vendredi 10 août 2018

LES SUPER-MENHIRS A DEUX PIEDS ET LEUR EVOLUTION, JUSQU’AUX PIERRES-LYRES D’AFRIQUE.


 LES SUPER-MENHIRS A DEUX PIEDS ET LEUR EVOLUTION, JUSQU’AUX PIERRES-LYRES D’AFRIQUE.

Je ne désire pas répéter ce que j’ai dit dans d’autres blogs sur l’évolution des menhirs depuis Göbekli en Turquie il y a12000 ans (les menhirs en marteau d’une seule pièce , où la dalle qui les surmonte représente la mort préalable du grain, nécessaire à sa germination selon les croyances de l’époque, ainsi que sur les taula , mot venant de stewola , grec steola, mot désignant (les menhirs en) manches de marteau , en deux pièces,  ,de Minorque aux Baléares.J e désire ici étudier l’évolution particulière de ces menhirs archaïques jusqu’aux trilithes et aux menhirs jumelés pus récents et aux dilithes et aux pierres –lyres , où le problème est celui de la représentation de la mort  préalable du grain autrement que par la dalle horizontale surmontant les menhirs archaîques.

Des trilithes aux menhirs jumelés et aux dilithes.
J’appelle trilithe, comme mes lecteurs le savent, les mégalithes composés de trois pierres  que certains appellent à tort des dolmens , et dilithes, les mégalithes composés de deux pierres, ceux que d’aucuns appellent des demi- dolmens comme les Palets de Gargantua. Dans les trilithes, la mort du grain est encore représentée par la dalle horizontale, mais une importante évolution s’amorce, notamment à Minorque : pour améliorer le rendement magique de la pierre dressée, les
deux pieds du menhir , au lieu d’un seul , figurent  deux touffes de céréales , d’orge le plus souvent, dont les créateurs ibères des menhirs souhaitent la germination . Mais ceci va bientôt changer avec les menhirs jumelés.
1) L’Irlande est le pays par excellence des trilithes, comme,  près de Dundalk, celui de Proleek , de lech, pierre, et porcus, dieu de la mort du blé , dieu latino- étrusque Orcus.  .En France, je citerai comme trilithes , à Saint- Nazaire , ancienne Corbilo, de Gorgobina, déesse des moissons qui s’incarne en une grande Jument blanche, le Grand « Dolmen » trilithique et , dans le voisinage, à Saint –André -des-Eaux,  le prétendu  dolmen d’Avrillac , du nom également de la déesse Gorgobina,  de (g) avrinak (de [k]abarni , avec métathèse religieuse du k initial et r voyelle , abrinak,  à rapprocher des noms de  Gavrinis et de Gavarni  et du trilithe corse de Arghiola  (même radical que Avrillac) dans le Sartenais et du  nom d’Argalo à Niola en Galice transféré à  une allée couverte. Citons encore le trilithe de Brantôme en Dordogne .
A Minorque, il existe des taulas à deux pieds qui sont des trilithes et  dont le 2e pied symbolise, non pas le blé mort (toujours représenté par la dalle horizontale), mais une deuxième pousse d’orge, car comme le disait le Christ, si le grain ne meurt d’abord, il ne donne pas plusieurs fruit, mais s’il meurt, il donne plusieurs fruits. Et même, pour la taula Talati  de Dalt, on a un 2e pied qui, sous le poids d’un grain énorme figuré par une grosse pierre ronde, est penché. Citons encore une taula Truncada qui est encore un trilithe, mais qui est peut-être le point de départ de l’évolution qui mènera aux futurs menhirs jumelés et aux menhirs à deux pieds ou dilithes du centre de la France. En effet, les deux pieds du menhir sont très rapprochés l’un de l’autre.


