La découverte des îles Loyauté en 1788 par
Lapérouse et son itinéraire ultérieur.
Les
Instructions prescrivaient à
Lapérouse , de venir « en quittant
les Tonga, « se mettre par la latitude de l’île des Pins, située à la
pointe du sud –est de la Nouvelle-Calédonie ; et après l’avoir reconnue,
de longer la côte occidentale qui n’a
point encore été visitée ; et il s’assurera si cette terre n’est qu’une
seule île, ou si elle est formée de plusieurs. » Lapérouse exécute à
la lettre toutes ces instructions. Il embarque deux insulaires à Namouka aux
Tonga et les rapatrie à Rotuma ,qu’il
pense être l’île de Belle – Nation de Quiros que les instructions lui avaient demandé
également de reconnaître et dont il est
aussi le découvreur.
C’est de Rotouma qu’il faut suivre son
trajet vers la Nouvelle-Calédonie et cela change beaucoup de choses : il
passe alors obligatoirement par les Nouvelles-Hébrides avec
Erromango, dont le nom signifie les
deux pirogues, puis Tana (où le maïs
préeuropéen vient d’un rescapé de la Bousole,
Collignon), enfin les Loyalty , Lifou d’abord, puis Maré, avant de se rendre à l’île des Pins. Comme l’indiquait
Brossard, dans Rendez-vous avec Lapérouse
à Vanikoro, p. 248-249, « Lapérouse , ayant ordre de reconnaître le
sud de la Nouvelle-Calédonie , a dû faire une route générale vers le
sud-ouest, pour prendre vue de l’‘île des Pins. Il pouvait, avec le vent
régnant, normalement y aller d’une seule
bordée. Dans ce cas, il ne pouvait manquer la vue d’une des Loyauté ; s’il
eut des vents variables, il était aussi inévitable, à moins de refuser la terre
avant la latitude de 22°40’ sud, qu’il
vît l’une de ces îles. Lapérouse n’avait
aucune raison, bien au contraire, de ne pas venir vérifier quelques positions
de la côte est de la Nouvelle-Calédonie, données par Cook. Dans chacune de ces
perspectives, il devait donner sur l’une des Loyauté [Lifou ou Maré]. »
Des Loyauté, il faut ne retenir que Maré et Lifou.
Le cas d’Ouvéa.
Outre le triangle polynésien
classique entre Hawaiï, la Nouvelle-Zélande
et l’île de Pâques, il existe bien plus
de 14 outliers ou exclaves ou outliers polynésiens (les autres ayant
été chassés tardivement parles migrants
mélanésiens) recensés pour le moment. Ce
sont l’arrière-garde des Polynésiens, restés le plus proche de leurs
lieux originels ; citons aux Salomon les outliers de Taumako, de Vanikoro
et de Ticopia
et dans l’archipel calédonien Ouvéa
(dit occidental pour le différencier du Ouvea oriental-Wallis de la même façon qu’on distingue le Futuna
dit occidental du Vanuatu du Futuna oriental). Les linguistes rangent dans un
même sous-groupe linguistique les outliers
du Vanuatu : Futuna occidental,
Wallis- Ouvéa oriental, Futuna
oriental et notre île d’Ouvéa occidentale avec son langage (faga uvea), parlé à Saint-Joseph. On doit y adjoindre la langue
parlée en Micronésie à Nukuoro et à Kapingamangi où une émigration eut lieu
depuis Vanikoro sous la pression des Mélanésiens vers 1825 ainsi que les archipels de Rotuma (Iuea, cf. Ouvéa) et de Uiha (cf. Ouvéa) aux Tonga, dans
l’archipel Ha’apai.
Grâce
au récit de l’expédition de d’Entrecasteaux, on sait qu’en 1793 le
naturaliste La Billardière trouva à Balade au nord de la Calédonie, en face d’Ouvéa
alors inconnue, une planche de type européen au fond d’une pirogue , rabotée et vernissée, et qu’un jeune officier , de La Motte du Portail,
repéra , sur une plage de Balade , un second morceau de bois peint en rouge. Ces débris
avaient été récupérés par des Polynésiens sur le lieu du naufrage de
l’expédition de Lapérouse en 1788 à Vanikoro ; certains
restes en bois appartenant aux bâtiments de Lapérouse ont été
emportés à Ticopia
et à Ut-upua (cf. le nom d’Ouvéa)
, une colonie ticopienne voisine avec laquelle les Polynésiens de
Vanikoro entretenaient des
relations d’intermariage.
