DU NOUVEAU
SUR LES MEGAITHES DE CHANGE : ESSAI D’INTERPRETATION DE LEURS FONCTIONS
RESPECTIVES ET DE LEURS NOMS, AINSI QUE
DU ROLE DE GARGANTUA EN BEAUCE
Le nom d’un dolmen de Changé (Saint-Piat), le Berceau, c’est-à-dire selon Littré
« le lit des enfants à la
mamelle » et par suite le lieu où
l’on est « né », où l ’existence sociale a commencé, nous interpelle sur la fonction
de certains dolmens,réputés être des maisons
pour nains , pour « korrigans »,
c’est-à-dire des nains, en Bretagne,des hommes qui ne seront des hommes faits,
des « vrais hommes »
qu’après leur initiation secrète dans les dolmens . Vérifions si d’autres
noms de dolmens en Eure-et-Loir
confirment notre interprétation du dolmen comme lieu d’initiation, étant
précisé qu’après l’ère néolithique, à l’âge de bronze, une époque où
l’initiation n’était plus pratiquée , le
mégalithe a pu être réutilisé comme
sépulcre .
Illustration
éventuelle du dolmen du Berceau.
Les noms de certains dolmens
1 Le nom de La puce qui renifle à
Fontenay –sur- Conie, vient ,
avec changement de genre par incompréhension, de puticellus, le pucel, le jeune garçon de moins de 17 ans, qui pleure par peur avant de subir la
terrifiante initiation et ce nom
constitue une référence à la vocation des dolmens : l’initiation des jeunes gens.
2 Le nom du dolmen
du Corbeau, près de
Doué-la-Fontaine, commune de Louresse -Rochemenier, dans le Maine -et- Loire ; est de même nature. Il vient
d’un radical apparenté au grec kouros,
adolescent , de korv_os,
correspondant en latin au diminutif corb-ellus, petit jeune homme. On
retrouve le même nom dans l’Odyssée, XII, 407, la
pierre du « corbeau », korakos lithos, adjectif à rattacher à kouros, jeune homme, le dolmen des
jeunes gens : c’est le plus ancien nom de
dolmen que nous connaissions grâce
à Homère.
3 Le nom du Puy aux Ladres est intéressant parce qu’il révèle le souvenir que
ce type de monument s’adressait à des jeunes qui n’étaient pas encore initiés.
Ce nom est, en effet, l’altération de puy (podium,
au sens de tribune, estrade,lieu d’ apparition en public ) aux jadres (du latin juniores, garçons trop jeunes, candidats à l’initiation, cf le
nom , en ancien français, de gindre,
le plus jeune ouvrier boulanger qui pétrit la pâte). Il est celui d’un dolmen à
Bonneval.
Dans
la commune de Châtillon –en- Dunois subsiste, christianisé, le nom de Saint -Ladres (au pluriel) qui fait référence
à un dolmen disparu
La fonction primitive de
ces dolmens : des lieux
d’initiation à la date du solstice d’hiver comme les autres dolmens, et non des
tombes collectives pour les chefs.
Le
dolmen immergé de la Conie ne saurait avoir été un lieu d’inhumation , ni
individuelle, ni collective, puisqu’il
est inondable. Il ne pouvait
naturellement pas être enterré et ne
possédait donc pas de tumulus, qu’il s’agisse de terre formant tertre ou de
cailloux comme dans le cas des cairns On
peut supposer que le sol y avait été surhaussé, de façon à obliger les
néophytes à se baisser en n’ayant que la tête hors de l’eau, leur tête étant prise entre l’eau et la face
inférieure de la dalle de couverture du dolmen. La date des fêtes nous est
livrée par le nom des nombreux dolmens
appelés Jolimont dans le nord de la France,
composé de -mont, du francique mound, ensemble de pierres, et de Joli,
du scandinave jôl, nouvelle année,
solstice d’hiver du 21 décembre avec les
débordements qui l’accompagnaient.
La « hauteur sous
plafond » du dolmen immergé de la Conie, à Péronville, appelé la
pierre Saint-Marc.
