Les mots d’origine caraïbe en
français.
Les langues caraïbes,
langues austronésiennes.
La Guadeloupe est l’île antillaise où l’on trouve le plus de
pétroglyphes, laissées par les Ibères au
cours de leurs migrations préhistoriques qui les menèrent aussi en Calédonie,
où ils ont aussi laissé des pétroglyphes. A ceux qui s’étonneraient de telles
migrations maritimes, précisons que les constellations existaient et que la
boussole était déjà connue du temps d’Homère (citation dans F. Vinci, The Baltic origins of Homer’s epic tales). Il est faux que ce
soient les Chinois qui aient découvert le magnétisme.
Le trait syntaxique le plus intéressant des langues
caraïbes, comme de l’ancienne langue parlée aux Canaries, est ce que les bons
pères ont appelé la langue des hommes et la langue des femmes.En réalité le
phénomène se retrouve en Lifou dans les noms de parenté notamment et leur
variation suivant le sexe du locuteur, par exemple père signifie géniteur du même sexe que celui qui parle ou à qui on
parle , et le mot mère désigne
la personne d’un sexe différent de celui qui parle ou bien à qui l’on parle. Comme le disent Damourette et Pichon à propos
du français et des langues indo-européennes : « les choses semblables à un locuteur mâle seront précisément les
dissemblables d’un locuteur femelle » et inversement
Dans les réunions officielles des tribus du fond de la
chaïne à Koumak, les mots Hom hom ! reviennent régulièrement dans la bouche de
l’auditoire qui écoute un discours , comme dans les tenu dans les cayounage ou palabres des Caraïbes.
La langue caraïbe est conservatrice et elle connaît des mots
de deux syllabes, là où souvent les langues mélanésiennes n’ont plus qu’une
syllabe., par exemple, le mot signifiant île, kaera en guadeloupéen,
correspond au papou ngaïe, de ngaeye
et au mélanésien nyou.
Le nom de la crevette en langue caraïbe,ichourou,i étant un article, se retrouve dans le mélanésien du sud de la Calédonie , kouré, cf la Coulé et son doublet la Kouvelé. A l’île des Pins, on a le clan des Ti-Kouré, ti signifiant chef : afin de mettre fin aux hostilités qui l’opposaient aux Kouniés, le grand chef du sud envoya des hommes de ce clan à l’île des Pins en otages .
Le nom de la crevette en langue caraïbe,ichourou,i étant un article, se retrouve dans le mélanésien du sud de la Calédonie , kouré, cf la Coulé et son doublet la Kouvelé. A l’île des Pins, on a le clan des Ti-Kouré, ti signifiant chef : afin de mettre fin aux hostilités qui l’opposaient aux Kouniés, le grand chef du sud envoya des hommes de ce clan à l’île des Pins en otages .
Le mot pou, gnigni en caraïbe, correspond à
tchien en belep.
Le guadeloupéen tebou
(en galibi, tobou, pierre), qui
désigne une grande pierre plate cérémonielle correspond à tiki, hache en pierre plate,
différent de doghi, sorcier.
Les noms de l’igname,
de la papaye et de la patate.
Le nom caraïbe de l’igname couchou (chez le Père Breton, on a la même
forme) correspond à ku-shu
au Japon (tout fruit ou légume d’aspect ou de chair blancs.
Il existe aussi au Japon un mot
djomon, kuzu, fruit blanc, shenshu
en Chine où ces plantes poussent à l’état sauvage. Ce mot désigne la Pueraria lobata. Zu, shu ou chu, signifient blanc.
Du kuzu djomon viennent les
noms d’une patate douce blanche dans un dialecte d’Amérique, le kuna, savoir kwalu (de kuzu) et d’une igname sauvage blanche de Nouvelle-Calédonie et des îles, le waël,
introduits par les Tibawés.
En ce qui concerne le nom de
la patate douce, la linguistique
comparative et historique seule n’est ici d’aucun secours car certains radicaux se confondent et
donnent les mêmes résultats, poussant à croire, par exemple, que la patate douce serait originaire d’Asie, ce qui est faux : il
nous faut d’abord demander secours à
l’archéologie américaine. Celle-ci nous apprend que les plus anciens restes de
patates douces et de pommes de terre cultivées
ont été retrouvés dans les grottes de Tres Ventanas, à 65 km de Lima au
Pérou, et qu’ils datent de 8 000 ans avant
J. –C. Toutefois, un spécimen de Solanum
muaglia datant de 13 000 avant J.C.,
pomme de terre sauvage mais comestible, a été retrouvé à Monte Verde, dans le sud du Chili. C’est
donc au Chili que seraient apparues la
pomme de terre et la patate douce. Or, les habitants avaient, pour les
nommer, à leur disposition, plusieurs radicaux que nous allons étudier.
1) pa pata : le fruit hirsute, en caraïbe le mot patati, patate
Il existe une pomme de terre avec un duvet dru, Solanum villosum, au nom scientifique
significatif (villosum signifiant
velu) et à laquelle les Amérindiens ont
donné le nom de pa pata (pata signifiant
velu dans la langue de Haïti appelée taino,
cf. ainou, homme), devenu patata ou batata à Haïti. C’est cette forme patata qu’ont empruntée ensuite les Espagnols pour désigner la patate douce sous la forme batata , en français patate et , en anglais, batata, patate douce, potato
.au sens de pomme de terre. On a donné le même nom de « fruit
écailleux » , patata , au pitaya
ou pitahaya (Selenicereus
megalanthus)s) .
Quant au mot papaya,
pour désigner la papaye, il vient du caraïbe papaye
par analogie entre le centre plein de
graines du pitaya à la chair blanche
avec des points jaunes et la
papaye (Carica papaya L.) au centre
également plein de graines qui, elles aussi, étaient mangées autrefois.
Pour comprendre la forme mexicaine camote ou
cambote, patate douce, qui a été empruntée par les
Espagnols et diffusée par eux avec le tubercule, dans le Pacifique, il
faut partir de pataya, katayo, puis par
métathèse kayota, kamota, camote.
A Okinawa, dans l’archipel Ryu Kyu, il existe, à côté du nom japonais imo (de Satsuma), un nom d’emprunt (de camoté), kamato, bien
acclimaté comme le prouve la salutation rituelle : Nmu kamatoin ? As-tu assez de patates douces ?
Signifiant : comment vas-tu ? Le terme camote et le tubercule ont été exportés aussi par les Espagnols en
Subanu de Mindanao (camote) et aux
Mariannes (camut).
Le même nom a anciennement été donné à
cause de ses duvets à la chayote (la
chouchoute calédonienne), Sechium edule, de pataya devenu katayo, puis
par métathèse kayota.
A Santa Cruz, dès le XVI e siècle (cf. Pedro Fernandez de
Quiros, Histoire de la découverte des
régions australes), on rencontre panaes
, d’origine inconnue,pour patate
douce.
2) ku-mara (toute
enveloppe ou tout tubercule d’aspect
pourpre, souvent la patate douce, Ipomea
batatas Poiret).
Il existe deux formes kumara :
1 L’une se décompose
en kuch,
peau, enveloppe, aspect et madja,
rouge, le nom désignant tout fruit ou légume à chair ou à peau rouges, quel qu’il soit,
pomme- liane, tomatille, tomate, tamarillo.
2 L’autre se décompose en
kep ou kup, tubercule, et madja, rouge, pomme de terre
rouge ou patate douce de couleur pourpre.
1La tomatille du
Mexique (Physalis philadelphica) a
pour nom tomatlt en aztèque, de kumara : le –ille
final de tomatille n’est pas un
diminutif, mais vient du l final de tomatl , comme dans le fruit appelé tamarillo,
également de tomatl. La tomate (Solanum lycopersicum)s’appelle
xi-tomaltl , xi signifiant petit
De même, la pomme- liane ou fruit de la
passion pourpre (Passiflora) est appelée en tupi (Guyane) maracuja, de
mara, rouge, ku, peau et ja, fruit.
La coumarine est
extraite de la fève tonka, de couleur rouge foncé : c’est le fruit du Dipteryx odorata, en langue vernaculaire
teck ou gaïac guyanais ou brésilien. La fève et l’arbre s’appellent coumaru,
coumaron, coumarine
L arbre guyanais
Strycnos guianensis a une
écorce rouge qui lui vaut son nom, urari
en Guyane., curare en français, de ku mara
2) La forme kumara, de kup mara ainsi que la patate douce
elle-même ont été diffusées à Mangareva par l’Inca Tupac Yupangui entre 1471 et
1493 et de là dans toute la
Polynésie. A partir de 1600 le pilon en pierre sculptée représentant un
oiseau pour écraser le taro disparaît avec l’introduction de la patate douce en
Nouvelle-Guinée. De kumara (Mangareva,
île de Pâques, Touamotou, Rarotonga, les
îles Cook, la Nouvelle-Zélande),
on a kumala (Tonga), kumala à Wallis- Ouvéa et à notre Ouvéa où une
pirogue de Wallis l’aurait apportée au début du XIX e siècle, kumai (Marquises), ‘umala (Samoa), ku’a’ra (Mangaia),
umara, umaa (Tahiti), uvala (Hawaï), kumal (Carolines).
