tjurunga
ou churinga (kuntanka dans d’autres dialectes, comme
celui de Pidjentara).Ils peuvent être de bois ou de pierre.
Il existe d’ailleurs d’autres objets cérémoniels du même
type appelés pirnmal, plus longs et
plus fins, qui sont des bâtons de fécondité: ce qu’on appelle à tort la « hache de Poya » n’a rien d’énigmatique,
c’est un pirnmal qui reflète l’influence
australienne et qui prouve l’existence calédonienne de ces tjurunga.
Le centre totémique (Roheim, Héros
phalliques…, p. 168), figuré sur bois ou sur la roche du pétroglyphe, est l’endroit
où l’ancêtre totémique est en quelque sorte descendu », , cherchant un endroit où se fixer ;
c’est le centre de multiplication
magique des animaux pris comme totems,et toujours situé dans des régions où l’animal
correspondant était prolifique à un moment donné , mais dont l’ espèce était menacée parce qu’elle avait été trop chassée
ou pêchée et que ses œufs éventuels avaient été mangés, comme les œufs
de l’ancêtre de l’émeu.
Souvent, le centre
totémique est reproduit par tatouage sur le corps du « totémite »,
ainsi que sur le sol au voisinage. Roheim, Héros phalliques…, p .140,
rapporte que des exécutants d’une cérémonie
de l’émeu portaient sur leur dos des
cercles concentriques tatoués, ainsi que des traces de pas des ancêtre
émeus .
Il ne faut pas confondre
ces cercles concentriques qui représentent
le lieu originel mythique des animaux
convoités avec le motif appelé
« soleil », qui représente en Australie et en Calédonie la collerette de
l’iguane, disparu en Calédonie.
L’évolution du motif
des cercles concentriques de fécondité
en Calédonie.
Haddon évoque ce qu’il appelle l’ « angularisation » des cercles en losanges en Papouasie.
Peut-être est-ce dû à la difficulté de graver un cercle régulier sur le bois.
En tout cas, telle est bien la signification des losanges que nous
rencontrons sur les chambranles mélanésiens. la langue tirée est peut-être un
pénis .
Les lignes droites parallèles qu’on trouve aussi sous ce
premier motif sont le résultat d’une autre
évolution du dessin initial. Elles rappellent pareillement la cérémonie
dont les autochtones s’enorgueillissaient.
D’autre part, avec l’introduction de l’agriculture
concernant les ignames et les taros, il y a apparition de pierres à ignames et de pierres
à taros qui , sans cesser d’être des centres totémiques de multiplication
des tubercules, sont aussi des catalyseurs magiques de pousse.
Le sens de certains
motifs totémiques animaux d’après ceux
qu’on observe en Australie.
A Sur la côte, la
pêche
Effigie de poisson
sur les pétroglyphes : 4592 b (numérotation de F. Jammes).
Le poisson-perroquet
en Australie. Roheim, Héros phalliques…, p. 170 :
« Le centre de multiplication du perroquet consiste en
une pierre ovoïde partiellement enterrée dans le sol suivant son axe
longitudinal. Cette pierre est le
perroquet lui- même. On creuse autour de la pierre, et, ce faisant, on proclame que le perroquet doit se
multiplier et fournir une pêche abondante. A mesure que la terre est
enlevée, on l’éparpille vers le nord et vers le sud et on prononce les noms de différents endroits où le poisson est censé
pulluler [et qui sont représentés sur le tjurunga , au sol et sur le corps
du célébrant par des cercles concentriques].
Après avoir enlevé ainsi une certaine quantité de terre, on retire la pierre de
son trou et on la dépose tout à côté sur le flanc. On s’adresse à elle en ces
termes : « A marée basse, tu seras couchée de cette
manière. » On la peint ensuite avec du charbon et de l’ocre jaune et rouge
mêlé à de la graisse, on la replace dans
son trou, et on amoncelle de la terre tout autour. On tend des branches
d’arbre par-dessus la pierre pendant un moment, puis on traîne ces branchages sur un sentier en
direction de l’océan. » Ainsi est-on assuré que les poissons quitteront leur
rocher maternel et descendront jusqu’à la mer.
B) Sur le bord des
creeks ou des rivières comme la Coulé ou à Canala : l’anguille.
C) Des
animaux calédoniens aujourd’hui disparus :
l’iguane et le dindon de Latham.
1) L’iguane, représenté par une sorte de soleil (la collerette du reptile), Roheim,
Héros phalliques…, p.170.
Il doit être précisé
que le mot iguane, d’origine caraïbe et
avec un i préposé, doit être réservé aux reptiles américains,
mais le terme apparenté, goana ou godarge en australien , gosana à Ouvéa , amène Roheim à s’en servir.
Au Nicaragua, existent justement, comme en Guadeloupe, des pétroglyphes qui semblent reproduire la
collerette du saurien (ci-dessous) et ressemblent aux pétroglyphes calédoniens.
A la cérémonie du lézard
à collerette (en anglais lace- lizard
ou frilled
–lizard, Chlamydosaurus kingi), les
exécutants se décorent de façon à ressembler aux iguanes. Dans l’Australie
méridionale , les lignes en zigzag ou les méandres qui figurent sur certains
pétroglyphes comme sur certaines planchettes totémiques australiennes et qui
sont tatouées en blanc sur la poitrine des participants représentent les marques que porte l’iguane sur son (Roheim, op. cit. , p . 142).
