L’ENIGME DE STONEHENGE ENFIN DEVOILEE !
On
a récemment découvert une structure circulaire en Allemagne près de Magdebourg,
analogue à celle de Stonehenge et presque contemporaine, mais en bois.
Alors
que Stonehenge date de -2800 à -1100 av
J. -C., la partie la plus vieille de ce site
allemand a été élevée dès le troisième millénaire entre - 2321
et -2211 avant notre ère. « L’enceinte aurait été exploitée de façon
ininterrompue jusqu’à son démantèlement autour de - 2050 avant notre ère. "Pömmelte a été ensuite utilisé de manière
plus sporadique entre -1636 et -1488 avant notre ère", précisent les anthropologues. Sept cercles concentriques, 115 mètres de
diamètre ! Ce qui porte à 250 le nombre de ces structures circulaires,
qu’on les appelle henges ou cromlech, découvertes en Europe et
prouve que Stonehenge n’est pas unique
en Europe. Il doit être admis d’abord que le bois était le matériau qui fut d’abord
utilisé. C’est ce que démontre d’ailleurs le nom de ces alignements circulaires, en grec phalanks, qui désignait d’abord un tronc d’arbre, comme son dérivé gréco-latin
halterès, génitif pluriel halterôn, métathèse de
(p)harantk , halta+ suffixe en èr,
haltère ou bâton , dont se servaient
danseurs et gymnastes . Frazer, op. cit, vol. III, Esprits
des blés et des bois, p. 26, écrit
du « Dionysos de l’arbre »
que « son image n’était souvent qu’un poteau
planté en terre, sans bras », imitant très grossièrement l’arbre fruitier , ici le cep de vigne, qu’il
s’agissait de faire pousser par sympathie.
A quoi,
d’abord, rébord un tronc d’arbre ; pondent
les menhirs en général? La fonction première du menhir : c’est
d’être un catalyseur magique de la percée végétative.
James George Frazer, dans Le Rameau d’or, Balder le Magnifique, Ed. Robert Laffont,
collection Bouquins, Paris, 1984, 4 vol., vol .4, p. 98, donne cet exemple : « Dans
plusieurs parties de la Bavière, on pensait que la hauteur des tiges de lin dépendrait de celle des sauts des jeunes
gens. » A Vanuatu, sur l’île Pentecôte, le spectaculaire saut du gaul , mot qui signifie plongeoir, qui est toujours pratiqué malgré les
accidents mortels et qui consiste à
sauter du point le plus haut, est censé faire pousser d’autant plus
profondément les tubercules des ignames
que le saut aura été accompli du plongeoir le plus haut. En
Nouvelle-Calédonie existaient aussi de
précieuse pierres à ignames et pierres à taros, sur lesquelles les sorciers
canaques faisaient encore, il n’y a pas si longtemps, leurs conjurations secrètes pour les prémunir
contre les maladies et pour les faire
pousser au mieux. Ces pierres à ignames ou à taros étaient les équivalents en
miniature de ces pierres pour le
sésame, le millet, le sarrasin,
le seigle ou le blé qu’étaient
les menhirs de Bretagne, nom qui
vient de Iberi-tania, le pays des Ibères, créateurs des menhirs
en liaison avec l’invention de l’agriculture
( les Ibères comprenant la tribu des Boïens). Dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, à
Arama, il existe même une quarantaine de petits menhirs dépassant du sol
de 60 cm environ : comme les plongeoirs de l’île Pentecôte, ils sont censés favoriser magiquement la
croissance des cocotiers.
On retrouve en France des restes analogues de cette
superstition. Nos épis de
faîtage au nom révélateur reposaient sur la même croyance que, grâce à ces
talismans placés en hauteur, les
récoltes croîtraient aussi haut que ces
ornements. L’érection d’un menhir avait
ainsi pour but de mimer analogiquement
la pousse du sésame ou de quelque autre céréale, de la stimuler et de la favoriser par magie
imitative. Frazer, op. cit,
vol. III, Esprits des blés et des bois, p. 26, écrit du « Dionysos de l’arbre » que « son image n’était souvent
qu’un poteau planté en terre, sans bras », imitant très
grossièrement l’arbre fruitier , ici le
cep de vigne, qu’il s’agissait de faire pousser par sympathie.
Le nom des menhirs est
souvent d’ailleurs révélateur de cette
destination agraire. Ainsi,
grâce à l’auteur latin d’un Traité
d’agriculture, Res rusticae (I, 48,3, Varron , au Ier siècle avant J.- C, nous avons conservé le nom,
indéclinable, de la pointe de l’épi sans sa balle, qui est frit. La
Pierre Frite, ou Fitte avec ou
sans le suffixe –ske marquant le
commencement, était la pierre en forme
d’épi naissant.
Du nouveau sur
l’évolution des menhirs grâce aux fouilles de Klaul Schmidt à Göbekli en
Turquie et à son livre.