2) Les menhirs jumelés.
 A côté de ce  2e pied du trilithe symbolisant la  touffe de céréale supplémentaire,  avec encore sa dalle supérieure faisant allusion à  la mort, existe une autres solution : le jumelage avec un second menhir éloigné de quelque trois mètres du premier .Malgré les apparences, la symbolique n’est pas la même que celle des trilithes, car le second menhir est indépendant du premier qui seul représente le germination espérée du grain et ce second menhir est  chargé de représenter la mort préalable du grain à travers la déesse Perséphone, épouse du dieu des morts.. On en a un exemple dans le Tarn, à Lacabarède, Les deux sœurs,. « On trouve parfois, écrit F. Niel dans Dolmens et menhirs, 1977, P. U. F., collection  Que Sais-je ?  des menhirs jumelés, tels ceux de Penrhos Feilw  (île d’Anglesey, pays de Galles), de Cambrai, « Jean et Jeanne de Runello » à Belle-Isle , les « Causeurs » de l’île de Sein, ou les Pierres jumelles de Mont –Saint -Eloi (Pas-de-Calais) » .
Causeurs de l'île de Sein.jpg 

Menhirs jumelés, Les causeurs, de l’île de Sein. Le second menhir symbolise la mort préalable  du grain, nécessaire à sa germination, soit la déesse Perséphone ou Proserpine (gaulois Gorgobina) dont la jument est l’avatar.  Le sommet de ce second menhir accentue cette allusion à la mort en rappelant les menhirs en marteau primitifs de Göbek-li et de Minorque.  Le premier menhir est dédié à Cérès ou Dèmètèr.




A Bonneval,  dans sa brochure Bonneval sur le Loir, Sidoisne , p. 50, localise les deux menhirs de l’Isle  qui  sont situés à moins de 3 mètres environ l’un de l’autre, ou plutôt qui étaient ainsi situés, car l’un d’eux a été renversé . « Ferme de Lormorice…  On arrive au bois de l’Isle (300 m.) ; on laisse à gauche, dans la pâture, un petit menhir,  et, entrant dans le bois, on aperçoit bientôt à gauche une clairière où se dresse un beau menhir ; à quelques mètres à gauche, perdu dans les ronces, autre menhir, mais renversé. »Pourquoi l’un des deux menhirs  a –t-il été volontairement renversé ? Il existait une superstition selon laquelle, un jour, les deux menhirs se rejoindraient, amenant  alors la fin du monde. Pour éviter cette éventualité terrible, des esprits superstitieux préférèrent prévenir l’événement en renversant le menhir associé à la mort du blé.  
3) Les derniers menhirs, les plus récents : les dilithes ou palets de Gargantua du Centre de la France, les  lapa Gargantuanos de Moraña en Galice (lapa étant la métathèse de pala(tos), « palets) », ou la disparition de la référence à la mort ^préalable du grain.   
Comment augmenter le rendement de céréales espéré.
Dès l’origine, à Göbek-li en Turquie, l’efficacité des menhirs laissait peut-être à désirer.  Pour tenter d’augmenter le rendement des récoltes attendues, les chamans imaginèrent de faire reproduire dans le calcaire deux  pousses d’orge, imitant les deux grains propres à l’escourgeon ou orge sauvage , au lieu du grain unique de l’engrain . Avec la représentation de  ces deux pousses au lieu d’une seule, donc de deux pieds  pour le menhir,  on espérait de la magie imitative qu’elle aboutirait à la germination de plusieurs touffes. Mais surtout la croyance à la mort préalable du grain pour une bonne germination a dû s’émousser, si bien que toute référence expresse  à la mort du grain , comme la dalle summitale disparaît : on estime qu’elle n’est pas efficace et ne répond à rien. C’est ainsi que s’expliquent de nombreux menhirs d’Eure-et-Loir, en particulier les « palets de Gargantua ».
  Même avec beaucoup d’imagination, on ne peut concevoir comment les fûts droits  de tels menhirs, de forme plutôt conique ,  pourraient être des  palets , c’est-à-dire des   pierres circulaires et plates, destinées à être  envoyée près d’un but.  Palet recouvre  bien évidemment quelque chose d’autre, comme le prouve le nom des  lapa de Gargantuanos de Moraña en Galice (lapa étant la métathèse de pala(ti ou , au cas régime,- tos), « palet », comme Talati à Minorque , où le t initial est l’assimilation du p de  palati ). On remarque au passage  l’expansion de la divinité  Gargantua, équivalent de Gorgobina et de Cérès,   dans tout le domaine celtique, la Galicie étant, comme son nom l’indique, une terre gauloise.
Etymologie de ce curieuxmot palet.
 La balance à deux plateaux, dont l’un plus bas que l’autre, se dit plastika en grec, lanx en latin,  et le mot balance  vient de palancia , qui aurait donné en latin populaire bilancia, compris comme à deux (bi-) plateaux (lanx) .Mais plastika vient de plastigka, de phalank-s , génitif phalank-os,comme lanx vient, par apocope, de (pha)lanks . Pour ce qui nous concerne ici, le mot palet, vient de p°la(s)t(ika), qui donne pelat, puis,  en français,  par métathèse vocalique  palet et en espagnol, soit en Galice  palatos  pris pour un accusatif masculin pluriel et devenu lapa(tos)  Gargantuanos, soit à Minorque talati de palati de Dalt (de Gargoduina,  gwal[go]t[uina], dalt).  Citons encore , dans le Tarn, à Alban,  le Palet du Diable (où diable est la corruption de dalt); citons aussi aux Baléares  la taula Trencada de Minorque, dont le nom est l’évolution phonétique du  grec trutanè, latin trutina, désignant une balance à deux plateaux avec l’un plus bas que l’autre, par allusion aux deux pieds du menhir qui se chevauchent et ne sont pas à la même hauteur  dans le cas des palets de Gargantua et donnant par métathèse trunata,   puis  corrompue par incompréhension en truncada, tronquée) et la taula de Talati de Dalt.
Le lien entre les menhirs français et les taulas de Minorque est ici avéré : un second pied qui symbolise une 2e pousse d’orge vient assurer la stabilité de la dalle horizontale. Cet apport de stabilité, en même temps que la disparition de la croyance à la nécessité de  la mort préalable du grain , telles sont peut-être les raisons pour laquelle le procédé a tendu à se répandre et à  supplanter  la taula à pied unique.
Les « palets de Gargantua » du Centre de la France  sont composés de deux dalles :  l’une , inclinée , représente  l’orge penchée sous le poids des épis ou plutôt des tiges porteuses de  grains d’escourgeon (eux-mêmes étant éventuellement  figurés par une pierre ronde,  comme à Minorque dans le cas du menhir de Talati de Dalt) ; elle  repose sur l’autre restée droite , peu visible et écrasée sous son poids , comme le mégalithe de la Pierre à Gargantua, près de Fontenay- sur- Conie , ou bien le «  palet de  Gargantua » de  Chamizay en Indre -et- Loire sur la photo ci-dessous.  
Image illustrative de l'article Palets de Gargantua  