Max
Gilbert , dans Pierres mégalithiques
(menhirs et dolmens) en Normandie, Guernsey Press, Guernesey, 1956, p 144), fait
remarquer que l’entrée des dolmens normands est trop petite pour permettre
le passage aisé d’un homme : « Sous les dolmens de Martinvast et de
Flamantville , [à supposer aux dolmens une fonction d’inhumation, ce que ne
fait d’ailleurs pas Max Gilbert ] on ne pourrait mettre qu’un
homme enterré assis ou les jambes pliées […] Pour le dolmen de Mortain, seul un lapin pourrait maintenant se glisser
sous la dalle inférieure ; sous les dolmens de la Grandière à Joué- les-
Bois et du Faldouet à Jersey, un homme pourrait se tenir debout en inclinant la
tête, mais ne pourrait y évoluer ni y vivre. Dans la plupart des allées
couvertes, un enfant ne pourrait pas se tenir debout, mais seulement entrer à
genoux ». Ainsi, il s’agissait de
contraindre les candidats à
l’initiation à se baisser et à marcher à
quatre pattes comme des bébés.
Penchons-nous maintenant
sur les menhirs en général avant d’examiner le nom de celui de Changé, le But de Gargantua.
Illustration :
le menhir du But de Gargantua.
A quelle intention ,
d’abord, répondaient les menhirs? La
fonction première du menhir : c’est un catalyseur magique de la percée
végétative.
James
George Frazer, dans Le Rameau d’or, Balder le Magnifique, Ed. Robert Laffont,
collection Bouquins, Paris, 1984, 4 vol., vol .4, p. 98, donne cet exemple : « Dans
plusieurs parties de la Bavière, on pensait que la hauteur des tiges de lin dépendrait de celle des sauts des jeunes
gens. » A Vanuatu, sur l’île Pentecôte, le spectaculaire saut du gaul (mot qui signifie plongeoir, -une
corde à grande hauteur ), qui est toujours pratiqué malgré les
accidents mortels et qui consiste à
sauter du point le plus haut, est censé faire pousser les tubercules des
ignames d’autant plus profondément que le saut aura été accompli du plongeoir le
plus haut. En Nouvelle-Calédonie existaient aussi de précieuse pierres à ignames , sur
lesquelles les sorciers canaques faisaient leurs conjurations secrètes. Ces pierres à ignames étaient
les équivalents en miniature de ces
pierres pour les céréales :
orge, blé, seigle ou sésame qu’étaient les menhirs. Dans le nord de la Nouvelle-Calédonie,
à Arama, il existe une quarantaine
de petits menhirs dépassant du sol de 60 cm environ : ils sont censés favoriser
magiquement la croissance des cocotiers.
On retrouve en France des restes analogues de cette superstition.
Nos épis de faîtage au nom symbolique reposaient sur la même croyance que,
grâce à ces talismans placés en hauteur
les récoltes croîtraient aussi haut que
ces ornements. L’érection d’un menhir avait ainsi pour but de mimer analogiquement la
pousse de l’orge ou de quelque autre céréale, de la stimuler et de la favoriser par magie
imitative. Frazer, op. cit, vol. III, Esprits
des blés et des bois, p. 26, écrit
du « Dionysos de l’arbre »
que « son image n’était souvent qu’un poteau planté en terre, sans bras
», imitant très grossièrement
l’arbre fruitier , ici le cep de vigne, qu’il s’agissait de faire
pousser par sympathie.
Le
nom des menhirs est d’ailleurs révélateur de cette destination de fécondité agraire. Ainsi, grâce à l’auteur latin d’un Traité
d’agriculture, Res rusticae (I, 48,3). Varron au Ier siècle avant J.- C, nous avons conservé le nom non latin ,
indéclinable, de l’épi sans sa balle, frit. La Pierre Frite, avec ou sans
le suffixe –ske marquant le commencement, était la pierre en forme d’épi naissant, et
elle a donné en Eure-et-Loir :
-les
noms de la Pierre –Xi--Frite (Xi
, de axis, pieu , et de
frit , soit la pierre- pieu en
forme d’épi), nom d’un menhir ,
transféré par la suite à un dolmen de Boulay- Thierry près de
Nogent-le-Roi ;
-ainsi
que Saint
-Jean- Pierre- Fixte (métathèse
de fit-ske, fikste) près de Nogent-le-Rotrou ;
-
la Pierre
Fiche, de fit + suffixe -ske à Alluyes.