Mais Vanikoro, Ticopia et Utupua étaient
exigus pour leur démographie galopante,
si bien que des pirogues quittèrent une première fois Vanikoro, Ticopia et Utupua, firent escale à Santo (Tut-uba, cf. le nom d’Ouvéa)
et à Futuna au Vanuatu et se fixèrent à
Wallis et Futuna.
Plus tard, mais en tour cas avant
1793, vers 1791 peut-être, une autre
migration quitta Utupua pour Ouvéa
avec ces reliques européennes qui avaient passé de Vanikoro à Utupua.
Les Polynésiens d’Ouvéa sont
ainsi venus, à date historique
récente, de Utupua aux Salomon, indubitablement entre 1788 et
1793. Quant au nom d’Ouvéa, il est polynésien et reprend l’ancien nom de
Ticopia, Tutupua va Nikoro, qui signifie l’île en forme de demi-cercle de la Déesse Serpent (de li guri, l’enroulé
devenu nikoro). Le serpent arboricole
en question (Pytho engyralis) se
retrouve à Lifou, où il a été importé de Nouvelle-Bretagne. Il a la
particularité de se lover en entonnoir pour recueillir l’eau de pluie afin d’y
piéger les oiseaux assoiffés dans ces îles sans rivière. Son nom a souvent, par
métaphore, désigné l’île avec lac central comme l’était Ticopia ou comme
l’atoll d’Ouvéa. Le nom vient ainsi de Utupua, l‘île en forme de demi-cercle.
Ouvéa, la 3e
des Loyauté, avait ainsi subi un peuplement mélanésien d’abord, puis
une migration polynésienne justement
vers 1791, en provenance de Vanikoro et des îles voisines.
De là la planche rabotée trouvée à
Balade par la Billardièrde, qui venait
de Vanikoro, mais n’est pas un indice de passage de Lapérouse à Ouvéa. De là
aussi la peur de ces indigènes lorsque La Billardière s’intéressa, de trop près
à leurs yeux, à l’origine de la planche,
car, étant polynésiens, ils connaissaient le rôle qu’avait joué Makataï dans
l’extermination de l’expédition.
Lapérouse et Collignon , le
« jardinier » de la Boussole, se sont arrêtés, et
leur ont appris à planter le maïs, à Lifou
, au mouillage de Chépénéhé
sur la côte sud –ouest de l’île et, un peu plus à l’est , à Kédeigne (altération , comme le
mouillage de la baie de Tadine à
Maré, du nom de Collignon)
; et à Maré, Tadine , où le maïs pré,européen fut
planté pour la première fois par Collignon selon les insulaires sur la côte sud . il semble
certain que la navigation ait passé entre les Loyalty et la côte est de la
Calédonie.
La découverte de Lifou avant les
Britanniques.
A
Lifou existent des traditions sur le premier navire aperçu, traditions que le
professeur australien D. Shineberg a
rapportées à Lapérouse, sur la
base du rapport du santalier Simpson. Ce
santalier, en 1844, fit escale à Lifou
et y recueillit le souvenir du premier navire européen.
Selon
les gens de Lifou, le navire fut aperçu à Chépénéhé (toponyme signifiant le lieu du mouillage); il était très
grand ; il avait deux gaillards d’avant et d’arrière, de grands canots et
beaucoup d’hommes portant des chapeaux à cornes, avec des vestes rouges et bleues (la langue lifoue
n’a pas de terme propre pour désigner le
bleu). Ce ne peut pas être la gabarre
britannique, la Fancy, qui passa devant
Lifou en 1796, sans s’y arrêter. Les hommes avaient des boucles à leurs
souliers (comme celles, en argent, découvertes à Vanikoro) et portaient des
gants. Le navire resta à l’ancre pendant deux jours à environ un mille à
l’intérieur de la pointe sud.
L’équipage coupa un cocotier avec un instrument en fer (lifou fao, du français fer, pour désigner la
hache), et les gens de Chépénéhé montraient encore en 1844 la base coupée de ce
cocotier qu’ils regardaient comme étant le souvenir des premiers blancs qu’ils
aient jamais vus.
On
peut supposer que Lapérouse, mis en garde par les incidents de Samoa, décida de
n’approcher qu’une frégate à la fois, la seconde restant au large pendant ce
temps , prête à venir en aide à la première, ou faisant le tour de l’île. C’est
la Boussole, commandée par
Lapérouse, qui mouilla à Chépénéhé, avec
à bord Collignon, le botaniste de la Boussole,
dont nous retrouvons encore le nom, à
peine altéré, dans celui du village de Kedegne qui fut fondé à cette époque et nommé
ainsi en son honneur. Dès le départ de
l’expédition à Brest, les frégates avaient été chargées de graines à semer, ainsi que d’une soixantaine d’arbres
en pots à planter dans les terres lointaines
et, sur l’île Sainte- Catherine, Lapérouse avait embarqué quelques orangers,
citronniers et mandariniers en pots ainsi que des graines et des pépins.
L’expédition en avait planté à l’île de Pâques.
Collignon laissa à Lifou des orangers et des mandariniers qui
prospérèrent, mais il n’y a pas trace de maïs dans cette île, semble-t-il, si
bien qu’on peut imaginer que les grains de maïs n’y poussèrent pas.
La découverte de Maré, par
Lapérouse en 1788, cinq ans avant le britannique Raven en 1793.
C’est Lapérouse
qui a découvert Maré. En 1887, le
Maréen Louis Saiwene déclara que,
peu avant un navire
britannique (le Britannia de Raven en 1793, navire britannique que les Maréens appellent Betischo par altération du mot anglais British), Lapérouse
et son botaniste, Collignon, de la Boussole, « laissèrent dans l’île une hache
(encore fao dans leur langage,
emprunt au français fer), des graines
d’orangers et de mandariniers, ainsi que quelques grains de maïs qu’il apprit
aux indigènes à mettre en terre», ceci
vers Tadine, de kalign, corruption probable du nom de Collignon. Le mot signifiant maïs en langue de Maré, kelaï, vient probablement du nom de Collignon et vient de kelagni. Les gens de Maré font remonter
au don de Lapérouse l’introduction de
cette plante si précieuse pour eux. Lapérouse
a aussi offert aux Maréens une
poule plus grosse que leurs poules indigènes
qui venaient de l’île voisine de Tanna.
Puis, Lapérouse se rend à l’île des Pins, où dans un affrontement il perd son graphomètre à
Ouamoeo.
Le graphomètre trouvé par le « voyageur » (c’est
ainsi que l’appelle pudiquement la fiche du Musée de la marine ) A. Bonnemaison à Ouamoeo, île des Pins et remis à un ancien aspirant de Dumont d’Urville qui, en
1885 , en a fait don au Musée de la Marine.
J’ai demandé à ma femme de
m’aider, car elle est généalogiste et spécialiste de la déportation des
Communards de 1870 .Dans Déportés et
forçats de la commune, de Belleville à Nouméa, de Roger Pérennès, p. 454, je trouve : 8e convoi : la Sibylle,
puis transbordement sur l’Alceste, départ de Brest le 1er février 1874, arrivée à Nouméa le 9 août 1874, 2esection, déportation
simple (à l’île des Pins), Bonnemaison,Antoine Philippe, matricule 2.628,
né le 28 novembre 1831 à Albi (Tarn), demeurant à Paris, marié, sans enfant,
concierge et homme de peine. Ses patrons étaient disposés à le reprendre. Peine
(de déportation simple] commuée en 6 ans de détention (c’est -à dire de
déportation limitée dans le temps cette fois) en 1876 et remise en 1877 :
rapatrié par le Navarin. »
Dans le Dictionnaire ouvrier de
Maïtron, je lis : « …ancien voltigeur de la Garde, il devint, pendant le 1er
siège, sergent au 150e bataillon et, après le 18 mars, fut élu
capitaine ; dans la nuit du 6 au 7 avril, il prit part à un engagement à
Neuilly ; il nia, et dit être rentré chez lui dès le 20 mars ; son
propriétaire et son patron, imprimeur
lithographe, secrétaire de la Chambre syndicale des patrons –imprimeurs
–lithographes, qui l’avait employé 10 ans, témoignèrent en sa faveur ; ce
dernier écrivait le 24 août 1877 :
« je n’ai jamais pu le remplacer ; c’est le seul homme qui se soit
montré digne jusqu’à ce jour de ma confiance » : il était tout
disposé à le reprendre .Le 13e conseil de guerre l’avait
condamné, le 29 novembre1871, à la déportation simple et à la dégradation civique, peine commuée le 15
octobre 1876 en 6 ans de détention et remise le 20 octobre 1877 : il
rentra par le Navarin. Sources :
Arch. Nat. BB 24732, BB 27 et ANOM, H
colonies 72. » Il rentra en France
par le 19e convoi avec
le Navarin qui fit voile du 1er
octobre 1877 au 24 janvier 1878.