On voit comment l’aboutissement phonétique de kuch mara, peau rouge, semble bien être le même que celui de kup mara, tubercule à chair
rouge ; ainsi une igname à chair
rouge (« sang de poulet » au Cambodge ou « sang des
vaincus » en Calédonie) peut, comme
la patate douce, être appelée kumara,
de kup, tubercule, et de mara, rouge. Le nom de la patate douce à chair rouge en javanais, ku madjang, doit se
décomposer en kup, tubercule, et madja, rouge. De même, on a le
nom de l’igname sauvage à chair pourpre en malais, ke mahang (de kup madjang),
emprunté par des langues non austronésiennes proches des Tuas
calédoniens : ke mhang en semang
de Kedah pour désigner une igname (langue parlée par des Negritos de
Malaisie), ke marung en sakai de Pahang pour désigner une igname cultivée On a
aussi
-le nom d’une
igname sauvage à chair pourpe, gembulu en Gajosch, de kup
mada ;
-le nom bengali d’une igname (Dioscorea alata), kamalu, de kup mada ;
-le nom d’une igname sauvage
en Nouvelle-Guinée (Osisi), gamaru,
de kup mada ;
-le nom
malais de l’igname sauvage, kembili, de kep mada, emprunté en sakai (langues non austronésiennes : Tembi, Darat, Jalai et Serau proche des
populations tuas) sous la forme kemili ;
- le nom malais de la
patate douce, savoir gumbili
ou encore kumeli, toujours de kup mada) ;
-le nom d’une igname
(Dioscorea alata) à Madagascar kambar, de kup mada. Le
nom du gombo
africain (Hibiscus esculentus) avec
des gousses qui sont généralement vertes mais peuvent être rougeâtres, vient de kambar (en bantou, ki-gombo ou
petit tubercule).Dans une langue
dravidienne, le telugu, kummara
désigne une igname, Dioscorea aculata et, en Namau
(Nouvelle-Guinée), omera (toujours de kup mara), un taro (Colocasia esculenta) ;
-le nom de la variété
rouge d ’aubergine sauvage (nous
connaissons surtout les variétés violettes), Solanum incanum, qui est appelée kambay (de kup mada) ou kambal
au Cachemire ;
- le nom du Plectranthus tuberosus (qui donne de
petits tubercules analogues à la pomme de terre), savoir kumeli ou gumeli en sundanais (Java), de kup mada.
3) ku-bi (tout fruit ou légume comestible, -bi signifiant sauvage)
Un radical ku a
donné au Japon le nom d’une variété d’igname sauvage (Dioscorea japonica) appelée kubi. C’est cette forme djomon kubi qui donne obi en Nouvelle-Calédonie, où elle fut
introduite par les Djomons, ubi, api en Amérique. Avec indication de
blancheur, on a en Amérique api-shu
pour désigner la patate douce sauvage à
chair blanche (shu signifiant blanc);
ape, apene (ape+-ne, de shen,
blanc , ope, opene (de kubi- shene).
4) ku-shu (tout fruit ou légume d’aspect ou de chair blancs
Il existe aussi au Japon un mot
djomon, kuzu, fruit blanc, shenshu
en Chine où ces plantes poussent à l’état sauvage. Ce mot désigne la Pueraria lobata. Zu, shu ou chu, signifient blanc.
Du kuzu djomon viennent les
noms d’une patate douce blanche dans un dialecte d’Amérique, le kuna, savoir kwalu (de kuzu) et d’une igname sauvage blanche de Nouvelle-Calédonie et des îles, le waël,
introduits par les Tibawés.
5) kep (tubercule
souterrain en austronésien)
On pose en austronésien stricto
sensu (indonésien et malais) une racine kep, qui signifie tubercule et qu’on retrouve à Pohnapé
(Micronésie) sous la forme kap, igname, et sous la forme up,
ep, patate douce en Amérique
6) wara-bi
(tubercule, +–bi, sauvage)
Le suffixe –bi, sauvage, indique une provenance djomon.