Ailleurs, on a la Pierre
Fite, Peyrefitte. On trouve aussi ce
mot en Alsace dans le nom du menhir de Breitstein, de frit -stone, la pierre -épi, ou en Moselle, à Marty,
dans le nom de Frescaty, de frit-sk, -aty provenant du
suffixe de ressemblance basque –ada, –eida
ou –eita, soit la pierre qui
ressemble à une pointe d’ épi .Nous avons le même nom à Toulouse, à l’hôtel
Assézat (Musée Saint- Raymond) , avec le
menhir de Frescaty qui y a été transféré depuis Lacaune.
Songeons aussi
au nom de l’Afrique (le latin Africa désigne la seule Tunisie actuelle, qui est
précisément une région riche en
mégalithes), de fritsk-a, avec coup de
glotte initial rendu par un a. Le nom
est christianisé au masculin à Saint-
Affrique près de Millau, ou encore à
Saint-Affrique -du- Causse
à Gabriac dans l’Aveyron, et, dans le Tarn, à Saint-Affrique –les- Montagnes. Pour la Corse, il n’est
que d’invoquer le site préhistorique de Filitosa
(du collectif ibèro-basque frit-oda, les pierres qui ressemblent à
des épis), nom qui donne aussi Frileuse en Eure-et-Loir, dans la
commune de Péronville ou dans celle d’Orgères-en-Beauce ; pour la Sardaigne, Filigosa , de fri(ts)k
-oda; pour la Corse encore, la Petra Frisgada (de frit- sk-ada) , la pierre qui ressemble à une pointe
d’
épi, dans la commune de Cambia ; pour les Pays-Bas, le toponyme de Frisia (de frit-sk-ia),ou Frise
.Dans l’Antiquité, le nom de la Phrygie,
de frit-skya en a gardé le
souvenir.
Mais les
menhirs peuvent aussi porter fréquemment un nom de mesure de capacité du grain, car ces noms de mesure de capacité du grain de
semence, précédés ou non de grand, ont été souvent attribués aux menhirs pour
l’abondante récolte qu’on escomptait de leur efficacité magique: ce sont le grand Muid, du latin modius, un boisseau plus grand, que le
boisseau ordinaire, à Villiers- Saint -Orien, le Boisseau (petit menhir
du près de Ver- lès- Chartres), le
grand et le petit Bussard (au sens de tonneau, - deux menhirs disparus à Saint-Denis- les-
Ponts), la Bure, au
sens d’aiguière à col allongé, nom de menhir transféré à un dolmen de Corancez ;et ,
comme pour le menhir de Changé , bot
qui désigne grosse barrique à sommet plat utilisée pour le
vin , avec ajout explicatif , pour insister sur sa taille , du nom du
géant Gargantua .
Ce
nom bot n’étant plus compris est
altéré en but ou en quille, puis, à cause de l’homonymie
avec bot au sens de crapaud, en pierre
aux bouts (au sens de crapauds), puis en pierre aux grenouilles à Alluyes ou encore en La
Grenouille ou La Grenouillère comme à Changé. Tel est le secret du nom du
menhir de Changé, le But de Gargantua.
Du nouveau
sur l’évolution historique de la forme des
menhirs grâce aux fouilles de l’archéologueallemand Klaus Schmidt à Göbekli en Turquie et à son
livre, Le premier temple (2015).
De
1995 à sa mort en 2014, l’Allemand Klaus Schmidt a exécuté les fouilles de Göbek-li en Turquie
et il a fourni le récit de ses
recherches dans Le premier temple,
CNRS Editions, Paris, 2015, 420 pages et illustrations. Il s’agit , selon lui
,du plus ancien temple de l’humanité, et
il le date d’il y a -12000 ans,soit 7000
ans avant les Pyramides, 5000 ans avant
les menhirs de Carnac ; pour nous, c’est l’apparition, il y a quelque douze mille ans,
de curieux menhirs en marteau , taillés
dans un seul bloc de calcaire blanc lissé , avec à leur sommet une dalle
horizontale dépassant des deux côtés que
nous retrouverons aux Baléares, mais les menhirs de Minorque appelés taulas (stèles , du latin stipula , tige du blé )
sont taillés en deux blocs séparés cette fois.
Illustration : carte postale d’un menhir
en marteau à Minorque.