Le nom peu connu de ce 2e
district (ou « commune ») de Ouamoeo sur la côte ouest de l’île des
Pins, Pérennès, op . cit. , p. 486, a été altéré en Nimbo, proche de Numbo,
nom de la presqu’île de Ducos près de Nouméa (sur la côte ouest), où résidaient
les condamnés en enceinte fortifiée. Mais Bonnemaison n’y résida jamais, car il avait été condamné à la
déportation simple (à l’île des Pins, à
Ouaméo) et n’avait jamais été condamné à
la déportation en enceinte fortifiée à la presqu’île Ducos , ou Numbo. Aussi comprend-on que le
lieu de la découverte du graphomètre ait donné lieu à des spéculations sur un
éventuel débarquement de Lapérouse dans
la presqu’île de Nouméa. Or, il n’en est rien. Bonnemaison avait trouvé ce graphomètre à pinnules avec
son étui à fleur de lis, dans la
case canaque abandonnée relevant d’une tribu
aujourd’hui disparue , celle de Ouaméo, tribu qui avait été chassée pour recevoir les exilés de la Commune de
Paris et où il résidait. Mais Ouaméo est peu connu et l’officier qui
était sur le Navarin et qui se
chargea de remettre le graphomètre, sur le vœu de Bonnemaison au Musée de la Marine le
déchiffra Oumbo, qui fut altéré en Nimbo,
lieu de déportation des condamnés à la déportation en enceinte fortifiée
sur la presqu’île Ducos, -où il n’y
avait jamais eu ni tribu ni case canaques, mais où l’on pensait que Bonnemaison
, parce que communard, avait résidé. Coïncidence
qui n’en est pas une : Bonnemaison
était né à Albi, ce qui l’a peut-être amené à accorder de l’intérêt à un
indice du passage de son compatriote
dans cette île du Pacifique.
Il était fils d’un garçon
menuisier domicilié à Albi, quartier de la Rivière, Jean Bonnemaison (né à Toulouse
et mort le 17 juin 1874, son fils étant à l’île des Pins) et de Marie Rose Joséphine Anglès, couturière (décédée le 31 mai
1876, acte n°1387,également pendant que
son fils était à l’île des Pins) et il avait 3 sœurs et un frère .
De l’île des Pins viennent,
en plus du graphomètre,
l’épée aperçue par Jules
Garnier sur la Grande Terre et la médaille en argent avec bélière trouvée à Prony,
à l’effigie de Henri IV, le premier des Bourbon.
Sur la côte
ouest, nous avons un premier indice
discuté du passage de Lapérouse, ce que Bernard
Brou appelle dans son article Lapérouse
découvreur de la Nouvelle-Calédonie, bulletin dela SEHNC n° 89, 1er tr.
1989, p.7, la pseudo- hache -ostensoir
repêchée à Vanikoro, et dont il croyait qu’elle avait disparu, parce qu’il se
fiait à ce qu’avait dit le docteur Becker . Mais, dans l’ouvrage de l’Association
Salomon, Le mystère Lapérouse ou le rêve
inachevé d’un roi, 2008, p .86, figure la photographie de cette hache de pierre vert
sombre, de 12 cm de diamètre, non percée, classée comme « objet amérindien » ( !) et qui
se trouve à Nouméa, au Musée de l’histoire maritime de la Nouvelle-Calédonie.
Il s’agit d’ une serpentine taillée , probablement ramassée dans le Nord,
près de Pilou ou Lapilou comme disent les Calédoniens (de lapirou,
altération du nom de Lapérouse par les canaques), et c’est cela qui nous
importe .Il s’agissait d’une hache d’apparat archaïque appartenant à un
chef, même si , aujourd’hui sans son manche (encore que je voie, sur la photo,
un curieux manche sculpté qui a pu être attaché et qui est rangé, lui aussi, comme « objet amérindien ») ,
elle ne correspond pas à la hache- ostensoir telle que nous la connaissons.
