LES
SUPER-MENHIRS A DEUX PIEDS ET LEUR EVOLUTION, JUSQU’AUX PIERRES-LYRES
D’AFRIQUE.
Je ne désire pas répéter ce
que j’ai dit dans d’autres blogs sur l’évolution des menhirs depuis Göbekli en
Turquie il y a12000 ans (les menhirs en marteau d’une seule pièce , où la dalle
qui les surmonte représente la mort préalable du grain, nécessaire à sa
germination selon les croyances de l’époque, ainsi que sur les taula , mot venant de stewola , grec steola, mot désignant (les menhirs en) manches de marteau , en deux pièces, ,de Minorque aux Baléares.J e désire ici
étudier l’évolution particulière de ces menhirs
archaïques jusqu’aux trilithes et aux menhirs jumelés pus récents et aux
dilithes et aux pierres –lyres , où le problème est celui de la représentation
de la mort préalable du grain autrement
que par la dalle horizontale surmontant les menhirs archaîques.
Des trilithes aux menhirs jumelés et
aux dilithes.
J’appelle trilithe, comme mes lecteurs le savent,
les mégalithes composés de trois pierres
que certains appellent à tort des dolmens
, et dilithes, les mégalithes
composés de deux pierres, ceux que d’aucuns appellent des demi- dolmens comme les Palets
de Gargantua. Dans les
trilithes, la mort du grain est encore représentée par la dalle horizontale,
mais une importante évolution s’amorce,
notamment à Minorque : pour améliorer le rendement magique de la pierre
dressée, les
deux pieds
du menhir , au lieu d’un seul , figurent deux touffes de céréales , d’orge le plus
souvent, dont les créateurs ibères des menhirs souhaitent la germination .
Mais ceci va bientôt changer avec les menhirs jumelés.
1) L’Irlande est le pays par excellence des trilithes, comme, près de Dundalk, celui de
Proleek , de lech, pierre, et porcus, dieu de la mort du blé , dieu latino- étrusque Orcus. .En France, je citerai comme trilithes , à
Saint- Nazaire , ancienne Corbilo,
de Gorgobina, déesse des moissons qui
s’incarne en une grande Jument blanche, le
Grand « Dolmen » trilithique et , dans le voisinage, à Saint –André
-des-Eaux, le prétendu dolmen d’Avrillac , du nom également de
la déesse Gorgobina, de (g)
avrinak (de [k]abarni , avec
métathèse religieuse du k initial et r voyelle , abrinak, à rapprocher des
noms de Gavrinis et de Gavarni et
du trilithe corse de Arghiola (même radical que Avrillac) dans le
Sartenais et du nom d’Argalo
à Niola en Galice transféré à une
allée couverte. Citons encore le
trilithe de Brantôme en Dordogne .
A Minorque, il existe des taulas à deux pieds qui sont
des trilithes et dont le 2e
pied symbolise, non pas le blé mort (toujours représenté par la dalle
horizontale), mais une deuxième pousse d’orge, car comme le disait le Christ,
si le grain ne meurt d’abord, il ne donne pas plusieurs fruit, mais s’il meurt, il donne plusieurs fruits. Et
même, pour la taula Talati de Dalt, on a un 2e pied qui,
sous le poids d’un grain énorme figuré par une grosse pierre ronde, est penché.
Citons encore une taula Truncada qui
est encore un trilithe, mais qui est peut-être le point de départ de
l’évolution qui mènera aux futurs menhirs jumelés et aux menhirs à deux pieds ou
dilithes du centre de la France. En effet, les deux pieds du menhir sont très
rapprochés l’un de l’autre.
2) Les menhirs jumelés.