Ils nettoient un trou
dans le sol avec des branchages et dessinent différents sentiers le long
desquels les iguanes seront censés se rendre vers diverses régions où ils seront ensuite capturés. Finalement, des
tiges sont enroulées à l’intérieur du trou, puis tirées avec vigueur le long
des sentiers, -entraînant ainsi, dit-on, les iguanes, rite qui rappelle celui
du perroquet de mer.
Les iguanes sont très
convoités des aborigènes qui sont friands de certains morceaux, notamment de la graisse et les grands muscles de la queue.
Ces sauriens ont certes disparu de Calédonie, mais il reste un nom comme Gosana
à Ouvéa et l’on peut imaginer qu’à l’époque de la création de ces pétroglyphes où
déjà ils commençaient à se raréfier, ils existaient encore. On songe à des variétés du lézard à collerette, d’une laideur
terrifiante. Lorsque ce dernier est attaqué, il gonfle et étale la collerette
qui entoure son cou, et prend un aspect farouche qui est censé terroriser
l’adversaire. Il est appelé à collerette à cause du large repli de peau qu'en
temps normal il tient appliqué sur son cou et ce repli en fait un symbole tout
naturel pour la circoncision australienne.
La collerette (ou chlamyde) est pourvue de
« baleines » cartilagineuses et lorsque l'animal se sent en danger,
il ouvre sa gueule en grand et déploie sa collerette, formant une vaste tache
menaçante jaune et rosée. Il semblerait que cette collerette, richement
vascularisée, intervienne aussi dans la thermorégulation de l'animal.
Il lui arrive de
marcher en « bipède » ; il se tient alors en équilibre sur sa longue
queue, tandis que ses pattes antérieures pendent le long de son corps.
On le trouve en Papouasie, en Australie du nord et dans le
Queensland et une de ses variétés a dû
exister au Nicaragua, de nikar -igua (n),
le pays du Serpent likar, cf. ligur)
-iguane, où les autochtones en ont fait un motif de pétroglyphe.
2) Le talégalle de Latham en Calédonie, Megapodius mollistructor Balouet 1989 .
On trouve ce talégale en Australie dans le nord du Queensland et dans la Nouvelle- Galles du sud jusqu’à Illawara. Or,
ce dindon existait à l’île des Pins
(voir Paul Griscelli, bulletin n°29, 2e
tr. 1976, « Deux oiseaux fossiles de Nouvelle-Calédonie ») et sur
la grande Terre. Il avait été aperçu
par William Anderson (Notes manuscrites) lors du second voyage de
Cook et celui-ci le nomma Tetrao
australis, trouvant qu’il ressemblait aux tétras d’Ecosse, précisant qu’il,
était noir et sans plumes sur les pattes
, à la différence du coq de bruyère ou grouse. Ce mégapode fut
encore aperçu en 1860 par Verreaux et des Murs qui le décrivent comme un dindon
des broussailles (les insulaires de
Morari [Boulari] , au Mont-Dore, l’appelaient ndino). Balouet,
qui en a trouvé des ossements fossiles, l’appelle Megapodius mollistructor,
nouvelle espèce.
Le
Sylviornis neocaledoniae Poplin 1980, dont le statut est très débattu, pourrait n’en être qu’une variété (Mourer- Chauviré
et Balouet, monographie de 2005)
Il ne faut pas confondre ces dindons de
grande taille avec le du des Kounié , une sorte de poule noire aptère ,Megapodius
eremita, analogue à des volatiles voisins aux Salomon (Megapodius
eremita, mégapode mélanésien), au Vanuatu (Megapodius layardi), et en Papouasie (Megapodius decollatus).
Roheim, Hérosq
phalliques… , p.131, nous apprend qu’un pulapa (danse des hommes)
pitjentara correspond au mythe du totem du dindon australien apparenté au Megapodius
mollistructor, nouvelle espèce.
D) Les insectes à métamorphose comme les chenilles ou
les libellules ou à mue comme les
hannetons, les criquets, ou les sauterelles, qui perdent leur peau, dépouilles
ou exuvies, ont piqué la curiosité
des Aborigènes.
La chenille de bancoulier (witchetty grub
en anglais), de couleur blanche, si appréciée des Australiens comme du Sud-est
asiatique en général et que , aux dires de l’introducteur de Roheim dans Héros phalliques…, les femmes détectent
avec un flair incroyable.
Son goût, cru ou à peine grillé », rappelle,
dit-on, celui du rôti de porc ou des œufs frits. Ce sont les larves d’un
lépidoptère, Endoxyla leucomochia. En tant qu’aliment (ce sont pourtant des charançons !), elles
sont les héritières des vers de sagoutiers de Papouasie , que
l’on consomme partout en Asie du sud, parfois aussi sous forme de farine.
Art aborigène
: cercle de fécondité, sentiers (en marron) et chenilles (en vert).
Ci-dessus, sur la fig.7 à gauche et au milieu,
ce pourrait être des représentations du totem des chenilles de Ouégoa, à côté d’une croix enveloppée
à droite ( les
Pléiades, annonciatrices de pluies et
donc de fin de saison sèche, donc de chenilles abondantes . ) et de deux cercles concentriques de reproduction totémique. A Farino et à Sarraméa,
les chenilles sont encore aujourd’hui très appréciées.
Dans Roheim, p.302, op.
cit. , 2e figure, pour la représentation australienne des
chenilles.
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