Mais il faut songer au fait que, selon moi (voir mon blog sur la flèche faîtière canaque et le Grand
Serpent de mer), à l’origine la hache dite ostensoir caractéristique de la
Calédonie représentait un calmar
gigantesque de l’existence duquel on a longtemps douté, mais que les
Néo-Zélandais et les Japonais ont réussi récemment à capturer.
La seconde trace du passage de Lapérouse, puisqu’il nous
faut éliminer le graphomètre, consiste donc dans plusieurs blocs de pumpeylite
(minerai de nickel de couleur verte) repêchés à Vanikoro et étudiés par mon
défunt ami Bernard Brou, président
à l’époque de la Société d’études
historiques de la Nouvelle-Calédonie. Après plusieurs analyses effectuées à
Orléans et rapportées par Brou dans
Lapérouse, découvreur de la Nouvelle-Calédonie, 30 pages, bulletin n°74,
1er trimestre 1989, p . 2,6 et 17,il ne fut malheureusement pas possible de déterminer le point où avaient
été ramassés ces échantillons sur la côte ouest : « entre Bourail
(près du cap Goulvain, au centre de la Calédonie) et Gomen –Koumak au nord »
selon Brou. Pour ma part, mais sans certitude, je me rallie au point de vue de Fonteilles du B. R. G. M. (Bureau de recherches géologiques et
minières) à Orléans en 1985 qui
rapprochait « l’échantillon n°4 » des « roches basiques de la série Pilou dans le nord de la Nouvelle-Calédonie », Pilou étant une
ancienne mine élevée, d’où l’on pouvait dominer la côte.
Le nord
Le père Dubois cité par Brou,
op. cit. , p.11, a écrit : « Il faut ajouter le
témoignage de Bernard Dayé,de l’île Yandé : en février 1943, je visitai
l’île de Yandé et Hélène Gélémé me rapporta , au nom de son mari, Bernard Dayé,
une tradition des anciens : selon les vieux, deux énormes pirogues ont
longé la côte (ouest) remontant (vers le nord) ; depuis la terre et les
îles (Yandé), les Canaques suivaient leur déplacement… Arrivés à la pointe Nord
(sans doute de Paava, Tanlo ), les deux pirogues tournèrent (vers l’est) et disparurent . » Brou commente :
« En clair, la navigation de ces navires
se faisait dans le lagon (et non à l’extérieur de celui-ci), puis ils
contournèrent la Grande Terre , ce que jamais personne d’étranger n’avait
encore fait. »Le but de ce contournement difficile , mais qui
répondait aux Instructions, était de s’assurer si la Calédonie était bien une
seule île ou si elle était composée de plusieurs.
La côte est
Brou a étudié un conte de
Baudoux, où les autochtones évoquent le passage de deux bâtiments et le cadeau
fait au chef de Pouébo d’une médaille
qui n’a pas été retrouvée. Il s’y
avitaille en eau et s’approvisionne en
bois sur l’îlot Poudioué, en face de Balade. De plus, on trouve sur la côte est des pommiers malaques (pommiers
dit canaques) à fruits rouges et blancs (Syzigium malaccense, de 2 variétés) qui ne sont pas indigènes et que les
canaques appellent les pommiers des
Popalanguis (blancs, altération depuis Quiros, du mot [His]panioli). Enfin, le nom du grand récif Mangalia (lia a le sens de deux) signifie les deux pirogues, ce qui fait penser que Lapérouse a pu longer la
côte est jusqu’à Touho (le récif s’étend de Hienghène à Touho ). De la passe de Touho, il met le cap sur les îles Duff (Taumako),
passant aux Nouvelles –Hébrides
( Vanuatu) en longeant Spiritu
Santo , archipel qu’aucun navigateur européen n’avait revu depuis Quiros au XVIe siècle, et dont il
est ainsi le redécouvreur, mais il sera arrêté à Vanikoro.
Le but visé par Lapérouse : Taumako , ou île
Duff , près de Vanikoro.
Taumako ne
sera (re) découverte qu’en 1797 par le
navire missionnaire Duff, commandé
par Wilson. C’est l’île où au XVIe
siècle Quiros avait débarqué et où était apparue, dans la littérature européenne, le nom
de Vanikoro sous la forme Manikolo, mais personne n’y était jamais allé.
On comprend l’intérêt de Lapérouse pour cette île de Vanikoro inconnue, comme
pour Taumako jamais revue depuis deux cents ans , de même qu’ il avait voulu retrouver l’île de
Belle- Nation (Rotouma) , jamais revue depuis Quiros.
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