LES MEMOIRES DE JACQUES GRISCELLI , BARON DE RIMINI,AGENT SECRET DE PIE IX ET CHEF
CATHOLIQUE DE CAUSA NOSTRA.
I UN TEMOIN BIEN GENANT.
Le mieux, quand on veut réduire à néant un
témoignage « politiquement incorrect », c’est encore de
prétendre que l’auteur du témoignage n’a jamais existé .En 1907,
l’ « Intermédiaire des Chercheurs et Curieux » (N. 1140,
28/02/1907) ose affirmer que J-. F. Griscelli n’a jamais vécu et toute une
polémique débute alors, qui est destinée à discréditer son témoignage et laissera
des traces indélébiles chez les historiens. Lorsque j’eus l’occasion de
déjeuner avec Alain Decaux, je lui ai demandé pourquoi, dans la bibliographie de sa « Castiglione »
(seule partie que j‘avais lue à ce moment), il ne citait ni n’utilisait, même
pour les réfuter, les Mémoires de mon lointain parent.
Il m’a répondu que , sur la base des allégations de l ‘« Intermédiaire »,
il avait cru ces Mémoires
apocryphes. De même, mon professeur d’ histoire en hypokhâgne au Lycée Louis
-le- Grand, Emile Tersen, avait nourri des soupçons à son endroit
.Certains mettent systématiquement en doute ses déclarations. Même
celle-ci : « Le maire et le curé du village sont deux Griscelli de
ma famille » (au début des Mémoires) a été contestée, mais à
tort, on le verra dans la généalogie qui suit, puisqu'il évoque là ses cousins
germains, particulièrement le curé de
Moïta. Parmi d’autres témoins, Citons
Victor Hugo , Karl Marx et Engels pour
son action en Italie.
D’autre part, J. -F. Griscelli a-t-il écrit ses œuvres
lui-même? Il savait lire et écrire, parlait italien, français et espagnol . Il a paraphé la page
de garde de divers exemplaires de ses Mémoires et on ne lui connaît
aucun nègre . Les derniers manuscrits ont été, malheureusement, détruits par le
conseiller général et maire de Vezzani
André Griscelli qui, à la demande pressante du mandataire du
gouvernement italien, le marquis A. Colocci,
sous le prétexte de détruire des pages
osées sur la vie privée de l’Impératrice Eugénie,anéantit tous les autres
textes qu'il avait eu la curiosité de rassembler auprès des descendants directs
du baron.
L’orthographe de J. -F. Griscelli était
parfois phonétique, pour les noms propres en particulier . Ainsi parle-t-il (p.
54 de l’édition bruxelloise de ses Mémoires) de la rue de Trancy à Paris
au lieu de la rue du Transit, aujourd’hui disparue.
Il ne faut jamais perdre de vue que toutes les polices
politiques du monde persécutaient notre malheureux et indiscret parent, ni que
des jugements français, belges , etc. n’attendaient que le hasard d'une
arrestation pour être exécutés (par exemple, la formule « dit le baron de
Rimini » tente d'éviter des actions judiciaires supplémentaires pour
" port de titre non autorisé") .
II-BIBLIOGRAPHIE TRES
SUCCINCTE.
a) Sur l’ homme:
L’ouvrage de base est celui du marquis sicilien cité plus haut qui vint
enquêter et surtout faire détruire tous les manuscrits restants à Vezzani.Son
point de vue, hostile, bien entendu, à
J-.F. Griscelli, reflète celui du gouvernement italien, gêné par les
révélations de notre parent et celui des sociétés secrètes siciliennes, Causa
nostra notamment, dont il fut le dernier dirigeant nommé par la papauté,
-au temps où celle-ci avait encore des Etats : encore a-t-il le mérite d’être
argumenté et assez bien informé . Il s’agit de:
Adriano Colocci, Griscelli e le sue Memorie ,
Ermanno Loescher, 1909, 288 pages. C’est la seule édition critique des Mémoires,
en italien, avec une introduction historique de 60 pages.Ouvrage possédé par
moi.
Compte rendu dans
Archivio storico di Corsica , XIV-N° 3, juillet 1938-XVI, p.
447-450, par Pio Pecchiai.
Marie Battistini, « Una mancata azione giudiziaria in
Belgio per le Memorie di Griscelli(1867) », in Archivio
storico di Corsica , juillet 1933 .
b)L’Œuvre:
1 LETTRE D’UN BERGER CORSE A
S. M. L’EMPEREUR DES FRANCAIS, 1857, in-8, 15 p., Paris, Boucquin
(éditeur de la Police). Possédé par moi.C’est sa première œuvre, contre la loi du 22 juillet
1854 sur le parcours et la vaine pâture, appliquée à la Corse, loi qui
interdisait tout simplement la transhumance au profit des propriétaires et au
détriment ses bergers. Il s’y revendique comme ancien berger et prend
courageusement position tout seul contre l’avis du Conseil général de Corse.
L’ouvrage atteste son besoin de publier.Il signe à la fin « J.- F.
Griscelli », alors que le tire mentionne simplement « par
Griscelli ».
2 LES HOMMES ET LES CHOSES DU
ROYAUME D’ITALIE PAR UN AGENT SECRET DE
CAVOUR ,GENEVE.A été corrigé par Mgr.
Mermillod, évêque de Genève.
3 LA VERITE SUR LES HOMMES ET
LES CHOSES DU ROYAUME D’ITALIE REVELATIONS PAR J.A. ANCIEN AGENT SECRET DU
COMTE DE CAVOUR.
Bruxelles, bureau de la REVUE
BELGE ET ETRANGERE, 13, rue des boiteux.
Imprimerie J. Delièvre, 1861.Réédition
en 1862.Une traduction en anglais (1862), une autre en italien.
4 FRANCOIS II AU CONGRES DE
NAPOLEON III.
5 LETTRE A NAPOLEON III.
6 LETTRE A VICTOR EMMANUEL
.Fribourg.
7 LETTRE A PALMERSTON, Wyss, Berne.
8 LETTRE A PIETRI.
9 A BAS LES MASQUES!
Bruxelles, 1864, Vandereyt. Réédition des 2 opuscules 6 et 7 .
10 MEMOIRES.
1ère édition
clandestine par Vigneron, anonyme et sans date,à Bruxelles, rare.
1ère édition
officielle, en 2 volumes, sous le tire: MEMOIRES DE GRISCELLI AGENT SECRET DE
NAPOLEON III(1850-58), DE CAVOUR(1859-61), de ANTONELLI(1861-62), DE FRANCOIS
II(1862-64), DE L’EMPEREUR D’AUTRICHE(1864-67), PAR L’AUTEUR DES REVELATIONS ET
DE A BAS LES MASQUES. Bruxelles-Genève-Londres, 1867.In-16, 243 pages.
L’édition la plus répandue porte le titre:
MEMOIRES DE GRISCELLI DE VEZZANI DIT LE BARON DE RIMINI EX-AGENT SECRET DE
NAPOLEON, CAVOUR, ANTONELLI,FRANCOIS II ET DE L’AUTRICHE, Bruxelles ,
imprimerie Ch. et A. Vanderauwera, rue de la Sablonnière, 8. Date de
1871.Consultable à la Bibliothèque Fesch à Ajaccio ou en photocopie la mairie
de Vezzani. Possédé par moi ( avec son paraphe au crayon).
Autre édition à Bruxelles en 1871 du Peuple
belge à Bruxelles.
Édition anglaise en 1888 .
Edition américaine numérique
récente à couverture bleue, vers 2007.
11 LES CRIMES DE NAPOPLEON
III. Paris, Librairie centrale, 1873, autre version des Mémoires.
12 LES NUITS ET LE MARIAGE DE
CESAR,AVEC UNE LETTRE DE BADINGUETTE A BADINGUET. Bruxelles, sous le pseudonyme
de H. Magen.
13 LES DEUX COURS ET LES NUITS DE SAINT-CLOUD.MŒURS, DEBAUCHES
ET CRIMES DE LA FAMILLE BADINGUET (sous le pseudonyme de H. Magen, Bruxelles).
14 L‘INGRATITUDE DE NAPOLEON III, PAR UNE DE SES
VICTIMES, Bruxelles, 1871.
Il est indispensable de
consulter les Memoires de Claude et l’historien F. Loliée (La Comtesse
de Castiglione, Les femmes du Second Empire).
J.-F. Griscelli est devenu un personnage
romancé dans plus d’un feuilleton, film ou pièce consacré à la Castiglione.
III QUI ETAIT CE GRISCELLI?
A SES PRENOMS.
Jacques- François
constitue son prénom selon l’état-civil et c’est celui que connaît Victor Hugo.
Il a pris aussi les prénoms de Joseph-François ou de Joseph-Arthur (J.-A.) ou
d’ Arthur tout court . Sa famille, à
Vezzani, l’appelait
« MUTONE », ce qui signifie le bélier et fait allusion à ses
moments de transe belliqueuse où, tel Achille, rien ne pouvait l’arrêter dans
sa passion coléreuse: un éblouissement prémonitoire l’avertissait que du sang
serait répandu le jour même .
B-LE TITRE DE
NOBLESSE .
L’appellation « de Vezzani » (l’italien est
d’ailleurs plus clair et distingue da Vezzani et di Vezzani)n’indique pas autre
chose que le lieu d’origine et la fierté qu’elle implique, non la noblesse .Le
titre de baron de Rimini lui fut conféré par François II, roi des Deux-Sicile,
à un moment où la ville de Rimini avait échappé à son autorité. Il ne s’agit ni
d’un pseudonyme littéraire ni d’un titre usurpé .Personne n’a pu prouver que le
titre était faux , mais, en tant que titre étranger, son port était soumis en
France à autorisation du gouvernement. « Le roi des Deux -Sicile, écrit le
baron, de son exil de Rome, me créa baron et m’envoya, avec mes titres de
noblesse, une lettre écrite de sa main…J’étais entré [chez le Cardinal Wiseman]
simple berger, j’en sortis baron…Le diplôme que le roi m’a envoyé
porte:« Griscelli, baron de Rimini ».
C-L’ACTE DE DECES.
Colocci n’a pas réussi à le trouver. Lors de mon enquête en
1958 à Vezzani auprès de M.
Grazietti,parent de la famille Bonaparte et héritier de Napoléon par les
Ramolino (J.-F. Griscelli, alors très âgé, avait été son professeur d’escrime),
celui-ci me raconta comment il avait assisté à ses obsèques à Marseille, où il
se trouvait lui-même par hasard, pour une course d’automobiles, et comment il y
avait très peu de monde devant la fosse commune: François Muraccioli, 32 ans, Pierre Sammattei, 28 ans, marin, et sa dernière
épouse (la cinquième, semble-t-il) Marie
Vincensini, vezzanaise également. L’acte de décès, en date du 13 mars 1905, est muet sur sa filiation
: il l’appelle Joseph- François et le
rajeunit en lui donnant 60 ans seulement.
Il avait en réalité 94 ans et ainsi manifesté une très belle longévité, malgré
une toux qui ne le quittait pas. Quant à la profession, il est indiqué
« journalier » :il est vrai que J.-F. Griscelli n’avait pas
craint de se faire passer pour « négociant en bestiaux », aux
yeux de la police (Cf. Colocci, op. cit., p. 58). Ses dernières années
se sont ainsi passées dans la misère
entre Vezzani et Marseille, aussi discrètes que possible. J’appris en 1958 de M.
Grazietti que le baron de Rimini avait fait don à l’Eglise de Vezzani dédiée à
saint Quilicus , qui figurait dans la
chapelle à gauche en entrant, d’un tableau italien du XVIe siècle représentant Caïn tuant Abel , mais je lis sur le net à Vezzani Wiki qu’il s’agit de l'église paroissiale de l'Annonciation (L'Annunziata).
Elle a été fondée en 1666 par le père Profizio
Grazietti comme mentionné sur une plaque apposée à l'intérieur. Elle est
constituée d'une nef centrale avec six chapelles latérales. En 1997, la
chapelle Notre- Dame- des- Grâces a été restaurée par la famille Don Georges
Grazietti, derniers descendants du fondateur. Elle possède un autel en marbre
et un tableau primitif italien
représentant Caïn tuant Abel. Cette œuvre appartenait à la collection du
cardinal Fesch.
Restaurée en 2009, l'édifice, d'une architecture classique,
présente sur sa façade antérieure une porte latérale aux motifs sculptés
étonnants : deux aigles impériaux . »
IV VICTOR HUGO ET J-F
GRISCELLI
Le poète connaissait
J.-F. Griscelli, il avait lu ses Mèmoires dans l’édition
bruxelloise (il reprend à son compte « la rue de Trancy » sans
corriger); il reste de marbre sur ce que révèle de lui notre parent , p.111 de
ses Mémoires, qui doit donc être vrai.
Dans Histoire d’un crime (IV, 5),
Victor Hugo cite un billet d’Alexandre Dumas, qui le prévenait de rester chez lui , et le grand
poète écrivait :« Un Corse, né à
Vezzani, nommé Jacques-François Griscelli, homme attaché au service personnel
et secret de Louis Bonaparte, avait reçu de la bouche de Pietri l’offre de
vingt-cinq mille francs « pour prendre ou tuer Victor Hugo ». Il avait
accepté, et dit:-C’est bon, si je suis seul . Mais si nous sommes deux?…Pietri
avait répondu:
-Ce sera cinquante mille
francs. » Victor Hugo ajoute une note: « c’est ce même Griscelli
qui, plus tard, rue de Trancy, tua, par
mission spéciale du préfet de police, un nommé Kelch, « soupçonné de
tramer l’assassinat de l’empereur ».
Dans « La Légende des Siècles », Victor
Hugo a campé notre intrépide parent sous la Commune en grand danger de se faire
lyncher par la foule des insurgés (Guerre civile) et sauvé par
l'apparition attendrissante de son jeune fils:
« Tuons-le comme un
loup!-Et l’homme dit, tranquille:
« C’est bien, je suis le loup, mais vous êtes les chiens!
…Tous criaient:-Fusillez le mouchard!Qu’on l’assomme!
…A mort!C’est un brigand!-Soudain on entendit
Une petite voix qui disait:-C’est mon père!
Et quelque chose fit l’effet d’une lumière.
J.-F. Griscelli a
connu et apprécié le poème et en a parlé à sa famille: celle-ci a été sensible
à l’alliance du sublime hugolien et du panache de ce personnage haut en
couleur.
V -UN « BON CATHOLIQUE »: L’HOMME ET SES
IDEES.
Au physique, J.-F.
Griscelli est remarquable par sa force
et par son habileté aux armes: sa longévité incroyable (94 ans!) nous
prouve sa santé de fer.
Au moral, il est fragile et sensible:trop de sang versé,
lors du fameux duel de corps de Lyon,le rend « fou » quelque
temps.Il doute en permanence de la réalité lorsque,lui, simple berger, il se
voit entouré du Pape,des grands de ce monde, empereurs, rois, princesses.Il est
irascible et violent, fastueux et généreux: il distribue, au temps où il manie
les fonds secrets, des pièces d’or aux enfants de Vezzani, offre une pendule à
la mairie ou finance la reconstruction de la sacristie. Il aime les beaux
habits, les stylets finement ciselés et les pistolets et épées de grand prix
.D’autre part, il a un total mépris de la mort qui se retrouve chez d’autres
membres de sa phratrie.
C’est évidemment un homme à femmes. Il a
beaucoup aimé la Comtesse de Gardonne, sur la tombe de laquelle il va se
recueillir à Saint- Petersbourg: il s’agenouille et pleure longuement.
L’unité de sa carrière politique est à chercher dans sa foi
au pape .Très tôt, il est initié à une société secrète catholique et
pontificale , Causa Nostra, dont les dérives actuelles ne doivent pas faire oublier les
intentions originellement catholiques et
pontificales .Il en gravit les échelons jusqu’à en devenir le chef et ne l'a
jamais trahie. Ainsi s’explique la signature des exécutions décidées avec le
vitriolage du visage du coupable .Dès le début de sa vie d’aventures, il est un
agent secret du pape en tant que chef d’Etat, une sorte de James Bond de
l’époque. S’il rompt avec Napoléon III, c’est aussi sur ordre à partir du
moment où l’Empereur n’hésite plus et a opté pour l’unité italienne , et par
conséquent entre en conflit avec la politique du Pape.
VI COMMENT L’ESPRIT VIENT A UN BERGER CORSE.
Jacques- François nous raconte comment,
alors même qu’il était âgé de moins de 9 ans, il était si rebelle que personne
ne pouvait le maîtriser et que son père dut le confier à son oncle maternel, Jean-Pierre Baldovini, berger à
Pietrobianca. Il y garde des chèvres
jusqu’à l’âge de 15 ans, passant six mois sur la côte à Aléria et le
reste de l’année sur la montagne de Galé (Kali). Son père le rappelle pour
qu’il l’aide à cultiver le blé et à faire des légumes. Il a 18 ans quand, le 12
février 1829, il épouse Jeanne-Marie Griscelli, fille de Noël Griscelli et de
Marie Vincensini :
« Mon père, écrit-il,… me força, EN QUELQUE SORTE, à épouser une de mes
cousines… qui aurait pu faire notre bonheur, si elle n’eût pas écouté sa
mère…Son unique occupation était (suivant les conseils de sa mère) de nous
dépouiller pour enrichir sa famille [Vincensini] ».Précisons le sens
du « en quelque sorte »: un mois avant le mariage,
Jeanne-Marie avit donné le jour au premier fils du futur baron, Jacques-Jean,
et qui s’appelait déjà ,du nom de sa mère, Griscelli. Le baron continue:
« Sans la méchanceté de mon épouse, je ne serais jamais
sorti de mon village. »
VII COMMENT UN BERGER CORSE DEVIENT MILLIONNAIRE EN
FRANCS-OR ET SE RUINE.
Le baron écrit avec humour:
« La police secrète… est une institution que les tyrans
seuls ont crée pour avoir le droit de percevoir,tous les ans, quelques millions
de fonds secrets, pour héberger un tas de badauds qui ne sont occupés, dans
leur service, qu’à s’espionner les uns les autres. »
Il a essayé d’en profiter et c’est avec cynisme,
cette fois, qu’il écrit:
« Un agent intelligent peut être payé à la fois par
Cavour, pr le Pape, par le roi de Naples, et voyager de Naples à Palerme aux
frais du général Garibaldi,qu’il a pour mission d’assassiner: c’est, en effet,
ce qui m’est arrivé. »
Il réussit ainsi à amasser une fortune considérable,
mais il perd 72000 francs-or dans le krach du comte de Glimes, espagnol soutenu
par Eugénie de Montijo: l’insistance de Jacques-François à réclamer des
poursuites contre le protégé de l’Impératrice est une des causes de la disgrâce
de notre parent et de la haine qui s’installe entre eux.Toutefois, il lui reste
encore beaucoup d’argent liquide, malgré les vols dont il est victime.Lorsqu’il
est disgracié, en 1858, de retour à Vezzani, il peut écrire:
« J’étais parti avec 25 frs. en poche et j’y retournais
avec 130000 frs.Deux jours après, j’achetais les propriétés du juge de paix
Vitali [l’actuelle propriété Grazietti] et je lui payais 40000 francs
comptant. »
A force de porter sur lui des sommes énormes
en napoléons, ce qui devait arriver se produisit : à Vezzani, il fut volé de
90000 francs-or environ.
Jusqu’en 1866, il gagnera encore beaucoup
d’argent, mais s’empressera de le dilapider, si bien qu’il passera la fin de sa
vie dans une quasi-misère.
Dans les Mémoires de Claude (III,1),
on peut lire, à propos de sa disgrâce lièe à l’attentat d’ Orsini (attentat sur
lequel lui-même se refuse à parler):
« Zampo fut tué par Griscelli à Londres lorsque, après
l’affaire des bombes Orsini, Griscelli, disgracié par l’Empereur, fut traqué à
Londres par ses propres agents, devenus ses pourchasseurs…Au moment de
l’affaire des bombes Orsini, Griscelli fut joué par la contrepolice des
Carbonari…Ils parvinrent à évincer le Corse du lieu de l’attentat et Griscelli,
par cette faute, faillit à Londres être tué par son liutenant Zampo .Et ce fut
pour ne pas être tué qu’il tua…On vit Griscelli n’échapper aux représailles
impériales dont il avait été l’instrument, qu’en se sauvant, en se ralliant à
l’Autriche, pour esquiver, lui, un Corse, la vendetta de ses anciens
soldats. »
L’incroyable persécution dont notre parent
fut victime de la part du régime et de la police de Napoléon III, de 1859 à
1870, tient peut-être au fait que, par une erreur intéressée et dont les
services parallèles sont coutumiers, on a cru ou feint de croire qu’il était
complice de l’attentat d’Orsini et que telle était la raison pour laquelle il
avait exécuté Zampo.De plus, par point d’honneur corse et pour ne pas impliquer
ses nouveaux commanditaires, Jacques- François ne dit rien sur le sujet dans
ses Memoires.Il se contente de relater froidement comment il tue Zampo à
Londres, mais prête à cette exécution une raison fausse : le
« suicide » manipulé du prince
de Cammerata.
VII VALEUR HISTORIQUE DES MEMOIRES.UN EXEMPLE:LA
COMTESSE DE CASIGLIONE.
A. Decaux écrit dans La Castiglione:
« Les Mémoires de Griscelli forment l’exemple le
plus accompli d’une œuvre parfaitement apocryphe et romanesque. »
En réalité, l’académicien n’a jamais lu les Mémoires
en question et les cite de seconde main en les déformant. L’historien F. Loliée
accorde, lui, plus de poids à la version du baron de Rimini: il s’interroge:
« il y a du vrai dans le récit de
l’homme de police » .De plus, il avait rencontré ceux qui avaient
fréquenté ou aimé « la divine comtesse ». Dans Les
femmes du second empire,il rappelle «l’insistance avec laquelle le
gouvernement italien a exigé la livraison des papiers de Madame de Castiglione
[ à Paris en 1899 après sa mort] de manière à n’en laisser subsister
aucune trace. » C’est aussi, comme par hasard, Adriano Colocci, le
seul « spécialiste » de J.- F.
Griscelli, qui fut chargé d’une double mission, à La Spezia et à Vezzani: d'une
part, trier les archives de la comtesse à La Spezia et détruire celles qui
importaient ; d'autre part, obtenir à Vezzani la destruction des manuscrits de
J. -F. Griscelli, détenus par le conseiller général et maire André Griscelli.
L’historien F. Loliée cite, dans Les femmes
du second empire , à propos de la tentative d’assassinat ourdie contre
Napoléon III chez la comtesse de Castiglione par Zampo et déjouée par
J.-F. Griscelli, une lettre du 20 mars 1904 que lui avait écrite le général et
député Estancelin, amant de la comtesse:
« Vous ai-je rappelé qu’un agent de police de service
près de l’Empereur [l’Italien Zampo, et non pas le Corse Griscelli] était venu
trouver quelqu’un que je sais [le duc d’Aumale, intime de la comtesse] pour assassiner le grand chef [Napoléon III]
et que cet individu [Zampo] était en rapport avec la comtesse?
Vous ai- je renvoyé l’écho lointain de ces
paroles dans une conversation à deux:
[ZAMPO] Si je l’avais fait assassiner,
qu’auriez-vous dit?
[LE DUC D’AUMALE] Rien. Non, je ne m’étonne
de rien. Mais ce n’eût pas été par « vengeance d’amour, ni par intérêt.
C’est donc une raison politique. Laquelle?
Oui, d’où venait la rupture entre Elle
et Lui? Déception? Fatigue? Ou quoi?
-Il reste beaucoup
à approfondir dans les ténèbres de cette grande existence si agitée. Et,
d’ailleurs, sait-on jamais la vérité de ce que dit une femme, et une femme
politique surtout? »
Essayons de répondre aux deux questions que
se pose le duc d’Aumale.
La première porte sur la raison politique et
sur le commanditaire principal de l’attentat : le duc se rend comte qu’il doit
s’agir de son neveu, le duc de Chartres, et que celui-ci n’a même pas daigné le
consulter pour un attentat visant à rétablir les Orléans et qui, découvert,
pouvait avoir de graves conséquences pour lui et ses partisans .
La seconde « Ou quoi» porte sur les mobiles de la rupture entre Napoléon III
et la Castiglione, mobiles qui préexistent
à la tentative d’attentat chez la comtesse et expliquent son
étonnante participation à celle-ci. « Mon Napoléon avait peur, écrira
la comtesse, et je l’ai lâché ». En effet, Napoléon III abandonne, à ce moment, la cause de l’unité italienne que
pourtant, jadis, il avait fait le
serment de réaliser lorsqu’il luttait avec les carbonari insurgés. De plus, il
a peur du qu’en-dira-t-on à propos de leur liaison il refuse de s’afficher et
Virginia se rend compte qu’elle ne pourra manœuvrer à sa guise l’Empereur.
Quant à lui, il soupçonnera la comtesse de l’avoir trahi et d’avoir été
complice de l’attentat, même s’il ne peut le dire ouvertement. Le préfet de
police Carlier confiera à Madame Baroche: « Cette femme n’a ni cœur ni
âme. Je la crois capable de tout, même d’assassiner... » Celle-ci
rétorquera: « Tout beau, M. le préfet. Comment
l’entendez-vous? » Rappelons le
célèbre mot de la comtesse dont l‘idéal était Catherine de Médicis : «Plus
je vois les hommes, et plus j’aime mes chiens... »
Revenons sur l’attentat en lui-même et
remarquons d’abord le lieu que lui assigne J.-F.Griscelli:l’Hôtel de
Beauvau.Celui-ci devait, en 1860, devenir l’Hôtel de la police et de l’
intérieur, mais il était alors un hôtel meublé. Le mari de la comtesse et son
fils habitant Avenue Montaigne, c’était à l’Hôtel de Beauvau qu’avaient lieu
les rencontres, détail peu connu ,-et peu remarqué dans le récit de notre
parent.
Il semble bien qu’à l’insu de J.-F.
Griscelli, son collègue Zampo se soit
abouché avec Madame Luisa Corsi, la fidèle servante italienne de la Comtesse de
Castiglione, pour tramer l’assassinat. Notre parent ne percera à jour le rôle
de l'Italien Zampo qu’au moment de
l’attentat d’ Orsini, moins d’un an plus tard : c’est à ce moment que notre
parent le tuera, au sortir des
rendez-vous orléanistes de celui-ci chez le duc de Chartres et chez le duc
d’Aumale à Londres, et qu’il lui vitriolera le visage, -signature de son
exécution comme traître par une société secrète catholique bien connue : Zampo
avait desservi la cause du Pape en trempant dans deux attentats destinés à
provoquer une politique en faveur de l’unité italienne. Notre parent ne peut
mentir, alors que, ce matin -là, il a eu
son éblouissement prémonitoire qui lui
annonce toujours du sang versé dans la journée même (signe auquel il croit
fermement),et qu’il se rend, une heure avant le rendez-vous galant, dans le
salon de service attenant au cabinet de l’Empereur pour tenter de dissuader
l’Empereur de se rendre à l’Hôtel de Beauvau.
La comtesse
n’en voulut pas à notre parent: à Florence ,elle l’invite à dîner chez elle avec sa dame de compagnie Luisa
Corsi afin d’apprendre de sa bouche ces nouvelles politiques dont elle était si
friande.
Ainsi, à propos d’un fait connu et
controversé, on ne saurait balayer d’un trait de plume les affirmations de
Jacques- François Griscelli dans ses sulfureux Mémoires.
GENEALOGIE
LA FAMLLE GRISCELLI
Elle est installée à Vezzani dès le XVI e siècle, dans la
maison « grisgellana » qui existe encore (renseignement communiqué
par des généalogistes génois à M.
Grazietti). Le nom, du latin « GRAECULI », signifie Grec. On
retrouve dans cette famille un prénom masculin
d'origine grecque , Parthénopée,
altéré en « PARTHELOPE » , nom qui vient de Parthénopéïos,
consacré à Parthénopée, la Vierge noire , de « PARTHENOS » (parqe/noj ),
Vierge, et d’OUPIS » ou « OPIS » (Ou)=piV, )=WpiV) , nom de la grande Déesse Mère lorsqu’elle est brunie
par le Soleil, on le verra .
La Grande Déesse Parthénopis.
Grâce à Frazer dans le Rameau d'Or, en
particulier dans Le Roi magicien dans la société primitive, on peut
interpréter « PARTHENOS » comme la femme non mariée
toute-puissante de l' époque du
matriarcat. « OUPIS » est le nom de la
Grande Déesse Mère d'Ephèse et de Délos, plus tard assimilée par les Grecs à Artémis , puis
à Diane par les Romains. Une trace du
culte de la Grande Déesse mère Oupis se retrouve près d’Aleria dans le nom actuel
de l’étang de Diane ou dans celui de la « pieve d’ Opino »,
ce denier nom nous étant attesté au IIe siècle par Ptolémée dans son Traité de Géographie sous la forme Opeinon (de Opis ),peinon. Quelle est l’étymologie du nom Oupis? Une
racine indo-européenne signifiant cuire, chauffer par le soleil est abondamment
établie: opson, epso, pepso, pepto ou pesso , Parthenopis est ainsi la
vierge cuite par le soleil, la vierge noire. Opoora, l’automne,
ou plus exactement, la 3e des 7 saisons du calendrier grec, est la
saison (hora) d’Oupis commençant à la Canicule, c’est- à- dire
l’époque où Sirius du Grand Chien se lève et se couche avec le soleil, et elle
commence au 15 août, date de l‘Assomption de la Vierge mais
anciennement grande fête de la déesse Oupis . Quand Napoléon Bonaparte naquit
un 15 août, sa mère Lætitia , née Ramolino et donc originaire de ces régions
dont nous parlons, imposa le diminutif
de Parthenopé Partholopé, savoir Napoleone et lui- même imposa à Naples le nom de République
Parthénopéenne, sachant que l’île en face de Naples s’appelait
Parthenopée et que Naples s’appelait d’abord Parthénopéia devenue au fil du
temps Néapolis , Napolis par étymologie populaire ’la nouvelle ville) .
Le géant de l’église de Vezzani.
Oupis ,
assimilée à Artemis ou à Diane,
avait un fils, un géant nommé
Tityos . Or, un géant est curieusement
représenté sur la chaire de l’église de Vezzani où il est représenté enchaîné
par le Christ. Selon la mythologie, c'est Zeus qui foudroya le géant: Tityos resta fixé au sol,
où deux aigles, symboles du soleil, lui
dévoraient le foie, qui renaissait selon les phases de la lune. Le géant est
donc assimilé à la lune. Mais nous allons retrouver notre déesse sous la forme des
armoiries corses.
De
Parthenopis (ou Artémis ou Diana
) à la Vierge noire et à la tête de maure
La tête de maure, en héraldique, se rencontre
assez fréquemment : en Irlande (familles O’Conry, Conroy, etc. au XVIe
siècle), en Normandie , en Italie,
en Allemagne(en particulier en Bavière), en Espagne où le roi d‘Aragon
avait un sceau à 4 têtes de maure qu’il a légué à la Sardaigne et à la ville de
Cagliari.
Origine celtique du Maure de Freising la
vierge noire de Chartres.
Le pape Benoît XVI, originaire d’Allemagne,
archevêque de Freising et de Munich en Bavière a tout naturellement pris pour blason pontifical la tête de maure
de Freising au naturel (couleur brune)
dont les lèvres, la couronne et le collier sont rouges: c’est l’antique emblème
de l’archevêché de Freising, emblème attesté au VIIIe siècle. A
l’origine de cet emblème le premier évêque de Freising, saint Corbinien, né à
Chartres vers 680 et mort le 8 septembre 730, qui a introduit en Bavière la
vierge noire des Carnutes, encore adorée aujourd’hui à Chartres. Première constatation: il s’agit d’une femme . Deuxième source
d’étonnement : le bandeau blanc corse (le « tortil argent » des
héraldistes) se révèle être un diadème royal de couleur rouge flamme, la pourpre, la couleur, on le verra, du soleil levant ; la mauresque porte aussi
un collier de pierres précieuses et des boucles d’oreille de perle sur ces
oreilles percées. Il s’agit bien évidemment d’une reine : « je suis noire,
et pourtant je suis belle » , comme dit la Bien-Aimée ( est-ce
Isis?) du Cantique des cantiques. Il s’agit ici indiscutablement de la représentation héraldique d‘une vierge
noire.
Or les vierges noires (L’énigme des
vierges noires, par J. Huynen) sont
d’origine grecque. Elles sont des avatars de la déesse Oupis , de la vierge noire d’Ephèse,
Parthenopis , qui était liée au culte héllène du soleil levant et des déesses- terre de couleur noire fécondées par le Soleil: « A
Ephèse, écrit J. Huynen, dans le Temple
de Diane (Artémis), l’une des sept merveilles du monde, on vénérait une statue
noire de la Grande Déesse, sœur de l’Apollon solaire, et il est frappant de
relever que c’est à Ephèse que la Vierge Marie aurait vécu après la mort du
Christ et qu’une tradition y place son Assomption, le lieu même de celle-ci
étant appelé en turc karatchlti, c’est- à- dire exactement « la
pierre noire » , noire parce que brûlée par le soleil-dieu.
La maison de la Vierge Marie à Ephèse
(Turquie aujourd’hui) attire encore les pèlerins : on l’appelle Panaya Kapulu, la
Maison de la Vierge , et on doit sa découverte à une vision de Catherine
Emmerish, morte en 1824 . Elle en avait donné le signalement exact et sa vision
correspondait à une réalité qu’elle ne pouvait connaître. Marie-Madeleine
également est morte à Ephèse, selon la tradition. C’est dans cette ville qu’eut
lieu enfin le concile qui, en 431, proclama le dogme de Marie mère de Dieu. On
mesure la force du lien entre le culte marial et Ephèse.
Citons d’autres exemples de cette couleur
noire étrangement associée au culte du soleil. D’après E. Saillens (Nos
Vierges noires, 1945), la plus ancienne idole du Hedjaz était une pierre
noire, volcanique et météorique, dite la Kaaba : à la Mecque, la pierre
noire a cette couleur parce qu’elle a été brûlée par le feu du soleil .
.Dans Philostrate, La vie d’Apollonios de
Tyane, nous avons un récit par un témoin oculaire , vers 62, du lien entre le culte du soleil levant et la
pierre noire du colosse de Memnon à Thèbes en Egypte (VI, 4, p.1214, Romans
grecs et latins, la Pléiade)): « La statue est tournée vers le
levant : c’est celle d’un jeune homme qui n’a pas encore de barbe; elle
est faite de pierre noire, ses deux pieds sont réunis comme dans le style
des statues dédaliques (archaïques, comme celles des Cyclades), ses bras, tout
droits, s’appuient sur le siège, car il est représenté au moment où il est en
train de se lever (comme le soleil)…. Lorsque les rayons du soleil frappèrent
la statue, ce qui arrivait au moment du lever de l’astre, les spectateurs ne
purent maîtriser leur admiration, car la statue se mit à parler dès l’instant
où le soleil effleura sa bouche, les yeux se mirent à briller et s’animèrent à
la lumière, comme ceux des hommes qui aiment le soleil; ils comprirent alors
que la statue est représentée dans l’acte de se lever, comme le font ceux qui
adorent debout les puissances divines. Après avoir offert un sacrifice au
Soleil Ethiopien et à Memnon de l’Aurore (les prêtres leur expliquèrent qu’ils
devaient le faire, ajoutant que le nom du premier, éthiopien, venait des mots
grecs aithi, voulant dire » brûler » , et ops, voulant dire «
réchauffer ») … » Cf. le nom
d’Opis et le nom latin et allemand de la
tête de maure : caput æthiopicum, tête éthiopienne, brûlée par le
soleil. L’épithète éthiopien est une épithète rituelle et non géographique. Il s’agit d’une statue animée dite dédalique,
d’un automate comme ceux dont parle Platon, Ménon, 97, 2 .
L’érudit Callimaque appelle la déesse
d’Ephèse du nom d’Oupis ( Hymne à
Artémis, 3, 204) et ce nom d’Oupis est celui sous lequel la Terre- Mère
s’est d’abord installée à Ephèse. Or, elle y était représentée, nous l’avons
dit, par une statue de vierge (Parthénos) noire. Les Phocéens,
voisins d’Ephèse, ont introduit en Corse et notamment à Aléria le culte de la
Vierge noire.
C’est d’ailleurs à Aléria que la légende
corse situe l’enlèvement d’une jeune fille appelée, comme par hasard, Diana , par un Maure, Mansour, venu d’Espagne : son fiancé , Paolo, part à sa recherche et coupe la tête du
Maure, dont le bandeau était rouge (on retrouve le souvenir de la vraie
couleur originelle de la couronne solaire),
la présentant sur un drap blanc : ce serait l’explication populaire du
drapeau corse.
Les historiens font remarquer que la 1ère
apparition certaine de ce blason en Corse date de 1736 avec le roi de Corse
allemand Théodore de Neuhoff, qui peut très bien avoir été inspiré par des
armes comparables vues en Allemagne (il conserve la couronne royale et les bijoux) et avoir pris ces armes à
titre personnel. En effet, c’est à la Vierge Marie que Paoli avait voué la Corse, le 30 janvier
1735, devant la consulte de Corte:
« Nous élisons
pour la protection de notre patrie et de tout le royaume l’Immaculée Conception Vierge Marie et nous décrétons de plus que toutes les armes et drapeaux de notre dit
royaume soient empreints de l’image de l’Immaculée Conception, que la
veille et le jour de sa fête soient célébrées dans tout le royaume avec la plus
parfaite dévotion et les démonstrations de foi les plus grandes ».
En 1745, Gaffori reprend en le modifiant le
blason de Théodore sur le drapeau de son armée : est-ce que les vieilles
traditions vezzanaises et alérianes ont joué un rôle dans son choix? C’est très
vraisemblable. En tout cas, son choix est officialisé par Paoli et , le 24 novembre 1762, soit 27 années après
avoir consacré la Corse à la Vierge, il
semble changer d’avis et consacre
la Corse cette fois-ci à la Vierge noire ;
il reprend le blason du précédent roi et surtout de Gaffori, transforme le diadème royal qui n’avait plus
lieu d’être en bandeau blanc à l‘italienne et non plus pourpre comme en
Allemagne et à l‘origine (la couleur du soleil levant), mais il garde un aspect
féminin à la tête de maure: à ses yeux
, il s’agissait sans doute, non de la tête coupée d’un sarrasin à brandir comme
une tête de Méduse, mais d’une des trois Marie qui avaient débarqué,
assurait-on, aux Saintes- Marie -de- la-
Mer , très honorées en Corse, Marie
l’Egyptienne , la Mauresque confondue avec la sainte Sara des
Tziganes et surtout avec Marie-Madeleine, son teint basané s‘expliquant
par son origine. Le blanc du nouveau blason reprendrait l’ancienne Immaculée
Conception.
Le pallium (manteau) ou plutôt l’omophorion (du grec omos, épaule,
et phoreo, porter, cape qu’on jette sur l’épaule) en laine blanche d’agneau ou
l’origine chrétienne du bandeau blanc corse.
Le tortil qui orne la tête de maure corse est
, selon la définition du Larousse, un « bourrelet en torsade à bouts
pendants par derrière, qui ceint une tête de maure ». On peut penser que
le tortil de la tête de maure a succédé au tortil au sens également attesté par
le Larousse : « cercle d’or gemmé, rebordé plus fortement en haut qu’en
bas et autour duquel est passé en spirale un collier de perles: c’est la
couronne des barons », autrement dit à la couronne solaire dont les
pointes symbolisent les rayons du soleil, pointes dorées qui sont parfois
remplacées par des cornes de mouton;.Pour les légendes corses, le bandeau du
maure était l’indice d’un grade. Or, dans le blason du pape, nous avons un
pallium blanc, insigne liturgique typique du souverain Pontife, selon Mgr
Andrea Cordero Lanza di Montezomolo, nonce apostolique, qui indique sa charge
de pasteur du troupeau qui lui a été confiée par le Christ : « « au
cours des premiers siècles, les papes utilisaient une véritable peau d’agneau
posée sur l’épaule » : c’est le pallium ou plus exactement l’omophorion
utilisé aujourd’hui encore par les patriarches orientaux. « Puis
apparut l’usage d’un ruban de laine blanche, tissée en pure laine d’agneaux
élevés dans cette intention. Le ruban portait plusieurs croix, qui lors des
premiers siècles étaient noires ou parfois rouges. Au IVe siècle le
pallium était déjà un insigne liturgique
spécifique et typique du pape. L’usage que le pape confère le pallium aux
archevêques métropolitains commença au
VI1e siècle. » Le tortil blanc du blason corse est donc un symbole de juridiction épiscopale, l‘agneau signifiant le Christ, et
ses représentants sur terre , du chef de la religion aux évêques. Quant aux
nœuds à l’arrière de la tête de maure corse ou au-dessous de l‘écu de Benoît
XVI, il ne s’agit pas de quelque frivole catogan, mais du reste de l’offendix
ou offendimentum du souverain pontife des Romains, souvenir indo- europén
qu’on retrouve sur les bustes de Bouddha en Inde et qui consiste dans les nœuds
qui attachent les brides du bonnet pontifical ou tiare appelée en latin
apex.
L’origine païenne du tortil corse : l’Agneau
aux cornes d’or.
La déesse Oupis et son héritière Artémis
agréaient les offrandes d’agneaux blancs et on se souvient de la colère
d’Artémis lorsqu’ Atrée hésita à lui sacrifier le plus bel agneau de son
troupeau aux cornes d’or évoquant le soleil. L’ épithète rituelle, Karneïos
(même racine que corne ou le nom de la peuplade gauloise près de
Chartres, les Carnutes ou la divinité gauloise Cernunnus) ,
appliquée à son frère Apollon , indique cette référence à l’agneau blanc (Karnos
attesté par Hésychius au sens de mouton).
D’après le folklore, l ’agneau naît noir au
solstice d’hiver, puis devient de plus en plus blanc jusqu’à devenir immaculé
au 15 août et alors l’Agneau pur. C’est le symbole du Soleil levant, il a y a
un « aspect solaire viril et lumineux de l’agneau ».
En résumé, le tortil, qu’il soit rouge ou blanc, a originellement fait référence au Soleil, sous la forme de la pourpre royale du Soleil levant ou sous
celle d’un Agneau immaculé renvoyant à
la Vierge, qu’elle soit blanche ou noire et brûlée alors par la puissance des
radiations solaires lors de son Assomption surnaturelle.
Les 4 têtes de maure du roi d’Aragon et par
suite de la Sardaigne et de sa capitale Cagliari s’expliquent par une
allégorisation des trois Marie (Marie- Madeleine, Marie - Salomé, Marie, mère
de Jacques) et de la Vierge. La Vierge noire est, comme pour Aléria et comme
pour Cagliari en Sardaigne, on le verra, d’origine grecque : en effet, les
Phocéens avaient fondé une colonie à Emporiai, dans la Tarraconaise,
aujourd’hui Ampurias, et de plus 3
autres vierges noires existaient en Aragon : celle de Valence, celle de la
capitale du royaume Sarragosse, la plus célèbre enfin grâce à Richard Wagner,
celle de l’abbaye de Montserrat près de Barcelone appelée la Morenata, la
mauresque (de la Maurétanie, maure du grec amauros, brun, tania le pays Cf.
Aquitania). Quant à Cagliari et à la
Sardaigne, Diodore de Sicile (V, 13, 3) nous apprend que les Phocéens avaient
fondé une ville appelée Calaris, qu’il situe par erreur en Corse. Florus nomme
Carala (II, 2), d’autres Caralis . En grec, Hésychius atteste le vocable phalos
pour signifier blanc en phocéen, donc Phalaris qui a donné Cagliari signifie la
lumineuse, la ville vouée à la lumière solaire et nous renvoie à la Vierge
noire. Les statue devaient être en bois, car Hérodote (I, 165) nous dit que les
Phocéens, devant la menace des armées de Cyrus,
« ne pouvant souffrir l’esclavage, lancèrent leurs navires en mer,
y mirent leurs femmes, leurs enfants et leur mobilier, ainsi que les statues et
les ex-voto qui se trouvaient dans leurs
temples, excepté les tableaux et les statues de bronze ou de pierre ».
Le pape Pie VII Barnaba Gregorio Chiaramonti
(1800-1823) , né à Césène, avait dans son blason pontifical 3 têtes de maure,
donc une allusion à la Trinité et aux 3 Maries(Marie, la mère du Christ, Marie-
Salomé, Marie- Madeleine) .La Vierge noire
dont il s’inspire pour son blason peut être celle de Loreto, d‘origine
celtique comme celle de Offaly en Irlande, laquelle a inspiré les armes de la
famille O‘Conry.
Le pallium de cette dernière famille
irlandaise peut être rattaché à l’archevêque de Tuam, Florence O’Conroy ou
O’Conry (1561-1629) qui a composé un traité théologique important en gaëlique
et a anglicisé son nom irlandais signifiant d’origine royale, savoir O’Maolconaire.
Le pallium (ou omphorion) souvent confondu
avec le tortil blanc dont il a pris la suite signifie donc toujours en ce cas
une dépendance épiscopale : évêque d’Aléria pour la Corse, évêque de Freising,
évêque de Tuam pour la famille irlandaise. En revanche, pour l’Aragon et pour
la Sardaigne, le bandeau blanc est exclusivement un tortil et non un pallium,
semble-t-il.
Le lièvre de Vezzani.
Autre trace hellénique: le refus des Vezzanais, à date
ancienne, de consommer du lièvre. Les Grecs d’Asie mineure, selon Aristote,
apprivoisaient les lièvres qui étaient leurs animaux de compagnie et sacrés en
même temps, l'équivalent des belettes à l'époque romaines, celles-ci étant
relayées ensuite par les chats.
Nous allons maintenant examiner les habitats successifs de la
famille Griscelli.
1°LA COLONIE PHOCEENNE (VIIe siècle avant J. C. )
: ALALIA.
Phocée d’Ionie en Asie mineure
(aujourd’hui Foki en Turquie) multiplie colonies et comptoirs, de 600 à
545 avant J.-C., jusque dans l’Occident le plus lointain, même au-delà des
Colonnes d’Hercule (le détroit de Gibraltar), dans l’Océan Atlantique avec Tartessos:
ils colonisent ainsi l’Etrurie (Ischia, Parthénopée ou Naples),
la Sardaigne , la Corse, la côte ligure (Nikaia ou Nice,Agatha Tuché
ou Agde, Massalia ou Marseille) et ibérique (Emporion),
l’Andalousie :Mainaké, etc. Mais, lorsque Cyrus, le Grand Roi des
Perses, eut vaincu le roi de Lydie Crésus, en 545, les Phocéens (Fogliani en
corse) durent fuir devant l’avancée de leurs voisins perses et se replier sur Alalia
qu’ils avaient fondée en Corse (l’Alalié d’Hérodote), puis,
battus en 564 par une coalition navale
des Carthaginois et des Etrusques au large d‘Alalia, ils se concentrent
sur Marseille.
Donnons la parole à Sénèque, exilé par
Méssaline sur la côte orientale de Corse, peut- être à l’emplacement très
incertain d’ une de ces tours dites de Sénèque, pour adultère, de 41 à 48 avant
J. C., dans sa Consolation à sa mère Helvia, écrite en Corse au cours de
ces sept années: «Le changement de lieu est si peu un mal que l’on s’est
expatrié même pour venir en ce pays -
ci.[… ]. J’ajouterai un seul exemple que j’ai sous les yeux. L’île où je
suis a déjà changé plusieurs fois d’habitants. Sans parler de ces anciennes
peuplades, dont le temps a effacé le souvenir, les Grecs fixés aujourd’hui à
Marseille, après avoir quitté Phocée, commencèrent par s’établir dans cette
île. Quel motif les en chassa? Fut-ce la rigueur du climat, ou la crainte de la
puissance des Italiens, ou le désavantage d’une mer privée de port?On n’en sait
rien: ce ne fut sûrement pas la férocité des naturels, parce qu’ils passèrent
dans la partie de la Gaule, qui pour lors était la plus sauvage et la plus
barbare. La Corse fut ensuite possédée successivement par les Liguriens et par
une colonie d’Espagnols; la conformité
des usages ne permet pas d’en douter: on retrouve ici les ornements de tête et
les chaussures des Cantabres d’aujourd’hui, et quelques mots de leur langue, vu
que le commerce des Grecs et des Liguriens a entièrement dénaturé le langage
primitif. Ensuite, deux colonies de citoyens romains y furent envoyées, l’une
par Marius, l’autre par Sylla. Combien de fois une roche aride et escarpée a-
t- elle vu renouveler ses habitants !»
Pour revenir à la ville fondée par les Phocéens, ALALIA, Alalia , son nom vient du grec,
du crétois abelios, soleil ou plutôt abeleia, la ville
dédiée au culte du dieu soleil. C’est le même radical qu’on retrouve dans des
noms de peuples : Hellènes, Alains ou dans lr nom de ville Adria (de Aleria); *Abeleia a évolué en alelia, puis en Alesia et Aléria
en raison de l’attraction exercée par le
fait que toutes les Alixia ou Alesia gauloises ont été latinisées
en Aléria.
Avec
qui se mêlèrent ces nouveaux arrivants ?
1° Avec leurs prédécesseurs
indigènes, les Libyens, ces grands constructeurs de ces mégalithes si
méconnus de la Corse. Ils avaient déjà peuplé la Sardaigne et étaient divisés
en trois tribus. Ils étaient apparentés
aux Cantabres d’Espagne, nous dit Sénèque dans sa Consolation à sa mère Helvia , par leurs mœurs (rite de la couvade qui
engendrera la réputation de paresse des Corses, mise à mort, par derrière et
par leurs propres fils, de leurs vieux pères avec un rire rituel, qui sera
qualifié plus tard de sardonique, anthropophagie), par leurs chaussures, par
leur chapeau et surtout par leur langue. Or, Sénèque était né en Espagne, à Cordoue, d’un père qui était
lui -même né en Espagne. Le grand
philosophe est un témoin oculaire, et pas n’importe lequel. La langue des
Corses indigènes n’était pas
indo-européenne, elle était proche du basque
pour simplifier, du méditerranéen des linguistes. Ils seraient venus à
date préhistorique de Libye . Les noms de lieux qui en relèvent ont été par le
prince Louis- Lucien Bonaparte qui, ayant séjourné en pays basque, a rapproché
toponymes basques et corses (par exemple,
Ghisoni ou Ghisonaccia, où le radical ghi- signifie
la pierre).On ne connaît pas leurs noms.
Peut-être s’appelaient-ils eux-mêmes les Laistrygons (Ostriconi
aujourd’hui) dont Homére nous a conservé le nom dans un passage de l’Odyssée.
2° Avec des envahisseurs qui
les avaient précédé de quatre siècles environ, tant en Italie qu’en Sardaigne
et en Corse, les Etrusques, venus
de Lydie en Asie mineure après la chute de Troie en 1183 avant J.-C., quatre siècles avant eux et en plusieurs
vagues dont la première était commandée par Enée .Ce dernier donne peut-être à
la Sardaigne son plus ancien nom attesté, l’Enéenne : Iéhnooussa, l‘île
du bronze(aenos en grec). Les Etrusques sont divisés en trois tribus : les balaroi
(exilés ou fuyards cf. le nom des Baléares et celui de la Balagne),
les ilésiens et les corses. Les
Sardes en Corse ont laissé leur nom à Sartène ( Sardinia, la colonie
sarde). La mythologie a depuis longtemps remarqué l’identité de nom
entre la Sardes de Lydie en Asie mineure et l’île voisine de la Corse. Ce nom
de Sardaigne est, lui aussi, étrusque et signifie la guerrière, la
combattante. Sarde est le même mot que Parthe et on le rapproche du
sanskrit ksathrya, guerrier. On
sait aujourd’hui, depuis le déchiffrement d’une inscription lydienne, que
l’étrusque est une langue indo européenne de la branche des Grecs, des
Arméniens et des Illyriens ou Albanais :
les Troyens en sont les plus illustres représentants. Le nom des nuraghi sardes
est à mettre en relation avec le nom de la citadelle de Troie, Pergame ,
et avec le nom grec des tours, purgos : le nom latin, turris, est
aussi étrusque, de tursis, attesté en grec et signifiant citadelle. A
remarquer que Phocéens et Etrusques viennent de lieux fort voisins d’Asie
mineure et qu’ils vivaient tous dans un régime matriarcal.
Les Phocéens appelaient leur île Tursenos devenu
Turrhenos puis Turnos, enfin Kurnos, notre Cyrnos.
L’ancienne forme de ce nom nous est conservée par Philostrate, La vie
d’Apollonios de Tyane (V, 11, p. 1183 dans la traduction de Pierre Grimal
parue dans la Pléiade) : au cours de ses voyages , Apollonios raconte dans des
écrits rédigés en grec de Cappadoce proche du phocéen et traduits par l’Athénien Philostrate comment
il quitte l’Espagne pour la Sicile vers 62 de notre ère, passant par la Libye
et par la Tyrrhénie, le pays des Tyrrhéniens. P. Grimal commente (p.1519) :
« Le pays des Tyrrhéniens étant l’Etrurie (Italie centrale), cet
itinéraire est étrange. » C’est
la Corse qui, en réalité, est
évoquée comme le pays des Tyrrhéniens ,
sous le nom libyen des corses. Platon dans le Timée évoque aussi la Corse sous son nom grec de
Tyrrhénie , antérieur à Cyrnos, nom
moderne et phocéen de la Corse , dont Platon nous révèle qu’elle était une
colonie de l’Atlantide .Le nom des habitants de l’île est en latin Corsicus ,
différent à l’origine des Corsi, l’une de 3 classes des Etrusques de
l’île, ce qui donne Corsica (insula), la Corse. Corsicus est à
rapprocher du grec Turrhenikos, de Tursenikos. Le T est devenu K
pareillement.
Que voulait dire ce nom propre? Peut-être
(l’île) qui a des citadelles préhistoriques, qui a des fortifications, latin turris, grec tursis, tour.Les Etrusques doivent leur nom à ces
mêmes fortifications.
Les Etrusques ont fondé, vers 564 avant J.-C., après une victoire navale remportée au large d’Alalia contre les
Phocéens, avec pour alliés les Carthaginois, une ville appelée Nikaia ou Enikoniai,
la Victorieuse, sur la côte, au nord d’Alalia,
dont une colonie deviendra Venaco. La même racine indo-européenne
signifiant combattre *vic avec une nasale préfixée ou infixée et qu’on
retrouve dans le latin vincere et le grec nikaia donnant Nice
ou Nicée a donné, à partir de
l’étrusque *Veniconiai,
Venaco, nom de la colonie
originelle côtière transféré , comme souvent,
à une bourgade de l’intérieur et des montagnes , tandis que la
traduction grecque Nikaia nous laissait le nom d’une montagne située
entre le Fiumalto et la Casaluna, le mont Nigéuno, plus près de
l’établissement initial (voir, dans Archivio storico di Corsica,
juillet-septembre 1939, an XIV, n° 2, et sqq , p.161-191 et p.331-393, l’artcle
de Mario C. Ascari intitulé «
La Corsica nella carte geografiche di Tolomeo » , notamment
n°3, p. 372) .
