L’origine du tiki maori et
l’existence de deux animaux fossiles peu connus du Pacifique et
de Nouvelle-Calédonie : le teganpaïk,
une sorte d’otarie qui pond des oeufs et qui est vivipare , représenté sur le tiki, et le
chevrotain aquatique ou doubé .
I) L’origine de l’animal fossile
représenté sur le tiki : un mammifère marin mystérieux disparu , le teganpaïk, présent en Calédonie, une sorte d’otarie à long cou, parente de l’ornithorynque, Megalotaria longicollis Heuvelmans 1965.
Selon B. Heuvelmans, dans Sur la piste des bêtes ignorées,
p.133, tome 1, ce mammifère marin a été
entendu pour la première fois en 1801 en Australie.
« En juin 1801, le minéralogiste Charles
Bailly et ses compagnons de l’expédition de Nicolas Baudin s’enfonçaient dans
l’intérieur des terres après avoir donné le nom de leur bâtiment, le Géographe, à la baie de la côte
occidentale. Et soudain les voilà glacés de terreur par un rugissement terrible, plus bruyant
qu’un beuglement de taureau, et qui semble sortir des roseaux de la rivière des
Cygnes. Terrorisés, nos hommes ne demandent pas leur reste et s’éloignent à
toutes jambes. Mais il ne fait pas de doute à leurs yeux qu’une bête aquatique
formidable hante le nouveau continent. » Or, dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, Edouard Normandon a raconté avoir entendu s’élever des marécages de
l’embouchure du Diahot l’effrayant
rugissement d’un animal, et les Mélanésiens ont confirmé ses dires, tandis
que des métropolitains incrédules se
gaussaient et cherchaient à expliquer le phénomène par le cri d’un lion évadé d’un
cirque du temps des Américains ! Le
nom de ce mammifère marin subsiste dans le nom de
la tribu littorale de Touho teganpaïk (de tegan, serpent de mer, et de païk,
« long-cou » du type du héron
des récifs (Ardea sacra albolineata). Cela correspond en
Australie au katenpaï (métathèse
religieuse de tekan-, paï) ou tunatapan (de tutan, de tukan pan).Terenba en
Nouvelle-Calédonie a la même origine : la palatale g devient souvent r.
Ce mammifère marin (Heuvelmans, op.
cit. p.125, tome 2, et Peter Costello, dans A la recherche des monstres
lacustres, p. 233) pondrait des œufs mais allaiterait ses
petits comme l’ornithorynque et ressemblerait à une otarie à long cou, avec trois bosses,
caractérisée par une crinière blanche, et des rugissements rappelant ceux d’un lion.
Maoris et Polynésiens
semblent avoir été frappés par
l’allaitement maternel des petits
d’ « otaries » à la surface de la mer, les pores des bosses
diffusant le lait comme des mamelles.
Rien d’étonnant dès lors si les tiki
(autrefois gravés par trois dans des dents d’otarie aux Touamotou) en gardent le souvenir, car on peut
être tenté de voir dans ces figures
inexpliquées que constituent les tikis porte-bonheur de Nouvelle-Zélande la représentation
d’un embryon d’otarie à long cou, dans lequel
les Polynésiens voyaient le début de toute vie. Pour eux, le fait, à partir de
l’œuf cosmique, de passer à
l’allaitement emblématique des vivipares représente l’histoire de la vie, de son
origine à notre époque. Le mot tiki désigne
étymologiquement une statuette, le plus souvent en cire, à but magique et c’est
l’adaptation du mot ibère dagus , dagudos
qui se retrouve en grec.
2) Le doubé préhistorique .
Dans le bulletin n°63 du
premier trimestre 1985 de la Société Historique de Nouvelle-Calédonie, j’avais
écrit un article sur l’existence présumée d’un animal pré européen
ressemblant à une biche plutôt qu’à
un cerf (sans cornes) en
Nouvelle-Calédonie, -mammifère marin en vérité car à part les roussettes et les hommes, il n’y a pas de mammifère terrestre en
Calédonie. On l’appelait doubé, nom
qui a passé tout naturellement au cerf lorsque celui-ci fut introduit par les
Européens.
Or, au cours d’une passionnante émission de la
5 (31
octobre 2019) consacrée à l’histoire de l’évolution (Grand format de la
science) , dans la lignée évolutive
complexe de la baleine, mammifère marin
également , j’ai pu voir, fût-ce très furtivement, un mammifère aquatique , ou en tout cas semi
aquatique, nageant avec ses pattes comme une chèvre, appelé chevrotain
(et non chevrotin , petit de la
chèvre), ressemblant à une biche et
appelé biche ou biche-cochon
(à cause de ses pieds qui ressemblent à ceux du cochon), nom savant Hyemoschus aquaticus , Ogilby ,1841, du grec hys, hyos, cochon, et moschos
, petit d’un animal, gazelle qui donne le musc , de l’ordre des Artiodactyla , famille des Tragulidae,
seule espèce du genre Hyemoschus.
Nous apprenons par Wikipedia que son
« pelage est lisse, brun rougeâtre (doubè
désigne justement cette couleur), avec des rayures et taches blanches
longitudinales et il serait aussi impliqué dans la flottabilité. »
Un parent du chevrotain de Calédonie existe
encore dans les forêts côtières de Côte
d’ivoire, jusqu’au Liberia aujourd’hui les individus sont rares hors des
réserves et même dans les aires protégées. L’habitat est limité aux vallées
fluviales, aux zones marécageuses et aux bas fonds de certaines forêts
subtropicales africaines de plaine.
C’est une espèce plutôt nocturne,
qui est herbivore et se nourrit de jeunes pousses, de figues, de noix de
palmiers, d’arbres à pain, etc., et de bourgeons. Elle mange plus rarement des
crustacés.
Sa description est la suivante : « D’une
taille à l’âge adulte de 60 à 110 cm de longueur totale (dont la queue très
courte dépassant rarement 15 cm de long).Le poids varie entre 6 et 17 kg. avec
des individus mâles plus légers. En effet ils font en moyenne une dizaine de
kg. contre douze pour les femelles. La hauteur au garrot est de 30 à40 cm. Le
corps est compact, porté par des pattes fines et élancées ; l’encolure est
courte, la tête petite et étroite et les yeux grands. L’animal possède un nez
caoutchouteux, avec des narines fendues. Le menton, la gorge et la poitrine
sont couverts de poils rudes et marqués d’un « V » inversé blanc. Les
canines forment des défenses, assez peu visibles chez les femelles, mais
pouvant dépasser les lèvres chez les mâles. Ses pattes non palmées, mais avec
des doigts vraiment développés lui permettent une nage asse efficace. »
Il s’agit selon moi d’un
fossile vivant et il est dommage que son statut de conservation UICN soit
qualifié de préoccupation mineure, ce qui serait dû à un besoin de donnés
scientifiques sourcées récentes.
Est-il possible qu’un parent de ce chevrotain aquatique africain ait hanté les
côtes calédoniennes à date ancienne, comme semble l’indiquer les traditions
mélanésiennes ?
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