Il existe au Japon une fougère (Pteridium aquilinum) dont les tubercules sont comestibles. Elle est
appelée warabi en djomon, forme qui
a évolué et a fini, sans –bi, par être confondue avec kumara, patate douce pourpre. De warabi, outre le nom tibawé
du taro cultivé (sans –bi par conséquent), tara
ou taro, on a :
1) le nom de l’igname cultivée par les Tibawés (donc sans-bi) à Santo, wara ; avec –bi, le nom
calédonien d’une igname sauvage ou semi -sauvage de Calédonie, le waleï, de wara-bi ;
2) le nom d’un condiment japonais appelé wasashi (Wassashia japonica), une sorte de moutarde, apprécié pour ses racines, qui
ne pousse spontanément qu’à Formose, au Japon et à Sakhaline, peut-être introduite par les Tibawés en Nouvelle-Zélande ;
3) le nom d’un cultivar tibawé d’arbre à pain, uru en polynésien, qui vient de wara, comme le mot mayoré (de mah-uru, d’un
préfixe signifiant arbre et de –uru, mah-uru).
Toutefois, il faut remarquer qu’on trouve à Santa Cruz un
nom africain de l’igname, gnama , qui
a donné yam en anglais. On y rencontre
aussi des arbres à pain, des taros, « des châtaignes de
Tahiti », ainsi que des poules et des porcs , et ce dès le XVI é siècle
(cf . Pedro Fernandez de Quiros, Histoire de la découverte des régions
australes).
Les mots d’origine
caraïbe
Le trouloulou de la région de Ouégoa- Koumak en Nouvelle-Calédonie.
Il s’agit d’un petit crabe de sable comestible, rouge et
bleu, du genre gecarcinus, qu’on trouve aux Antilles et en Nouvelle-Calédonie. Un linguiste néo-zélandais, un certain
Hollyman, avait conclu une savante étude sur ce nom « calédonien » du
crabe en affirmant que son appellation
demeurait fort mystérieuse et, comme Dauzat,
il lui donnait une origine provençale,
tourlour. On trouve chez
Dauzat :« 1640, Comédie des
chansons ; 1667, nom d’un crabe terrestre des Antilles ; 1834,
Boiste, nom populaire du soldat d’infanterie ; formation expressive
d’origine provençale, avec le sens primitif de tapageur. » Le
nom indigène de la Marie-Galante était Aulinagan , mais elle était
surnommée Turukaera, l’île aux
tourlourous (kaera signifiant île).
Dans ses Mémoires rédigés par une
pythonisse, Mademoiselle Lenormand, Joséphine de Beauharnais emploie aussi le
mot tourlourou.
Or, à la Guadeloupe, dans la Relation d’un voyage à la Guadeloupe par le capitaine Fleury (1618-1620),
publié par Jean-Pierre Moreau sous lez titre Un flibustier français dans la mer des Antilles, on trouve ittouloulou, chez le Père Raymond Breton,
dans sa Relation de l’île de la Guadeloupe, 1647,
itourourou,
i étant un article. Le mot tourlourou est donc un emprunt direct du français à la langue caraïbe,
guadeloupéenne notamment. En Nouvelle-Calédonie, on peut hésiter et penser qu’il
s’agit du mot français, emprunté par le créole, mais c’est peu probable, car le
mot avait pris à l’époque, dès 1834, le
sens de soldat d’infanterie à cause des couleurs éclatantes, rouge et bleu, de
l’uniforme militaire (jusqu’en 1914), qui étaient celles du crabe et que le mot
avait pris par suite le sens de tapageur,
querelleur, en provençal. Mais on peut
aussi penser qu’il s’agit d’un mot de la langue mélanésienne de Koumak emprunté
par les Calédoniens. Ceci confirmerait
la parenté de la langue de Koumak avec les langues caraïbes.
Citons les mots agouti, désignant un rongeur et passé tel quel en français,le mot bannatana
qui donne banane, le mot giromon,
désignant une citrouille,passé sous l’orthographe giraumont et attesté en 1734, dans le Journal de Trévoux,le mot goyave
,espagnol guyaba, attesté comme guau, en 1525 (Fabre),et dans la Relation de l’île de la Guadeloupe du Père
Raymond Breton, 1647., le mot papaye,
« variété de goyave !», le mot
patati, patate ; le mot canobe devenu
canoë et canot, le mot hamaca, espagnol hamacu, attesté en 1519, dans le Voyage d’Antoine Pigaphetta, en 1640, chez Bouton sous la forme hamat, On le retrouve avec le sens d’abri ou de maison dans le
lifou ‘uma, qui se retrouve en
Afrique comme dans diverses langues du pacifique (australien, etc.).
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