3°Avec les Ligures, signalés par
Sénèque, alors qu‘il ne mentionne pas les Etrusques sous leur propre nom, mais
les Ligures sont un peuple gaulois très tôt métissé avec leurs voisins
étrusques et qui a pu venir en même temps qu’eux ou après eux.
Comme l’écrivait Sénèque il y a 2000ans,
« vous trouverez à peine une seule terre cultivée par des indigènes.
Toutes les nations sont mélangées et, pour ainsi dire, entées les unes sur les
autres; elles se succèdent; un peuple désire ce qu’un autre dédaigne; celui-ci
est chassé du pays d’où il avait chassé ses prédécesseurs. Le Destin n’a pas
voulu que la fortune des choses humaines fût jamais fixée ».
Les aléas de l’histoire refoulèrent les
rescapés phocéens dans l’intérieur des terres au cours du temps.
2° ANTISANTI.
Les
Phocéens d’ Alalia ont très tôt fondé des colonies dans l’intérieur:
d’*ALALIA-NA (la petite *Alalia) on est passé à *ALISANA et à *ANISANA
qui a donné Antisanti, .La tradition a gardé le souvenir de l'époque où
Antisanti n'avait pas ces deux T actuels
et s'appelait *Anisana. Elle
raconte comment son curé, outré de n'avoir personne dans son église, dit
à ses ouailles récalcitrantes qu'elles pouvaient être « contre les saints » (Antisanti),
pourvu qu'elles aillent à la messe. C'est une tentative populaire d'explication
d'une évolution phonétique historique tout à fait réelle. Citons une autre
colonie phocéenne, Figari, dont le nom , attesté par Ptolémée dans son Traité
de Géographie du IIe siècle après J.-C.,
est Physari,Fusari du grec PHYSARIA, Fusaria, petits soufflets, à cause de la ressemblance des
polissoirs préhistoriques avec leurs impressionnantes rainures à des soufflets.
Le nom complet était le soufflet qu’on n’entend pas, physaria anakousta, fusaria
anakosta qui a donné la Syracuse de Sicile et le golfe de Syracuse de Corse attesté
par Diodore de Sicile : « Cyrnos a le plus beau port qui soit, nommé Syrakosion
Surakosion » , peut-être Porto Vecchio aujourd‘hui.
3° PIETROBIANCA OU
PIETROBIANCALE .
J. F. Griscelli écrit Pietro-Bionchi (p. 13 de ses Mémoires,
édition bruxelloise).Rectifions à ce propos une petite erreur du marquis
Adriano Colocci dans sa biographie de J. F. Griscelli (p. 67)qui se demande
s‘il ne s’agit pas de Pietralba, près de Bastia , alors qu’il
s’agit d’un lieu-dit entre Antisanti
et Vezzani. Le nom ne veut pas dire « pierre blanche » (on
n’en voit d’ailleurs aucune sur place), mais il vient du grec
«* PETROPHALANX », petrofalagx, qui veut dire « multitude de cailloux ».
4° VEZZANI .
« Je suis né
à Vezzani, petit village situé entre les montagnes de Tanno et de
Cali »:telle est la première phrase des Mémoires de
J. F. Griscelli, Cali signifiant en grec la belleμ Καλ’η (cf. Kallisté, Καλλιστ’η l’Ile de beauté)et
Tanno, de Tana ταναiοζ , la montagne de forme élancée. Vezzani est un nom
étrusqueVolsen, lié aux mines de cuivre.
Il existe d’autres noms étrusques en Corse. Saint Grégoire
(Lettres I, 77), en 591, cite l’évêque
de Tartessa (la forme varie malheureusement selon les manuscrits:Tainatis,
Tainatensis, Tanitana, Tainates, Tainate,
Taina), après la destruction d’Aléria vers 552 après J. C. par les
Goths de Totila. L’évêque d’Aléria , détruite par ces Goths, a transféré son diocèse à TARTES SOS , aujourd’hui Carghese.
Passons à la généalogie
particulière. L’ancêtre commun de tous les Griscelli semble être Paul- Mathieu
qui, lors du recensement de 1770, a 70 ans, comme son épouse Julie- Françoise
.Ils ont, en 1770, 5 fils vivants.
Paul Griscelli
Ancien élève de l’ Ecole
normale supérieure
Agrégé des lettres classiques
Docteur en littérature
française
ESSAI DE GENEALOGIE DES CINQ
BRANCHES DE LA FAMILLE GRISCELLI
ETABLIE PAR MADAME FRANCOISE
GRISCELLI A ACTUALISER ET A COMPLETER.
Nous allons traiter sommairement les cinq
branches, par ordre de primogéniture, issues de l’ancêtre commun à tous les Griscelli , attesté en 1770
lors du recensement, PAUL-MATHIEU et sa femme JULIE-FRANCOISE, tous les deux
étant nés vers 1700. Les mariages consanguins, entre cousins notamment,
expliquent la légende intéressée d'une origine multiple, alors que les
Griscelli remontent tous au même ancêtre, mais il fallait bien obtenir les dispenses du curé.
I° LA BRANCHE AINEE ISSUE DE
JEAN-PIERRE ET DE JEROMINE.
Elle comprend notamment
Jacques- François Griscelli, le baron de Rimini et l’auteur des Mémoires,
les Griscelli d’Antisanti, la dentiste et la pharmacienne de Venaco.
II° LA BRANCHE PUINEE ISSUE
DE FRANCOIS-ANTOINE.
Elle comprend au moins 4
rameaux:
l’un issu de Mathieu comprenant le professeur de médecine
Claude Griscelli, la famille Griscelli d’Alesani (médecins à Paris);
un autre issu de Henri (Arrigho): les Griscelli de
Bonifacio;
un 3e issu de Ange Joseph, qui donne les
Griscelli de Sète;
un 4e enfin comprenant le maçon Mathieu Griscelli
de Vezzani, la famille du percepteur de Bellegarde, les pharmaciennes d’Ajaccio
et le mari de l’auteur de ces lignes,
petit-fils du maréchal-ferrant d’Ajaccio, ulmien, agrégé des lettres
classiques et docteur en littérature française.
III° LA 3e BRANCHE
ISSUE DE SYLVESTRE-MATHIEU.
Elle comprend la famille de
Jacques Griscelli, ancien conseiller économique et social, celle de Jean
Sylvestre à Ajaccio (le maître des écoles François Griscelli), Madame François,
adjointe au maire actuel de Vezzani, un alpiniste estimé, enfin Marie- Hélène Ferrandini, ulmienne,
agrégée des lettres classiques, docteur en littérature française et maître de
conférences à l’Université de Corte.
IV LA 4e BRANCHE
ISSUE DE PIERRE-TOUSSAINT.
Elle comprend la famille du
maire précédent.
V LA 5e BRANCHE
ISSUE DE PAUL-FRANCOIS.
Nous ne connaissons pas ses
actuels descendants si elle en a, mais nous aurons à la citer au cours de cet
essai (mariage avec d'autres branches ou « familles »).
Il y a
beaucoup de Griscelli que nous ne savons pas rattacher de façon précise, en
particulier ceux 1 de Saint-Jean près de Toulouse, Haute Garonne), 2 ceux de
Bordeaux, 3 ceux de Vaux-en- Velin (branche
lyonnaise avec un médecin ? ), et 4
François Griscelli, membre du RAID et commandant du GIPN, auteur d’un
livre François Griscelli, interventions du RAID à la police judiciaire,
en poste à Nouméa , en collaboration avec le journaliste Antoine Albertini, mais
dont je respecte le désir prudent de ne pas être identifié,
I LA BRANCHE AINEE
L’ancêtre est Jean-Pierre né
en 1720, marié à Jéromine, née en 1722, qui a 6 garçons et 1 fille, tous
présents au recensement de 1770.
Le signe ° signifie né.
Antonia° 1745
Pierre°1751
François°1754
Antoine°1758
Joseph°1765
Antoine Jacques°1766
François Félix°1769
François, né en 1754, marié le 26-6-1776 avec Donia
Palavicini, fille de Ange Paul d’où 6
enfants:
1 Ange Pierre °30-6-1777
2Marie °5-09-1778
3Ange Paul °28-11-1784
4 Pierre Antoine°5-03-1787
5Pierre-Toussaint, °vers
1795, curé d’Altiani, mort à 84
ans le 17-02-1879.
6Antoine-Louis,°le
12-11-1807, mort le3-11-1876à l’àge de 70 ans au domicile de ses parents, curé
de Moïta : c’est à lui que fait
allusion le baron dans ses Mémoires.
4 Pierre
Antoine°5-03-1787 , x 27-9-1867 à 80 ans(x= décès).Premier mariage
avec Julie Françoise Baldovini, d’où 2 garçons:
1 Jacques -François°15-2-1811
, futur baron de Rimini
2Ange Paul°1814
2e mariage le 20-6-1830 avec Dona-Alice Milleli d’où Donia Maria
°29-6-1832, mariée le 27-12-1857 avec Xavier Marchioni
1Jacques-François °15-2-1811, mort à Marseille le 13
mars 1905 à 94 ans, baron de Rimini:
1er mariage le 12-2-1829 à 18 ans avec Jeanne-Marie Griscelli
x2-11-1838 . Jeanne-Marie est la fille de Noël Griscelli (fils de Joseph
Mathieu et d’Angela Jeanne Baldovini, 3e branche) et de Maria
Vicensini, elle a 17 ans au moment du mariage: d’où 2 enfants:
1 Jacques Jean°24-1-1829,
marié le 1-11-1848 avec Angélique Françoise Baldovini;
2 Joseph Mathieu, °8-9-1832,
décédé la même année.
2e mariage le 31-12-1838 , un mois après la mort de sa
femme, avec Julie Béchard;
3e mariage avec Louise Meunier à Lyon annulé « pour
bigamie »dont 2 enfants:
une fille. L’impératrice
Eugénie la place à ses frais, jusqu’à 18 ans, au Couvent d’Ivry, en
remerciement pour le rôle joué par son père dans l’affaire Kelch, au début du
règne. Elle se rendra à Vezzani visiter le village de son père, mais, mal
accueillie, repartira;
un garçon, né
alors que son père était en prison « pour bigamie » et
dont la naissance coûte la vie à sa mère. Il est élevé à Lyon par son grand-
père le capitaine Meunier, mais, lorsque celui-ci meurt du choléra, il émigre
en Suisse à Lucene où il devient employé de librairie. Il fait de la politique
en faveur de l’unité italienne :à l’occasion d’une manifestation contre le
comte de Chambord à Lucerne, le « jeune blondin » manque d’être tué
par son père qui ne le connaît pas.c’est dans ces circonstances mélodramatiques
qu’il rencontre pour la première fois son pére:M. de Vezzani, baron de Rimini.