4) Les  pierres- lyres, ou pierres en H  en Turquie comme les appelle K. Schmidt.
 La lyre est inconnue dans Homère. Le mot lura désigne d’abord une ligne droite , un sillon, une corde de lyre ; puis par analogie avec la lyre,   une pierre trouée, avec deux demi-cercles  enserrant le trou (celui-ci représentant la mort préalable du blé et étant l’héritier de la dalle horizontale de Göbekli)  les demi-cercles représentant les deux pousses de céréales souhaitées, Sur la cinquantaine de pierres- lyre qu’on a répertoriées, celle qui a été  transportée au Musée Branly et qui vient du Sénégal  et celle que Schmidt appelle pierre en H à Gobekli ont des   formes identiques.   On trouve aussi, en liaison avec d‘autres  menhirs, une  « pierre- lyre » au nord de l’Ecosse,  dans les Orcades. Si ce menhir curieux ne détone pas en Turquie, il y a 12000 ans  ni aux îles Orkades au nord de l’Angleterre (voir mon blog sur le palais de Circé retrouvé), en revanche les pierres-lyres africaines, au Sénégal en particulier, étonnent : ils portent la trace d’une migration ibère jusqu’en Afrique subsaharienne. Les Berbères seraient alors l’altération de ouigour ou ibère, comme le mot kabyle, de kaboul, de kwagour.
5) Les menhirs avec un  trou médian. Menhirs troués au nord-ouest du Pays de Galles, comme celui de Llech (en gallois, pierre )  Gronw ou Ronw, et comme le menhir des Arabes ou Pierre Percée , près Sainte-Maure (Indre –et- Loire)
Ils rentrent dans la catégorie précédente, en plus fruste.








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