Que
signifie ce linteau au sommet du menhir ? Il symbolise le grain mort et
enterré , condition nécessaire de sa renaissance pour ces premiers
agriculteurs.
Le grand secret des
menhirs, ou la problématique fondamentale
de la représentation du blé ancien et du blé nouveau dans les menhirs : la dalle au sommet.
Voltaire a raillé ce qu’il appelait l’ignorance
botanique du Christ lorsque celui-ci déclare dans Jean 12, 24: « si le grain de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul; mais
s’il meurt, il porte beaucoup de fruit ».Le Christ se faisait là
l’écho d’une croyance populaire universelle et millénaire: le grain ne
pouvait germer que s’il mourait d’abord !
Il
faut donc que la mort du grain, condition de tout, soit à l’origine symbolisée, d’une façon ou
d’une autre, dans le menhir qui représente la germination du grain .
Il
nous reste à examiner le prétendu
« dolmen » de Changé
nommé la Grenouillère.
Illustration : la
Grenouillère.
Première
question : est-ce bien un dolmen ?
Un peu de lexicographie : menhir, dolmen, demi-
dolmen, trilithe ou lichaven .
Dans
son Dictionnaire (1846 -1872), Littré
définit le dolmen comme un « monument formé d’une grande pierre
plate posée sur deux pierres dressées
verticalement, qu’on attribue aux premiers habitants de la Gaule » et il définit le lichaven (de ven, pierre en breton, et de licha, trois) comme un « monument
celtique formé de trois pierres, l’une plate superposée sur les deux autres qui
lui servent de support. »
A partir de la première définition, le demi- dolmen est défini comme un « dolmen dont la table repose à terre par l'une de ses
extrémités ».Le prétendu « dolmen » de Changé serait donc ,
selon Littré, un demi-dolmen.
Ces définitions sont pourtant trop floues pour être d’usage
scientifique et il vaut mieux se servir de termes purement descriptifs comme dilithe (deux pierres) ou trilithes
(ou, en breton, lichavens, trois pierres )
pour désigner ces mégalithes .
Le cas, fréquent dans le Centre, des dilithes appelés palets de Gargantua.
Ces dilithes sont formés de deux pierres, dont l’une est d’origine inclinée ,
représentant l’orge penchée sous le
poids des épis ou plutôt des grains d’escourgeon ou d’engrain (parfois figurés, comme dans la
taula de Taliti à Minorque aux Baléares
, par une pierre ronde figurant un grain énorme d’engrain qu’on pourrait
prendre pour une simple cale ) et qui
s’appuie lourdement sur la dalle horizontale .
Illustration :
Carte postale de Taliti, un trilithe.
Les « palets
de Gargantua » du Centre
sont composés de deux dalles seulement (la 3e dalle symbolisant la
mort du grain a disparu , signe d’évolution des croyances) : l’une ,
inclinée , représente l’orge penchée
sous le poids des épis ou plutôt des tiges porteuses de grains d’engrain ou d’escourgeon , et repose sur l’autre restée plus ou moins
droite , comme sur la photo ci-dessous du «
palet de Gargantua » de Chamizay en Indre -et- Loire.
Le
« palet de Gargantua » à Chamizay en Indre -et-
Loir.
De
même, le dilithe de Torcé-en-Vallée,
dans la Sarthe, également appelé « Palet de Gargantua.
La
magie imitative explique ce nouvel arrangement : en représentant des tiges
de blé ployées sous le poids des épis, on croyait augmenter les probabilités
d’une récolte abondante.
Je
citerai encore, à Nottonville , un mégalithe appelé Palet
de Gargantua
Illustration : le mégalithe de
Nottonville
et
deux autres dans la région de Bonneval, l’un
près d’Alluyes,le « Palet de
Gargantua » , et un autre près
de Dangeau (la pierre dite du Breuil).
Le cas rare et archaïque
des trilithes.
A
ma connaissance, on trouve aujourd’hui trois
trilithes bien conservés d’un type archaïque, voisin du type avec les deux
pieds droits qu’on retrouve aussi à Minorque
(Taula Truncada, altération du latin trutina,+-ada, suffixe de ressemblance, qui
ressemble à une balance, le menhir à
deux pieds étant comparé à une balance à
deux plateaux) : à Saint –Nazaire en
Loire Atlantique, dans le voisinage à
Saint-André- des- Eaux et à Brantôme en
Dordogne. Ce dernier a nom la Peyre
Levade, appellation intéressante, car levade vient , non pas du latin levata,
(pierre)suspendue, levée, mais du grec labis,marteau,
+ suffixe en -ada, qui ressemble à un
marteau. Ce nom confirme la parenté avec les menhirs en marteau de Göbekli et
de Minorque.
Les deux pieds du menhir symbolisent les deux
pousses de céréales souhaitées.
Cartes postales de la taula Truncada à Minorque, de Saint-Nazaire en Loire Atlantique, et de Brantôme, en Dordogne.
Un mégalithe composé
de trois pierres, dont la dalle supérieure s’est effondrée au fil des
millénaires , comme celui de Changé appelé la Grenouillère, est un trilithe, où les deux pierres de soutien représentent les deux pousses
souhaitées d’orge et où la pierre oblique était horizontale à l’origine et
représentait la mort du grain préalablement à sa renaissance.
LES « PALETS DE GARGANTUA » d’EURE-ET-LOIR ET
DU CENTRE, OU LES TRACES D’UNE TRES
ANCIENNE DIVINITE, GARGANTUA, AVATAR DE LA GRAND-JUMENT SACREE.
Nous connaissons Gargantua à travers l’œuvre
de François Rabelais, le protégé de
Guillaume du Bellay, sieur de Langey en Eure- et Loir, où existe encore une
maison dite de Rabelais à cause du médaillon tardif dont elle est ornée, mais
Rabelais n’est pas le créateur du nom
du personnage, car , en août 1532, à Lyon,
avaient déjà paru anonymement les Grandes
et inestimables cronicques du grant et énorme géant Gargantua, republiées en 1988 dans Chroniques gargantuines, où le géant était rattaché à la légende celtique du roi Arthur , de Merlin et de la reine
Guenièvre.
Un peu de mythologie classique
d’abord : Démèter en grec ou Cérès
en latin, sa fille Perséphone en grec ou
Proserpine en latin et la Grand- Jument blanche (qui est l’avatar
de l’une ou l’autre de ces deux déesses).
A en croire la tradition, Mars, en grec
Arès, poursuivit Cérès, Dèmètèr en grec, de ses importunités. Celle-ci se métamorphosa
en une grande jument blanche pour lui
échapper,delà vendrait son nom phrygien : la mère –jument , de dava–mètèr,dava-, da-, de l’indo-européen gzwha ,
donnant en phrygien gdaa, puis daa,enfin dè-, cf latin caballa,
jument , et grec kobalos ; mais Mars se transforma
de son côté en cheval de labour et
il naquit de cette union deux
enfants à l’aspect , l’un de
pouliche , l’autre de poulain :
-une
fille dont il était interdit de
prononcer le nom véritable
et qu’on appelait seulement la
Jeune Fille, la Dame ou la Maîtresse, savoir l’épouse du dieu des morts , Perséphone (ce nom,
venant de Phorkus –éponè et signifiant
la jument, étrusque éponè, d’Orcus,
ou Phorkos,
le dieu des enfers ;
-et
un fils nommé Aréion qui tire
son nom de son père Arès (Mars en latin).
Toutefois, l’engloutissement du sanctuaire de la Jument, Gebelg- ol Bahar,gebelg-ol venant de kebelk-ol,
jument,cf .latin cavalc-a, à deux
kilomètres de l’île de Malte, près de l’île de Gozo, ayant été interprété comme une manifestation du mécontentement de Neptune, en grec Poseidon, le dieu de la mer et des tsunamis, amena
à modifier cette croyance : on retira à Mars la paternité d’Aréion et de Perséphone pour en faire honneur à Neptune-Poseidon ,
dans l’espoir de l’apaiser et on interdit de surcroît de prononcer le nom de la
fille de Mars, en se contentant de l’appeler Perséphone.
Cet engloutissement témoigne de la montée des eaux et du recul de
la côte lors du dernier maximum
glaciaire, à la fin du pléistocène, vers 9350, à 200 années près, av. J. C. Il
est contemporain de la submersion de
l’île de Pantelleria Vecchia, à 60
kilomètres au large de la Sicile, où, par 60 mètres de fond, on a trouvé un
menhir de 12 mètres de haut, l’un des
pus anciens qu’on ait pu dater, datant de 9350, à 200 années près, av.
J.-C.
L’historien
grec du VIe siècle Hérodote (IV, 94) nous a conservé le nom d’une déesse appelée Gebeleïdzis,
au nom parent de Göbekli en Turquie et de Gebelg-ol sur l’îlot englouti près de Malte, tous ces
noms signifiant le sanctuaire de la
Jument divine, savoir un avatar de Cérès : göbelkli est la forme
féminine du grec kobalos, en latin cavallus de kabalkos, qui nous a laissé le français cheval. La Jument sacrée ,
ou plutôt la déesse Cérès, est associée aux céréales et aux menhirs, si
bien qu’ on retrouve ce même radical caballos
désignant Cérès dans des noms de lieux préhistoriques riches
en mégalithes comme Gavarni , de kabalni, ou l’îlot
Gavrinis , de kabarni, en
Bretagne. La déesse gauloise Epona, au nom correspondant au latin equina,
jument, dont on peignait l’image dans
les écuries devant des mangeoires emplies d’orge, est un avatar de la déesse Cérès.
D’où vient le nom de
Gargantua ?
Tua désigne la jument
et se rattache au latin (e)qua ,
jument, avec ensemble labio-vélaire où le kw est traité phonologiquement en
t , cf.
pour le traitement gaulois du kw en t, le nom de femme gaulois Etain, de equanina.
Quant
à gargan ,il signifie grand et il
est à rapprocher du latin grandis,
grand, de gandhar-is, sans
redoublement initial , et du grec gigant-, géant, avec redoublement augmentatif :
gagant -, de
gargan(t). Il est parent du sanskrit gandhar-va , centaure(sse), grande- jument, et du grec Centauros qui se décompose en gandhar-u -os. Pour -u ou
–va, cf. le latin equa ou le gaulois tua,
jument. Le doublet originel de Gandharva, centaure, a
été conservé dans le nom gaulois de la mère de Gargantua à savoir Gargamelle,
où -melle vient du basco- celtique mere qui signifie jument, l’ensemble
signifiant la grand- jument.
Il
existait en Eure-et-Loir des simulacra de
la déesse locale correspondante, Bellena,
avatar de la Grand-Jument de Cérès, qui se retrouve dans le nom de la Beauce et
de Bellême, de belsema, dont le nom vient
par apocope de (ka)belksina, la Jument.
On voit aujourd’hui encore le visage ancien de la déesse Belena sur la façade de la chapelle
de la commune de Moléans à Valainville (de Belena + suffixe féminin gaulois aïn et
villa,
la ferme de Belena) , comme à la chapelle de Saint- Hilaire- des-
Noyers dans la commune de Saint-Denis d’Authou (anciennement commune de Bellenville, de
Belena, à rapprocher du nom du manoir de Blainville, de Belena + suffixe féminin
gaulois aïn et de villa). On peut aussi voir le même fruste visage dans la commune de Lanneray entre
Crenne, toponyme signifiant les
écuries et venant de equirina, dérivé de equiria qui désignait
une
course de chevaux rituelle , et Boulay , de Velay, de ( ka) belenaï(n), la jument (ci-dessous,
cliché due à Madame Yvonne Cochard, tête
trouvée au Boulay).
Simulacrum de Belena, équivalent de Cérès, déesse de la Beauce, au Boulay, commune de Lanneray.
Les « palets de Gargantua » dans le Centre.
Le
mot palet est l’altération par in
compréhension du nom de l’orge , et
vient de pal +-eti, pal étant à
rattacher au radical qu’on retrouve , par exemple, en latin, plures et désignant la multiplication magique, le grand nombre de touffes d’orge souhaitées -eti désignant l’orge, cf. le grec kri-tha , grain
d’orge, et le vieux haut allemand ger-sta, de même sens. En somme, la Grenouillère de Changé est,
non pas un dolmen, mais un trilithe qui s’appelait anciennement le palet de Gargantua dont le nom,
incompris, .a été permuté avec
celui du menhir voisin appelé auparavant le bot et a été transformé
par incompréhension en Grenouillère sous
l’influence de la forme du mégalithe et du nom du menhir pris pour bot désignant
le crapaud, la grenouille. Le menhir est alors devenu le But de Gargantua.
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