L’Allemand
Klaus Schmidt a exécuté les fouilles de
Göbek-li de 1995 à sa mort en 2014 et a
fourni le récit de ses recherches dans Le premier temple, CNRS Editions, Paris,
2015, 420 pages et illustrations. Selon lui, c’est le plus ancien temple de
l’humanité, et il daterait d’environ -10000 ans av. J. C. ; pour nous, c’est l’apparition de curieux menhirs en T ou en
marteau qui portent à leur sommet une dalle horizontale d’un seul élément. .
D’autre part, grâce à l’ADN végétal, on a pu
remonter à l’origine des céréales d’Europe,et à leur domestication il y a
quelque 12000 ans : il poussait à l’état sauvage une sorte d’engrain (mot venant de un grain, tandis que l’escourgeon a deux grains et l’orge quatre) , qui est
, encore aujourd’hui , présent à l’état
sauvage dans la province de Sanliurfa , là où se trouve le sanctuaire de
Göbekli Tepe (tepe, de tepe,en tokharien étant l’équivalent
du latin templum ,de teplom, avec
infixe nasal, de l’irlandais tamnahim
, du grec tetmèka, parfait de temnô, délimiter, temenos
) et signifiant sanctuaire. Or, l’ADN
nous révèle que cette plante
sauvage, la sorte d’engrain qu’on y
trouve, est l’ancêtre de 68 céréales contemporaines, dont le sésame préhistorique
de Carnac ! J’ajouterai volontiers : comme les menhirs en marteau du
lieu sont les ancêtres des menhirs de Minorque aux Baléares, où on les appelle taula , et de Carnac.
Il est séduisant, en
effet, de rapprocher ces menhirs en marteau de Göbelki en Turquie
des menhirs appelés taulas à Minorque
qui portent eux aussi une dalle à leur sommet, même si celle-ci ne forme
pas avec le fût du menhir un seul élément comme à Gôbekli. « Identité de
style », reconnaît l’Internet. Mais
« c’est un peu court, jeune homme . »
Le mot taula ne vient pas de tabula, la table, même si les partisans de cette hypothèse
invoquent le nom catalan de ces menhirs, mesa,
qui, en espagnol, signifie certes la
table, mais qui, ici, vient du latin messis,
avec changement de terminaison comme dans le français moisson, savoir messa,
moisson, récolte, ce qui nous ramène à l’origine agraire des menhirs et à leur
vertu magique fécondante. En réalité, taula
vient d’un mot parent du grec stelea, de stelewa, stolea, latin stolo, drageon, rejet, cf . (s)t(ip)ula , tige, donnant stèla,stèle) et désigne justement à l’origine
le manche d’un marteau , donc
renvoie bien à l’origine des menhirs.
L’historien grec du VIe siècle
Hérodote (IV, 94), nous a conservé le nom de la déesse Gebeleïdzis (où
l’on reconnaît Göbekli avec un suffixe de féminin –dzis. C’est une déesse dont on a la variante thrace Zamolxis, avec prolepse du z : de gembolg(oï)-
dzis
Göbekli en Turquie et Gebelg-ol sur un ’îlot englouti près de Malte
signifient le sanctuaire de la Jument
divine, savoir un avatar de Cérès, et göbelkl
est parent du grec kobalos, en
latin cavallus, de kabalkos, qui nous a donné le français cheval. Or, phénomène de conservation
très remarquable, c’est le même nom que
nous retrouvons dans le nom d’un menhir en marteau de Minorque aux
Baléares : Cavalleria, de Cavalk [pour le k, cf. le piémontais cavalcada, cavalcade]
+morphème de féminin i + ibéro-basque
herria, pays, soit le pays de la
déesse Cérès.
La jument ou plutôt la déesse Cérès
, en grec Perséphone , en latin Proserpina , est associée aux céréales et
aux menhirs, si bien qu’ on retrouve ce radical désignant la Jument, gabar-, dans des noms de lieux préhistoriques riches en
mégalithes comme Gavarni ou l’îlot Gavrinis en Bretagne.
Le grand secret des
menhirs, ou la problématique
fondamentale de la représentation du blé ancien et du blé nouveau dans les menhirs
et ses diverses solutions.
Voltaire a raillé ce qu’il appelait l’ignorance botanique du
Christ lorsque celui-ci déclare dans Jean
12, 24: « si le grain de blé qui
est tombé en terre ne meurt, il reste
seul; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit ». Pourtant, le Christ se faisait là l’écho d’une croyance
populaire universelle à l’époque: le grain ne pouvait germer que s’il
mourait d’abord !
Il faut
donc que la mort du grain, condition
préalable de tout, soit
symbolisée, d’une façon ou d’une autre, dans le menhir qui représente la
germination du grain.