A côté de ce
2e pied du trilithe symbolisant la touffe de céréale supplémentaire, avec encore sa dalle supérieure faisant
allusion à la mort, existe une autres
solution : le jumelage avec un second menhir éloigné de quelque trois
mètres du premier .Malgré les apparences, la symbolique n’est pas la même que
celle des trilithes, car le second menhir est indépendant du premier qui seul
représente le germination espérée du grain et ce second menhir est chargé de représenter la mort préalable du
grain à travers la déesse Perséphone, épouse du dieu des morts.. On en a un
exemple dans le Tarn, à Lacabarède, Les deux sœurs,. « On trouve
parfois, écrit F. Niel dans Dolmens et
menhirs, 1977, P. U. F., collection
Que Sais-je ? des menhirs
jumelés, tels ceux de Penrhos Feilw (île
d’Anglesey, pays de Galles), de Cambrai, « Jean et Jeanne de Runello » à Belle-Isle , les « Causeurs » de l’île de Sein, ou les
Pierres jumelles de Mont –Saint -Eloi
(Pas-de-Calais) » .
Menhirs
jumelés, Les causeurs, de l’île de
Sein. Le second menhir symbolise la mort préalable du grain, nécessaire à sa germination, soit
la déesse Perséphone ou Proserpine (gaulois Gorgobina) dont la jument est
l’avatar. Le sommet de ce second menhir
accentue cette allusion à la mort en rappelant les menhirs en marteau primitifs
de Göbek-li et de Minorque. Le premier menhir est dédié à Cérès ou Dèmètèr.
A
Bonneval, dans sa brochure Bonneval sur le Loir, Sidoisne , p. 50,
localise les deux menhirs de l’Isle
qui sont situés à moins de 3
mètres environ l’un de l’autre, ou plutôt qui étaient ainsi situés, car l’un
d’eux a été renversé . « Ferme de Lormorice… On arrive au bois de l’Isle (300 m.) ;
on laisse à gauche, dans la pâture, un petit menhir, et, entrant dans le bois, on aperçoit bientôt
à gauche une clairière où se dresse un beau menhir ; à quelques mètres à
gauche, perdu dans les ronces, autre menhir,
mais renversé. »Pourquoi l’un des deux menhirs a –t-il été volontairement
renversé ? Il existait une superstition selon laquelle, un jour, les
deux menhirs se rejoindraient, amenant
alors la fin du monde. Pour éviter cette éventualité terrible, des
esprits superstitieux préférèrent prévenir l’événement en renversant le menhir
associé à la mort du blé.
3) Les derniers
menhirs, les plus récents : les dilithes ou palets de Gargantua du Centre de la France, les lapa Gargantuanos de Moraña en Galice (lapa étant la métathèse de pala(tos), « palets) », ou la
disparition de la référence à la mort ^préalable du grain.
Comment
augmenter le rendement de céréales espéré.
Dès l’origine, à Göbek-li en Turquie,
l’efficacité des menhirs laissait peut-être à désirer. Pour tenter d’augmenter le rendement des
récoltes attendues, les chamans imaginèrent de faire reproduire dans le
calcaire deux pousses d’orge, imitant
les deux grains propres à l’escourgeon ou orge sauvage , au lieu du grain
unique de l’engrain . Avec la représentation de
ces deux pousses au lieu d’une seule, donc de deux pieds pour le menhir, on espérait de la magie imitative qu’elle
aboutirait à la germination de plusieurs touffes. Mais surtout la croyance à la
mort préalable du grain pour une bonne germination a dû s’émousser, si bien que
toute référence expresse à la mort du
grain , comme la dalle summitale disparaît : on estime qu’elle n’est pas
efficace et ne répond à rien. C’est ainsi que s’expliquent de nombreux menhirs
d’Eure-et-Loir, en particulier les « palets
de Gargantua ».
Même avec beaucoup d’imagination,
on ne peut concevoir comment les fûts droits
de tels menhirs, de forme plutôt conique , pourraient être des palets , c’est-à-dire
des pierres circulaires et plates,
destinées à être envoyée près d’un
but. Palet
recouvre bien évidemment quelque chose
d’autre, comme le prouve le nom des lapa
de Gargantuanos de Moraña en
Galice (lapa étant la métathèse
de pala(ti ou , au cas
régime,- tos), « palet », comme Talati
à Minorque , où le t initial est
l’assimilation du p de palati
). On remarque au passage l’expansion de la divinité Gargantua, équivalent de Gorgobina et de
Cérès, dans tout le domaine celtique,
la Galicie étant, comme son nom l’indique, une terre gauloise.
Etymologie de ce curieuxmot palet.
La balance à deux plateaux, dont l’un plus bas que
l’autre, se dit plastika en grec, lanx en
latin, et le
mot balance vient de palancia , qui aurait donné en latin
populaire bilancia, compris comme à
deux (bi-) plateaux (lanx) .Mais plastika vient de plastigka,
de phalank-s , génitif phalank-os,comme lanx vient, par apocope, de (pha)lanks .
Pour ce qui nous concerne ici, le mot palet,
vient de p°la(s)t(ika), qui donne pelat, puis, en français,
par métathèse vocalique palet et en espagnol, soit en Galice palatos
pris pour un accusatif masculin
pluriel et devenu lapa(tos) Gargantuanos, soit à Minorque talati de palati de Dalt (de Gargoduina, gwal[go]t[uina],
dalt). Citons encore , dans le Tarn,
à Alban, le Palet du Diable (où diable
est la corruption de dalt); citons
aussi aux Baléares la taula Trencada de Minorque, dont le nom est l’évolution phonétique
du grec trutanè, latin trutina,
désignant une balance à deux plateaux avec l’un plus bas que l’autre, par
allusion aux deux pieds du menhir qui se chevauchent et ne sont pas à la même
hauteur dans le cas des palets de
Gargantua et donnant par métathèse
trunata, puis corrompue par incompréhension en truncada, tronquée) et la taula de Talati de Dalt.
Le lien entre les menhirs français
et les taulas de Minorque est ici
avéré : un second pied qui symbolise une 2e pousse d’orge vient
assurer la stabilité de la dalle horizontale. Cet apport de stabilité, en même
temps que la disparition de la croyance à la nécessité de la mort préalable du grain , telles sont
peut-être les raisons pour laquelle le procédé a tendu à se répandre et à supplanter la taula
à pied unique.
Les « palets de Gargantua » du Centre de
la France sont composés de deux dalles : l’une , inclinée , représente l’orge penchée sous le poids des épis ou
plutôt des tiges porteuses de grains
d’escourgeon (eux-mêmes étant éventuellement
figurés par une pierre ronde,
comme à Minorque dans le cas du menhir de Talati de Dalt) ;
elle repose sur l’autre restée droite ,
peu visible et écrasée sous son poids , comme le mégalithe de la Pierre à Gargantua, près de Fontenay-
sur- Conie , ou bien le « palet
de Gargantua » de Chamizay en Indre -et- Loire sur
la photo ci-dessous.
4) Les pierres- lyres, ou pierres en H en Turquie comme les appelle K. Schmidt.
La lyre est inconnue dans Homère. Le mot lura désigne d’abord une ligne droite ,
un sillon, une corde de lyre ; puis par analogie avec la lyre, une
pierre trouée, avec deux demi-cercles
enserrant le trou (celui-ci représentant la mort préalable du blé et
étant l’héritier de la dalle horizontale de Göbekli) les demi-cercles représentant les deux
pousses de céréales souhaitées, Sur la cinquantaine de pierres- lyre qu’on a répertoriées, celle qui a été
transportée au Musée Branly et qui vient du Sénégal et celle que Schmidt appelle pierre en H à Gobekli ont des formes identiques. On trouve aussi, en liaison avec
d‘autres menhirs, une « pierre- lyre » au nord de l’Ecosse, dans les Orcades. Si ce menhir curieux ne
détone pas en Turquie, il y a 12000 ans
ni aux îles Orkades au nord de l’Angleterre (voir mon blog sur le palais
de Circé retrouvé), en revanche les pierres-lyres africaines, au Sénégal en particulier,
étonnent : ils portent la trace d’une migration ibère jusqu’en Afrique
subsaharienne. Les Berbères seraient
alors l’altération de ouigour ou ibère, comme le mot kabyle, de kaboul, de kwagour.
5) Les menhirs avec un trou médian. Menhirs troués au nord-ouest du Pays
de Galles, comme celui de Llech (en
gallois, pierre ) Gronw ou Ronw, et comme le menhir des
Arabes ou Pierre Percée , près Sainte-Maure
(Indre –et- Loire)
Ils
rentrent dans la catégorie précédente, en plus fruste.
.
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