4e
« union » avec une Belge,
Jeannette Catherine Duquesne dont un fils, celui de La Légende des
siècles ( Guerre civile ).
5e mariage avec une petite
cousine vezzanaise, Marie Vincensini
.
D’autres enfants du baron sont nés sur
le continent:ils portent le patronyme de Vezzani ( mais voir aussi
branche III pour d’autres Vezzani).
Le grand amour de cet homme à femmes a été pour la comtesse
de Gardonne, sur la tombe de laquelle
ira se recueillir à Saint- Petersbourg .Il s’y agenouille et pleure
longuement.
2Ange Paul, frère cadet du baron, né en 1814, x
26-08-1835 avec Marie Véronique Baldovini, d’où 4 enfants:
1 César Pompée °23-08-1841, x le 4-11-1872 à Françoise
Griscelli (fille de Paul Mathieu Griscelli et de Marie Vincensini) d’où Paul
Mathieu, d’où 2 enfants:
1Françoise °30-05°1914,
pharmacienne à Venaco.
2Jeanne °6-12-1916, dentiste,
à Venaco.
2 Pierre Toussaint °15-07--1847, x Donia Maria Vincensini le
30-04-1881 d’où Marie Laetitia Griscelli, d’où les Griscelli d’Antisanti à
Pietrobianca
3 Pascal°1854,x le 9-11-1884 avec Isabelle Baldovini
4 Jacques François °2-08-1857 x le 30-10-1888 avec Pauline
Cristofari, dite Eugénie, mère de Xavière Griscelli, laquelle épousera
Parthenopée Griscelli (3e branche).
II LA BRANCHE PUINEE ISSUE DE
FRANCOIS-ANTOINE.
Francois-Antoine, ° en 1724,
marié à Paola, d’où 1 fille Rozanna et 4 garçons: Mathieu, Arrigo (Henri), Ange Joseph, Antoine.
I Mathieu °1756, x le 21-06-1884 avec Jéromine
Milelli, d’où François Mathieu°13-12-1889, x Marie Faustine Vincensini, d’où 1
et 2.
1) Joseph Mathieu°18-10-1817,
marié le 20-09-1841 avec Marie Davinia (Lavinia) Griscelli (fille de Jules
Michel Griscelli et de Marie Françoise Bonelli, petite- fille d’Arrigo
Griscelli et de Marie Davinia Vincensini), d’où Jules Michel x le 18-06-1864
marié avec Anne Marie Vincensini, ingénieur- géomètre à Casablanca au Maroc,
d’où le père (né à Tunis) du professeur de pédiatrie Claude Griscelli (°1936)
résidant à Cervione, élève du professeur
et hématologue Jean Bernard et de Robert Debré, président de l’Université de
Corté, élu conseiller de la Ville de de
Paris, avec deux enfants, l’un professeur de médecine également,
l’autre professeur de pharmacologie.
2Ange Joseph °2-10-1834, x le
27-11-1860 à Nonce Marie Bianconi, d’où les Griscelli d’Alesani (avec des
filles qui sont médecins à Paris).
II Arrigo (Henri) ° en 1758, x avec Maria Davinia
(Baldavinia) Vicensini, d’où Jules Michel, °15-04-1791, x le 17-09-1820 avec
Marie Catherine Luciani, d’où Jules Michel, °5-07- 1831, x le 25-04-1881 avec
Angèle Félicité Bernardi, d’où Jean- Baptiste °30-05-1890 qui donne les Griscelli
de Bonifacio.
III Ange Joseph, né en 1764, marié à Rochetta
Pettorelli, maire de Vezzani, médecin, qui donne les Griscelli
de Sète (Joseph Olive).
IV Antoine °1770, décédé le 17-10-1856, maré à
Catharina Battesti en 1789, d’où 2 fils et 1 fille:
1Antoine François, x Marion
Fabiani;
2Maria Paola, x le 8-07-1821
avec Xavier Baldovini;
3Mathieu, né le 15-02-1804,
marié le 8-03-1837 à Pauline Catherine Marchioni, d’où 3 fils et 1 fille
Rozanna:
1
Jean Pierre °29-11-1839, d'où Jean-Pierre percepteur à Bellegarde (Ain) et
Ange-Joseph,marié à France, d'où aujourd'hui Mathieu Griscelli , maçon à Vezzani et
son frère Alexis.
2François-Antoine °25-03-1841, marié à
Claire-Françoise Fratani, un seul fils, Paul-François, °24-12-1874, marié à
Marie Paolacci, née à Casevecchie le 6 novembre 1879:cette dernière refuse de
vivre dans les montagnes perdues d'Olma, en indivision de plus, et part sur un
âne pour Ajaccio en contraignant son futur à la suivre.Ils se marient à Ajaccio
le 29 août 1899, d'où 3 filles et 4 garçons. Ils s'installent tous deux sans argent rue Fesch et il ouvre une échoppe
de maréchal-ferrant dans une rue qui deviendra, par mauvaise traduction, la rue
des "charrons", alors que c'était la rue des maréchaux-ferrants.Il
arrête à plusieurs reprises des chevaux emballés, comme le faisait aussi le
baron de Rimini, ce qui lui vaudra, de la part du préfet, plusieurs certificats
«de bonne action».
Parmi
ses enfants, nous citerons:
Noël , champion du tour cycliste de
Corse avant la guerre,qui s'engage par chagrin d'amour dans l'armée et sera tué
au Laos.On peut lire quelques-uns de ses exploits militaires, d'une bravoure
insensée finissant par la mort, dans les revues des combattants d'Indochine
sous les initiales N. G. ;
François-Antoine , dit Antoine, l'aîné de la famille , né le 4 novembre 1901
à Ajaccio, qui entre à l' école normale d'Ajaccio, est nommé instituteur à Bonifacio, puis à Ghisonnaccia: il s'y
déplaît et demande à être envoyé outre-mer. Il obtient la Nouvelle- Calédonie
où il se marie à Nouméa, le 20 janvier 1930, avec Marguerite Grassin, née à
Tipindjé (Hienghène aujourd'hui) de parents qui étaient des colons libres
venus de Tours en 1900 et qui furent massacrés par les
kanaks insurgés .Il s'engage comme volontaire dans le Bataillon du Pacifique,
est blessé et fait prisonnier à Bir- Hakeim.
Un de ses compagnons de combat, le lieutenant
H.-G.. Payonne, a raconté la scène lors de ses obsèques:
«Aucun de ceux qui étaient présents le soir
de son départ en mai 42 pour une patrouille de nuit dans les lignes allemandes,
à Rotonda Segnali près de Bir-Hakeim, par un clair de lune d'une pureté
incroyable comme en connaît seul le désert, aucun de ceux-là ne pourra jamais
oublier avec quel courage, digne de
l'antique , il est parti avec ses hommes pour une mort qui paraissait tellement
inévitable à tous que, lorsque moins d'une demi-heure plus tard, les crêtes se
sont embrasées au rougeoiement sinistre des mitrailleuses ennemies, bien des
camarades ont pleuré, à 24 ans d'avance
sur l'heure du destin commun de tous les hommes , la mort de leur
camarade Griscelli.» Dernière
phrase qui s’explique: A. Griscelli étant porté disparu comme bien d’autres ,
ses amis tahitiens et calédoniens hésiteront à le reconnaître à Belfort deux
ans après lorsqu’il les retrouvera, en
civil, émacié de plus et portant moustache afin de ne pas risquer d‘être
identifié et le prendront pour un revenant!.
Alors qu'il est inconscient et grièvement
blessé à la suite de deux blessures, l'une à la tempe, l'autre à la cuisse, le
général Rommel ,qui avait pourtant refusé d'exécuter l'ordre donné par Hitler de fusiller des Alsaciens de la Légion
étrangère française faits prisonniers, livre le prisonnier agonisant aux autorités
militaires italiennes, dans la persuasion, sur la base de sa gourmette
militaire «Griscelli », qu'il s'agit d'un Italien passé à l'ennemi. Les Italiens veulent le fusiller comme
traître : à demi inconscient, il entend le chirurgien italien tenter de le
sauver en affirmant aux autorités militaires que, de toute façon, il n'en avait
plus pour longtemps à vivre et que cela ne valait pas la peine de le
fusiller Ce chirurgien lui avouera plus
tard avoir été persuadé de sa nationalité italienne et avoir agi par humanité.
Convalescent, il est envoyé d'Afrique
en Italie.
Du camp de prisonniers de guerre italien, il
s'évade et fait évader , grâce à sa connaissance de l'italien, d"autres
prisonniers originaires d'outre-mer, les menant jusqu'en Suisse, puis, sous le
nom de Henri Maloisel (nom de la mère de sa femme), se joint aux F.F.I. du
Doubs.
Sur son courage, j'extrais l'anecdote
suivante du livre de François Broche, fils du colonel tué à Bir-Hackeim, Le
Bataillon des Guitaristes , L'épopée inconnue des F.F.L. de
Tahiti à Bir-Hakeim, 1940 -1942 (Paris,
Fayard, 1970, 396 p.):
«
Payonne jouait aux cartes avec lui et deux Tahitiens, dans un trou. Soudain,
les Tahitiens se mettent à crier: « Prutia! Prutia! »(« (Les Allemands!
Les Allemands!» appelés Prussiens par les Tahitiens ) . Ils avaient entendu,
avant les autres, un avion allemand. Les quatre joueurs perçurent le sifflement
de la bombe, qui se rapprochait, qui s'amplifiait. Payonne fut le premier à
crier :« C'est pour nous! » Ils
s'applatirent contre les parois du trou. La bombe tomba à quelques mètres. Une
bourrasque de sable s'abattit violemment dans le trou. Payonne et les deux Tahitiens étaient
paralysés par la peur, ils ne bougeaient toujours pas. Alors, Griscelli étendit les bras, secoua la
couverture où se trouvaient encore les cartes et dit tranquillement , avec
son accent corse: « Eh bien, qu'est-ce
que vous attendez? A qui est-ce de
faire? » Payonne le dévisageait, les yeux écarquillés. Griscelli reprit :« Eh
quoi? Elle est tombée,cette bombe, elle ne tombera pas deux fois! »
De retour à Nouméa, il y sera nommé par la suite directeur des écoles autochtones
nouvellement créées, puis sera élu en 1957
à l'assemblée territoriale dont il deviendra le président. Deux écoles,
l'une à Népoui (Poya), l'école publique Antoine Griscelli , l'autre à
Nouméa, l'école publique François
Griscelli et une rue Antoine Griscelli à Nouméa ainsi qu’une rue à Boulari (Mont-Dore)
portent son nom.
Il y avait
une rue (aujourd’hui probablement débaptisée) au Maroc à Casablanca en
l’honneur de Jules Michel Griscelli ,
ingénieur-géomètre responsable d’importants travaux (voir branche
II) , né à Vezzani le 18-06-1864, l'arrière grand-père du professeur de
médecine Claude Griscelli . Citons aussi une rue Olivier Griscelli à La
Couronne (Martigues dans les Bouches du- Rhône) en l‘honneur d‘un membre de la
branche des Griscelli de Sète (2e branche ,III Ange-Joseph).Il y a 2
légions d'honneur.:Antoine Louis , né à Vezzani, le23 05-1883 (branche II, père
de Jules Michel) et mon père François Antoine.
