Molu
Pour une
identification nouvelle du môlu, Odyssée, 10, 305.
Moi aussi ,
j’en ai mangé , mais , comme beaucoup d’autres , sans le savoir !
« Hermès tirait du sol
une herbe , qu’il m’apprit à connaître, avant de me la donner : la
racine en est noire et la fleur , blanc de lait, « môlu »
disent les dieux ; ce n’est pas sans effort que les mortels l’arrachent ; mais les
dieux peuvent tout. » Il s’agit d’une plante à effet de contre-
envoûtement, afin d’empêcher la magicienne Circé de transformer Ulysse en
cochon impur, puis en pierres –menhirs,
comme déjà elle l’a fait pour ses compagnons.
Tous les hellénistes dignes de ce nom se sont penchés,
-en vain, -sur cette plante énigmatique. La
plante, selon moi, est appelée au Maroc mloukhia, nom très proche de môlu, de môloskw. Il
s’agit de Abelmoschus esculentus (L.)
Moench,
1794, savoir le
gombo.
Le gombo, appelé okra en Louisiane
et plus généralement dans le sud des États-Unis, est une espèce de plante
tropicale à fleur blanc de lait comme
le dit Homère, appartenant à la famille des Malvaceae.
Son fruit est une capsule de forme pyramidale récoltée verte et
employée comme légume et comme
condiment. Cette plante était cultivée
par les Égyptiens, puis a été importée en Europe par les Maures espagnols au XIIe siècle.
Elle fut introduite au XVIIe siècle en Amérique par les esclaves. Les esclaves et maîtres parlant le créole utilisaient ce mot mloukhia pour parler des plantes en général. On trouve cette épice dans la soupe vietnamienne
aux crevettes ou dans certains mélanges d’épices comme le Raz el
Hanout, mais souvent le mloukhia y
est remplacé par la cardamome, grec cardamômon ,
littéralement cresson (carda) amômon.
C’est un genre de plantes de la
famille des Zingibéracées, qui
comprend le gingembre (cf. Zanzibar, latin zingiberi,
grec ziggiberis, où l’on reconnaît le
mot ibère) des contrées chaudes de l’Asie, souvent
dotées d’une saveur piquante et aromatique, et dont une espèce (Amomum
subulatum) fournit la grande cardamome ou cardamome brune, une épice parfois
substituée à la cardamome véritable,
cf . a prothétique +mômon, de môlu ? La cardamome véritable est la 3e épice la plus chère du
monde, après le safran et la vanille, il s’agit de Elettaria cardamomum.
La cardamome est connue et utilisée en Inde depuis des temps très
reculés ; les plus anciennes mentions, sous son nom sanskrit
de एला (Ela) (tamoul Elettari, qui signifie « graine
de cardamome »[ ]et a
donné son nom au genre Elletari) datent de la période védique, vers -3000 av. J.-C. 17 . Elle est exportée, probablement par la route,
puisqu’elle est connue et utilisée par les médecins
en Assyrie,
et même cultivée dans les jardins du roi de Babylone
Merodach-Baladan II, au VIIIe siècle av. J.-C
Il ne faut pas s’étonner si le nom désigne une
autre épice et surtout un plat ailleurs
qu’au Maroc, dans le reste du Maghreb, mais la plante a des fleurs jaunes. Il s’agit de
Corchorus olitorius L. ou
corète potagère.
[
dont les feuilles sont utilisées dans de nombreux pays du Moyen-Orient,
à la base du plat du même nom (mloukhiya)
dans la cuisine égyptienne. Le mloukhiya rappelle le
morètum ou morètârium, ,cité par Ovide dans
les Fastes, 4, 367, mets composé d‘ail doré (Alium moly, néerlandais muur,désignant
le mouron
rouge) , de fromage et de vin ainsi
que d’herbes dont Abelmoschus
esculentus. A
noter qu’en grec môlu a été dérivé en môluza qui signifie
« tête » d’ail et en réalité racine d’ail , de môlu riza (éolien
briza, grec (w)riza, latin et grec (w)râdix, racine). Quiconque a
pris un taxi en Grèce a vu pendre au rétroviseur les bulbes d’ail destinés à
éloigner le mauvais œil. La plante et ses feuilles sont
appelées moloūkhia (ملوخية) en arabe. Les feuilles séchées et moulues sont
utilisées comme épices.
La m°loukhiya
, Abelmoschus esculentus (L.
èelios, brûlant a
hérité, en même temps que son nom, des traditions attachées au môlou homérique, le . Il est, dans certains pays, selon les
traditions, préparé « par superstition »
dit le Net, pour célébrer le premier jour du calendrier musulman afin que la nouvelle année
soit « verte »,comme son fruit,
c'est-à-dire prospère et pleine de bonheur[]. Tel a dû être le cas d’Ulysse chez Circé aux Orkhades (voir mon blog sur le palais de
Circé) : le bonheur était pour lui d’échapper à l’envoûtement et de
réaliser son prochain retour à Ithaque..
Dans certaines régions de Tunisie, elle est aussi préparée à la fin d'un deuil et le premier jour
de l'Aïd el-Fitr. Cela montre les vertus magiques
que le môlu homérique a conservées
jusqu’à aujourd’hui.
Vinci, The
Baltic origins, cite, p. 67, le mot
sanskrit mûla , qui signifie racine et mûla karman (karman , de ksrwdyom, étant peut-être apparenté au
grec skorodion, de ksrwdyom, ail, donc gousse d’ail), qui désigne l’emploi d ’une racine à des fins magiques. Homère
écrivait : « môlu » disent les dieux ; ce n’est pas sans effort que les mortels l’arrachent ; mais
les dieux peuvent tout » ; or, les racines de Abelmoschus ou des
aulx s’arrachent facilement ;
pourquoi le poète a-t-il glissé ce clin
d’œil ? Parce qu’il a voulu montrer que
môlu venait du sanskrit , mot qui
signifie « langue parfaite »,
« langue des dieux », des Arya, dit le poète (il doit en être un), et qu’il
était apparenté au sanskrit mûla qui
veut dire racine , en
particulier lorsqu’elle est utilisée à des fins d’envoûtement. .
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire