jeudi 7 avril 2016

Les fourchettes de cannibales du Musée de Nouméa.

 Les fourchettes de cannibales du Musée de Nouméa.
Au Musée de Nouméa, on peut voir une « fourchette de cannibale »  fort ancienne et dont on ignore la fonction. Je suis toujours tenté de rapprocher les choses calédoniennes obscures des choses australiennes étudiées par Roheim. C’est ce que je vais faire ci-après.
Selon Roheim, dans Héros phalliques et symboles maternels, p. 16, 17 et 171, lorsque le guérisseur  pointe l’os de la mort (pointing bone en anglais)  en direction de son ennemi, il le rend malade ou le fait mourir. Il s’agit de tibia de kangourou ou d’émeu, en Calédonie de tibia de dindon de Latham, aujourd’hui disparu, qu’on a poncé et appointé à une de des extrémités ; on le place dans une fourmilière, afin que les insectes l’enduisent de leur poison magique (arunkulta) ; il est fixé ensuite à une  ficelle avec de la résine. