A QUOI RESSEMBLAIENT
LES JARDINS SUSPENDUS (en grec ta paradeisia ou ta
kèpa krématista) DE BABYLONE ?
Je me suis penché déjà sur le sens de la pierre qui
surmontait les menhirs à Göbekli en Turquie et à Minorque (voir mon blog sur
les menhirs).Selon moi, si le menhir est
une imitation magique de la germination du blé ou de l’orge, la mort du grain, qui,
pour les mentalités archaïques , est la condition première de sa germination ,
est symbolisée par cette dalle horizontale qui surmonte le menhir. Pour
représenter plusieurs pousses souhaitées, on représenta un pilier
supplémentaire. Il était logique d’étendre ces rites magiques de fécondité et
de juxtaposer plusieurs menhirs en marteau les uns à côté des autres. Telle est
l’origine des jardins suspendus, d’abord en Perse, à Parsagàdès, puis à
Babylone et à Ninive . « Il y
avait dans la citadelle (de Babylone
] écrit Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, II, 10,
1-6 le célèbre jardin suspendu, ouvrage, non pas
de Sémiramis, mais d'un roi syrien postérieur à celle-ci : il l'avait fait
construire pour plaire à une concubine. On raconte que cette femme,
originaire de la Perse, regrettant les prés de ses montagnes, avait engagé le
roi à lui rappeler par des plantations artificielles la Perse, son pays natal.»
Bérose
attribue cette construction à Nabuchodonosor II (604-562 av J.-C.[)]. Il aurait fait construire cet édifice pour son épouse,
originaire de Médie,
pays montagneux de l'Iran
occidental, pour soigner sa nostalgie de son pays natal et de sa verdure, qui
contrastait avec le relief plat et le climat aride de Babylone. Un autre
passage de Bérose
indique le nom de la reine, Amytis,
que Nabuchodonosor avait épousée à la suite de l'alliance entre son père Nabopolassar
et le roi des Mèdes Cyaxare au moment de la destruction de l'Assyrie.
I Une première
évolution des menhirs en marteau avec les cupules creusées sur la dalle
horizontale où l’on plante des graines
sur la dalle horizontale et la levée du deuil pris pour la mort du blé : le modèle de Parsagadès .
La première capitale de la Perse, à quelque 40 kilomètres de
Persépolis, fut Parségadès, dont le nom dérive avec anticipation du s et transformation du n en d, de phalang-s,
le fleau de la balance à cause des deux plateaux, entendons les deux pieds de
certains menhirs, nom du linteau qui surmonte les menhirs en marteau, à partir de
phaleg°nes, paregades .Pareillement, nos mots paradis et parc (ce dernier à rapprocher du grec kèpos, jardin, de parak-os ) sont tous deux des variations dialectales médo- persanes
de phalangs (parideisos en persan, le
jardin, venant, avec l voyelle [la]noté
li et rhotacisme, puis transformation du n en d, de
phal°donnant parid- + suffixe de ressemblance –eidos, parideidos , avec dissimilation paradeisos .
Les cannelures des colonnes sont l’héritage des stries des
pseudo -polissoirs (voir mon blog sur
les pseudo- polissoirs) représentant les sillons où meurt le grain.
Sur le linteau représentant la mort du blé, dans les cupules
, on mettait un peu d’humus et des graines diverses , on arrosait, une ou deux
semaines avant l’équinoxe de printemps et on considérait cette poussée comme
une levée du deuil permettant magiquement la sortie des germes. Quelles étaient ces
plantes ?
Les végétaux du
« jardin » du linteau : les plantes funèbres accompagnant
la mort du blé : le lis (krinon
en grec cf . corn en
anglais, etc.) , la rose, le
grenadier , les cyprès et les palmiers à fruits rouges (grec phoinix) .
Le grenadier (sidè en grec ou rhoia,de doia , orge, granatum en latin ou la pomme phoinika,,
pourpre )
et la mythologie.
Du fait de l’homonymie du nom du grain (seia) d’orge (da, cf. Daa mèter, la mère de l’orge, grec
kritha ,latin hordea,
vieux haut allemand gersta , cf. grec sitos, pain ;, seiros, silo, nom gaulois de la déesse Sirona),et d’un nom grec de
la grenade (sidè) , à rapprocher de son
nom latin (gran+atum, orge), ont été
inventé es les légendes qui lient Perséphone, la déesse de l’orge mort, et les
grains de grenade . dans le « jardin d’Hadès » poussait , en
effet , un grenadier auquel il ne
fallait pas toucher sous peine de mort perpétuelle, -entendons le maintien aux
Enfers toute l’année, ce qui n’est pas sans faire songer à certaine pomme de même couleur pourpre du jardin d’Eve.
Or, Perséphone se laissa tenter, et, soit inadvertance de sa part, soit que
Hadès lui eût tendu un piège,, elle
avala un grain fatidique. Il fallut l’intervention pressante de sa mère Dèmèter
pour la racheter.
Les fèves et autres légumes sacrés poussant sur
le linteau.
Il y avait, bien entendu, des jardins royaux à l'époque du
roi Mérodach- Baladan II (721-713 et 703 av.
J.-C.) décrits sur la tablette d'argile BM.46226 : description des plantes
qui poussent dans le jardin, sans doute servant pour la table du roi : ail,
oignons, poireaux, laitues, concombres, radis, nombreux condiments et aromates[. 8].
II La suite de
l’évolution des menhirs à Babylone et à Ninive : la présence de montagnes,
les terrasses superposées et
l’irrigation grâce à des avales ou
adductions d’eau en terrasses descendantes appelées pirogues en Océanie.
Pourquoi se donner le
mal de créer un jardin suspendu quand on pourrait si facilement en disposer un
au sol ?Quand, pour complaire à sa concubine originaire de Parsagadès, Amytis, Nabuchodonosor
II (604-562 av J.-C.) décida de transférer à Babylone des
jardins qui rappelassent à sa bien –aimée les jardins persans, il se heurta à
des contraintes, en particulier le relief escarpé qui existait dans le peu
d’espace qui existait la citadelle qui était entourée des célèbres remparts ,
le palais royal hors les remparts et l’Euphrate (destiné à arroser les jardins ) . Amytis voulait légitimement pouvoir, à partir
du palais royal, se promener dans s les futurs jardins,car Diodore nous l’apprend, les
piliers donnaient
accès aux appartements royaux. Un carré de 120 mètres de côté (14400 m²,
soit environ1 hectare et demi ou 1400 ares ) de fut donc tracé entre l’Euphrate et le palais pour
y asseoir, grâce à 20 piliers, une espèce d’amphithéâtre de 11 gradins, séparé
en deux, semble-t-il, par un escalier,
mais cet espace mordait fortement sur la montagne où la citadelle et les
remparts qui la ceignaient était bâtie. Aussi ses ingénieurs mirent-ils au
point un système novateur, une sorte de « bélier » permanent actionné
par le courant, pour irriguer en permanence
les jardins, fût-ce en été et en hauteur. Aussi tout un savant système
de menhirs juxtaposés avec un sol étagé entre eux fut-il établi de telle façon que le plus haut
partît du niveau du sol pour atteindre le niveau de la citadelle. Les arbres furent plantés dans les colonnes,
creusées à un bout .Qu’est-ce qui justifia le « classement » de
ces jardins dans les sept merveilles du
monde antique par un certain Philon ? C’est probablement l’exploit technique
présenté par leur irrigation, et non l’agrément et la diversité des
plantations, bien établis pourtant.
Sources antiques
Mesures : 1 pied : 0,296
mètre .
1 coudée : 1 pied et demi, soit
0,444 mètre.
1 plèthre : 100 pieds, 29,6 mètres .
Quinte-Curce, 1er
siècle ap.J.C., dans son Histoire d’Alexandre. V, I, 32-35 : « (32)
Au-dessous de la citadelle [et des remparts] (et non au-dessus comme le porte
par erreur le texte, cf. Diodore de Sicile : ci-dessous : la colonne la plus élevée, de cinquante coudées
(0m444) de haut (22 mètres) supportait
le sommet du jardin, et [partant du sol] était de niveau avec les balustrades
des remparts, confirmé par la suite de ce texte). se trouvent ces jardins
suspendus, merveille devenue célèbre par les récits des Grecs; ils atteignent le sommet des Remparts
[qui furent aussi considérées comme une
des Sept Merveilles du monde, indépendamment des Jardins], et doivent un grand
charme à une foule d'arbres élevés et à leurs ombrages. Les piliers qui soutiennent tout l'ouvrage
sont construits en pierre: au-dessus de ces piliers il y a un lit de pierres
carrées [c’est là ce qu’est devenu le linteau surmontant les menhirs en
marteau] fait pour recevoir la terre que l'on y entasse à une grande
profondeur, ainsi que l'eau dont elle est arrosée .Telle est la force des
arbres qui croissent sur ce sol artificiel qu'ils ont à leur base jusqu'à huit
coudées de circonférence (3,52 m) , s'élancent
à cinquante pieds de hauteur (22 mètres), et sont aussi riches en fruits que
s'ils étaient nourris par leur terre maternelle. D'ordinaire, le temps, dans son cours, détruit, en les
minant sourdement, les travaux des hommes et jusqu'aux œuvres de la
nature ; ici, au contraire, cette construction gigantesque, pressée par
les racines de tant d'arbres et surchargée du poids d'une si vaste forêt, dure
sans avoir souffert aucun dommage : c'est que vingt larges piliers la soutiennent, séparés les uns des autres par un intervalle de onze pieds (3,19 mètres)
[il faut comprendre que : l’ensemble est divisé en deux
moitiés par un escalier monumental , large de 70 mètres environ , de
telle sorte que, dans le lointain, on dirait des bois qui couronnent la
montagne où ils sont nés. La tradition
rapporte qu'un roi de Syrie, qui
régnait à Babylone, entreprit ce monument par tendresse pour son épouse, qui, sans cesse regrettant
l'ombrage des bois et des forêts dans ce pays de plaines, obtint de lui
d'imiter, par ce genre de travail, les agréments de la nature. »
Diodore de
Sicile, op . cit. :
« Ce jardin, de
forme carrée, avait des côtés de
quatre plèthres [120
mètres environ, 1 plèthre =29, 6 m]. On y montait, par des gradins [situés au milieu] sur des
terrasses posées les unes au-dessus des autres, en sorte que le tout présentait
l'aspect d'un amphithéâtre. Ces terrasses ou plates-formes, sur lesquelles
on montait [par l’escalier] étaient soutenues par des colonnes qui, s'élevant
graduellement de distance en distance,
supportaient tout le poids des plantations ; la colonne la plus élevée, de cinquante coudées
(0m444) de haut (22 mètres) supportait
le sommet du jardin, et [partant du sol] était de niveau avec les balustrades
des remparts. Ces [11] terrasses, solidement construites à grands frais, avaient
vingt-deux pieds de largeur (1 pied =0, 29)
[plus de 6 mètres], et chaque saillie qui
dépassait et qui servait pour sortir vers l’escalier avait dix pieds de
largeur (2 mètres 20). Elles étaient composées de blocs de
pierres dont la longueur, y compris la saillie, était de seize pieds (2 mètres 20) sur quatre (1, 2 mètre] de largeur. Ces blocs étaient recouverts
d'une couche de roseaux mêlés de beaucoup d'asphalte ; sur cette couche reposait une
double rangée de briques cuites, cimentées
avec du plâtre ; celles-ci étaient, à leur tour, recouvertes de lames de plomb, afin d'empêcher l'eau de s’infiltrer
à travers les atterrissements artificiels, et de pénétrer dans les fondations.
Sur cette couverture se trouvait répandue une masse de terre suffisante pour
recevoir les racines des plus grands arbres. Ce sol artificiel était rempli
d'arbres de toute espèce, capables de charmer la vue par leurs dimensions et
leur beauté. Les colonnes s'élevaient
graduellement, laissaient par leurs interstices pénétrer la lumière, et
donnaient accès aux appartements royaux, nombreux et diversement ornés. Une de
ces colonnes était creuse depuis le sommet jusqu'à sa base et contenait des machines hydrauliques qui
faisaient monter du fleuve une grande quantité d'eau, sans que personne pût
rien voir à l'extérieur. Tel était ce jardin … »
Strabon,
Géographie, XVI, I, 5 : « Babylone est située, elle aussi, dans une
plaine. Ses remparts ont trois cent soixante-cinq stades de circuit,
trente-deux pieds d'épaisseur et cinquante
coudées de hauteur (22 mètres) dans l'intervalle des tours, qui elles-mêmes
sont hautes de soixante coudées (26 mètres). Au haut de ce rempart on a ménagé
un passage assez large pour que deux quadriges puissent s'y croiser. On
comprend qu'un pareil ouvrage ait été rangé au nombre des Sept Merveilles du
monde, et le Jardin suspendu pareillement.
Ce jardin, immense
carré de quatre plèthres de côté [120 mètres environ] se compose de plusieurs étages de terrasses
supportées par des arcades dont les voûtes retombent sur des piliers de forme carrée. Ces piliers sont creux et remplis de terre,
ce qui a permis d'y faire venir les plus grands arbres. Piliers, arcades et
voûtes ont été construits rien qu'avec des briques
cuites au feu et de l'asphalte. On
arrive à la terrasse supérieure par les degrés d'un immense escalier, le long
desquels ont été disposées des limaces ou vis hydrauliques, destinées à faire
monter l'eau de l'Euphrate dans le jardin, et qui fonctionnent sans
interruption sous la surveillance d’ouvriers
[détail en contradiction avec l’emplacement invisible dans une colonne indiqué par Diodore, moins fiable à mon avis]
. L'Euphrate coupe en effet la ville par
le milieu. Sa largeur est d'un stade et le jardin suspendu le borde. »
On peut dériver le toponyme de Babylôn qui est à rapprocher de
Paphlagôn, de phalang, nom du linteau
des menhirs en marteau, à partir de paphl°gn
[l voyelle donnant la ou ul l] .
Conclusions.
Les inventeurs du rite agricole des menhirs en
marteau en tant que gage de la fécondité de la terre et des techniques de
taille de la pierre, de l’irrigation en escalier comme à Babylone et à Ninive
se sont répandus dans le vaste monde où ils
se sont métissés et fondus dans d’autres cultures, ainsi que le faisait remarquer Paul
Rivet : par exemple, en Afrique noire (on trouve en Sénégambie et au
Sénégal des « pierres- lyres », en Micronésie , en Polynésie où le trilithe de Tonga pris à
tort pour un porche (vers nulle part ?) est leur plus fameuse création,
mais non la seule, à l’île de Pâques où le « chapeau) des fameuses statues
sont en réalité des avatars des linteaux qui dominaient les menhirs (voir mon
blog sur l’île de Pâques).Il ne faut pas oublier les rizières de montagne en
Asie et les pseudo -tarodières de Nouvelle-Calédonie (voir mon blog sur le
sujet).
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