Frazer (op.
cit, vol. III, Esprits des blés et des bois,
p. 143) a distingué deux sortes de blé : « Isis et son compagnon Osiris
[sont] deux personnifications du blé …. Isis serait l’ancien esprit du blé [ce que j’appelle la mort du blé préalable à
sa germination], Osiris serait le nouveau [le blé à germer]. » Par ancien esprit du blé,
Frazer, entend qu’il est immanent au
blé, tandis que, pour l’esprit nouveau, il est extérieur au blé, même s’il lui
est encore lié. Les Grecs identifiaient
Isis à Dèmèter et Osiris à Perséphone et les Romains à Cérès et Osiris à
Proserpine. Frazer, dans op. cit. ,
vol .2, Atys et Osiris, p. 471, cite
Diodore de Sicile (I, 14, I) qui, résumant les travaux aujourd’hui perdus de
l’historien égyptien Manéthon, attribue à Isis la découverte du blé et de
l’orge. « On portait en procession à ses fêtes des tiges de ces céréales
pour commémorer le don qu’elle avait fait aux hommes. Les Egyptiens, quand ils
coupaient les premières tiges, les posaient sur le sol et se frappaient la
poitrine en se lamentant et en invoquant Isis. On a déjà expliqué cet usage,
continue Frazer, comme une lamentation en l’honneur de l’esprit [ancien] du
blé, tombé sous la faucille. »
Les solutions :
On connaît
la solution de Gobekli ou de Minorque aux Baléares: placer sur le fût du
menhir une dalle symbolisant le blé mort, en attente de sa germination. De même à Stonehenge ou à
Durrington .
L’évolution
des menhirs depuis Gobek-li jusqu’à
l’Eure-et-Loir et la Grande-Bretagne : les menhirs en forme de
marteau se joignant dans des cercles ou crom-lechs et se divisant en leurs deux parties , le manche et
le linteau.
La forme primitive du menhir telle qu’elle apparaît à Gôbekli ou à Malte et
à Gozo,il y a quelque 12000 ans, était celle d’un fût surmonté d’une dalle
horizontale. On la retrouve notamment aux Baléares, à Minorque.Une structure
circulaire lui est très tôt associée.
A Göbekli Tepe, vers 9600
avant J. -C, on a déjà des enclos
circulaires de « menhirs » en
tau , surmontés d’ une pierre horizontale dépassant de chaque côté, qui
symbolise par son horizontalité le dieu
du grain mort afin de renaître,
Sabazios ou Zagreus. Un cas d’évolution sémantique surprenant nous est donné
par le latin populaire tutaree, protéger, conserver, mettre (le grain (sous terre à l’abri des rongeurs et des oiseaux)
,enterrer (le blé), verbe qui , en
français, a donné tuer au sens de faire mourir et a laissé l’étonnant doublet tuteur
et tueur.. .A Göbekli, Tepe, il s’agit
d’un « cromlech » où les menhirs en tau, juxtaposés, sont
prêts de se rejoindre comme ils le feront plus tard, vers -2800,
à Stonehenge. Le second élément de Stone
-henge est, d’après
Christopher Chippindale, dans son Stonehenge
Complete , un mot signifiant potence,
gibet, savoir en vieil anglais hen
(c) en, plus tard rapproché à tort
dans l’esprit populaire du nom courant
du dolmen, stone hung, pierre suspendue. Hengen
doit être rattaché au grec phalang-
qui, à l’origine, signifiait poutre, cf vieux- hau- allemand balcho, poutre, tronc, bois , rangée
d’arbres , et en grec même, l’alignement, (que ce soit de
gibets ou de menhirs en marteau disposés en cercle) la ligne droite ou
circulaire. Son application aux lignes circulaires se retrouvedans le sens de
fil ou de toile d’araignée, grec arâchnion, de arak’snion, de pharakn- latin araneum, puis d’araignée venimeuse en grec, cf. latin arânea , grec arâchnè, qui dérivent de phalang-.En
tout cas, c’était le nom de ces
curieux linteaux comparables à ceux de
Göbekli Tepe et analogues au tau égyptien, symboles de mort surmontée, de
résurrection et de vie, qu’on retrouve à Malte en -5000.
A moins de 3 kilomètres de Stonehenge, sous le sol, à 1
mètre de profondeur, on vient de découvrir
un autre site, celui de
Durrington , de the hengen stone, , riche de 200 menhirs en cercle
et antérieur, pense-t-on, au cercle de « pierre de sarsen » avec ses
30 linteaux et 30 monolithes, daté de
-4500.
La disposition en
cercle des menhirs est peut-être inspirée
des ces « ronds de
sorcières » qui, en une nuit, apparaissent soudain sur les prairies et
donnent une preuve de la fécondité de la
nature ; ils sont composés de champignons souvent comestibles, mais
l’imagination populaire, stupéfaite devant la régularité du cercle et la
soudaineté de son apparition, y voit l’œuvre de forces souterraines.
Quel
était le but de cette disposition circulaire qui apparaît dès l’origine, à
Gobek-li ? Il s’agissait de représenter
le cycle de la mort du grain, de sa
germination et de sa mort à nouveau, sans solution de continuité.
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