Son fils Paul-François dit Paul, né à Nouméa,
entre à l'Ecole normale supérieure de la rue d'Ulm, réussit à l'agrégation des
lettres classiques,passe en Sorbonne un doctorat, avec comme patron de thèse un
autre Corse d'outre-mer, Marc Fumaroli, professeur au Collège de France et
membre de l'Académie française. Marié le 4 avril 1975 à Françoise Desprez, il
est élu à l'assemblée territoriale pour deux mandats: sa femme est l'auteur de
cette généalogie.
3 Joseph-François ,°15-12-1844, marié le 31-10-1873 à
Barbe Vincensini, d'où les pharmaciennes d'Ajaccio. Autre fils Ange
Joseph Marc, fils de Joseph François
Regulus Griscelli et de Marie Barbe
Vincensini, né à Marseille en 1887 -1896 ?, 21 ans lors de sa
condamnation aux Assises de Marseille en 1907, embarqué pour la Guyane, vers Mana, le 20 décembre 1907 par le Loire, évadé du bagne. Ma femme n’a pas réussi à trouver son acte
de naissance, ni à Vezzani entre 1884-1890, ni à Marseille en 1886-1887.
Sur le plan foncier et à la suite de la suppression du droit
d'aînesse, les terrains restent longtemps dans l'indivision, perdant toute
valeur et engendrant des conflits familiaux: c'est seulement seize ans après la mort de leur
père Mathieu que ses quatre enfants se partagent des biens qui, de surcroît,
sont sans titre, puisqu'ils sont antérieurs à 1768. Le 12 juin 1889, le partage
a lieu de la façon suivante:
1 Jean-Pierre reçoit Volpajolo (1 bâtiment rural et une
olivette, moins 1 olivier donné à la soeur et vendu à François-Antoine),
Violata (45 ares 40,parcelle C 34), moins la moitié attibuée dans le partage à
la soeur et vendue ensuite par celle-ci à François-Antoine, enfin Traggetti.
2 François-Antoine reçoit à Mituli les lots D 174,180
181,182, soit des maquis et des friches d'une superficie de 1 hectare 46 ares,
Talafronajiu et la portion de maquis indivise avec César Griscelli et
Pierre-Joseph Griscelli au lieu-dit Olma (B 208 et 210), friches de 1 hectare
92 ares appelées Valumbrosa .
3 Joseph-François se voit attribuer Alzetto, le site du
moulin de Cortino et d'autres terains à Olma.
4 La sœur Rozanna (du
grec Roxane, emprunté par les Phocéens au perse:la rose ARYANA déjà vu à propos
d’ Alalya, c’est-à-dire ici lumineuse, blonde , cf. le peuple des Roxolani)
reçoit pour sa part:
A) une moitié de la parcelle C34, de 45 ares
40, à Violata,-une terre à blé,-qu’elle vend à son frère François-Antoine le
12-12-1894 ainsi que tout ce qui suit (l’acte est enregistré);
B) un olivier(!) situé dans l’olivette de
Jean-Pierre à Volpajola, D129 (ancien cadastre);
C) sa part du clos Poggiolello A1111, 25 ares
à Vezzani. Le fils unique de François-Antoine, Paul-François, forgeron à
Ajaccio, devra, en 1930, revendre ce clos pour faire face aux dépenses
occasionnées par le mariage de sa fille Claire- Françoise;
D) sa part de Olma, avec sa part de la
maisonnette et du pailler en pierre(B 208);
E)sa part de Mituli: lots D 174,180,181, 182,
de 1 hectare 46.
Les héritiers de François-Antoine, ainsi
devenus propriétaires de deux parts, sont, sauf pour Poggiolello, restés dans
l’indivision jusqu’à aujourd’hui(2006).Ils sont au nombre de 6, y compris le
mari de l’auteur de ces lignes : 2 seulement vivent en Corse, Robert-Toussaint
Poggi à Ajaccio et son frère Marc Poggi, à Porticcio, fils de Claire-Françoise.
En cas de passage à la génération suivante,
on passerait à 11 héritiers(!) dont certains au Vietnam , en Thaïlande ou en
Nouvelle-Calédonie….
Etant donné le coût des frais notariaux, les
aléas des remembrements éventuels,on comprend que ces terrains sont
pratiquement perdus pour leurs héritiers
et propriétaires légitimes.
III LA BRANCHE DE SYLVESTRE-MATHIEU
Sylvestre-Mathieu, °1732, marié à Maria, a 5
garçons et 1 fille au moment du premier recensement en 1770:
1 Joseph-Mathieu, °1755, deux fils:
-Noël qui épouse Angela
Jeanne Baldovini, dont 1 fille, Jeanne-Marie, laquelle épouse le futur baron de
Rimini en 1829, voir branche aînée;
-François-Antoine, dont
Antoine-Louis,°8-07-1837, lequel quitte Vezzani pour Bastia en 1864.Il y
devient commis-greffier et se marie le 22-12-1870 à Bastia à Josepha
Santandrea. D’où Albert-Noël Antoine Griscelli,°15-12-1874.Albert épouse Lucie
Lanfranchi, d’où Josephine Griscelli, née à Bastia le 26 mai 1893.C’est de la
famille de celle-ci que descend Marie-Hélène Ferrandini, ulmienne, agrégée,
docteur, maître de conférences à l’ Université de Corte.
De cette branche bastiaise pourraient
sortir les Vezzani de Bastia, dont César°8 août 1888, mort le 11
novembre 1951 à Marseille, le plus grand ténor corse, à la voix
exceptionnelle (voir aussi la branche
aînée pour d’autres Vezzani, mais continentaux ceux-là).
2 Jean-Sylvestre, °1756, qui a pour fils
Joseph-Marie, marié le 22-07-1806 à Antonia Maria Marchioni, d’où Ange-Joseph,
°6-11-1805, marié le 2-12-1827 à Donia Baldovini, d’où 2 fils:
1)Jacques-François, °6-10-1846, marié le 11-10-1874 à Pauline
Catherine Bustori, d’où Parthénopée, lequel a 4 enfants:Jacques- François,
Ours-Joseph, Pierre-Xavier, Eugène. De Ours-Joseph, Madame Marianne Griscelli, épouse
François, adjointe au maire actuel de Vezzani.
2)Jean-Sylvestre, ° 1836, maré le 27-09-1858 à Marie
Dominique Taddeï, d’où:
1Joseph-Mathieu,°1863, dit « Americano »,sans
avoir jamais mis les pieds en Amérique, d’où Jean-Sylvestre et sa famille à
Ajaccio (le maître des écoles François Griscelli entre autres);
2Joseph-Marie, °1869, d’où Jean-Joseph;
3Ange-Joseph,°31-01-1873, marié à Adèle Catherine Santoni,
d’où Jacques,à Ajaccio, conseiller économique et social de Corse ,
et sa famille.
IV LA BRANCHE DE PIERRE-SAINT.
Pierre-Saint,°1734, mort le 3 brumaire an XII
(25-10-1804) à 70 ans, marié à Marie Martina, °1742.Il a 36 ans au recensement
de 1770 et sa femme en a 28.Il a 4 garçons et 3 filles:
1)Laude-Marie, ° 1760,mariée le 22-09-1777 à Ignace Biancardini;
2)Lucie, °1762, 8 ans en 1770 au recensement, mariée le
9-02-1783 à Marc-Saint Luciani;
3)Jules-Pierre, °1771,marié à une Luciani
4)Angelo-César, °30-07-1777, marié le 1-10-1805 à Maria Felicie
Marchioni;
5)Ange,°25-03-1778;
6)Ange-Joseph, °entre 1781 et 1783, marié le 20-04-1818 à
Antoinette Félicité Baldovini, °1790, fille de Pascal Baldovini et de son
épouse Marie Véronique. Mort le 4 avril 1866. Présent aux recensements de 1818
et de 1848. D’où:
Ange-Pierre, °13-09--1823, marié le 16-09-1841 à Marie
Catherine Luciani, présent au recensement de 1848; remarié le 16-04-1866 à
Angèle Mathée Luciani, fille de André Alexandre Luciani, juge de paix et
de Pauline Catherine Tristani. Ange-Pierre est, lui aussi, juge de paix.
Il a 1 garçon et 1 fille:
1 André Alexandre, °5-11-1866, juge de paix et l’un des nombreux
Griscelli maires de Vezzani ( il faudrait dresser la liste des maires de
Vezzani depuis 1789), conseiller général du canton, dépositaire
des manuscrits du baron de Rimini et leur destructeur à la demande de Adriano
Colocci, mandataire du gouvernement italien, mort le2-02-1957, marié à Marie Dolinda Giorgi , °31-10-1900,
morte le 11-10-1982, d’où le précédent maire de Vezzani Pierre Griscelli
, maître des écoles et ses frères.
2 Antoinette Félicité,
°20-04-1869, mariée le 27-08-1888 à Pierre-François Santandrea. A cette famille
appartient le lieutenant du 173e
régiment Jean André Griscelli, classé disparu parce qu’évadé de l’hôpital camp
de prisonniers de Ingolstadt en Bavière en 1917
7)Angela Catherine, °1784, mariée le 5-11-1803 à Ange-Louis Griscelli,
fils de Paul-François (branche cadette ci-dessous) et de Julie Françoise.
V LA BRANCHE CADETTE DE PAUL-FRANCOIS.
Paul-François, le dernier enfant du
patriarche Paul-Mathieu, est né vers 1748.Il est présent au recensement de 1770
et se marie avec Julie-Françoise.
Nous ignorons sa descendance actuelle, mais
nous avons rencontré au cours de cet essai son fils Ange-Louis, qui en 1803
épouse Angela Catherine Griscelli (voir ci-dessus, branche IV).
N. B.
En 1770, le nom de Griscelli n’apparaît pas. Ne sont mentionnés que les
prénoms, suivant l’usage général des Corses. Seuls les Génois (par
exemple,Grazietti à Vezzani) portent leur patronyme.
Il est à remarquer que les hommes de la
famille Griscelli portent presque toujours deux prénoms, que l'état-civil relie
généralement par un trait d'union et que l'on considère comme des prénoms
composés. Mais il peut y avoir là une vieille tradition, comme dans les pays
anglo-saxons et comme à Rome : le premier est un prénom chrétien (praenomen),
le second correspond à ce qui devient le nom de famille pour la plupart des
Corses (nomen), tandis que le nom suivant correspond à un surnom (cognomen,
par exemple un ethnique comme GRISCELLI, le Grec).La tradition du prénom du
grand-père porté par l'aîné est aussi resté vivante comme symbole de sa réincarnation.
Ceci est un essai de synthèse, mais nous avons pu glaner, tant sur les filles Griscelli que sur les hommes, divers renseignements supplémentaires, que nous avons écartés de cette généalogie. Outre l'indispensable recensement de 1770 consultable aux Archives nationales à Paris. C'est à Vezzani, bien évidemment, que nous avons pu consulter les archives, grâce à l'inépuisable obligeance de Madame A. Genasi : qu'elle veuille bien trouver ici l'expression de nos remerciements.
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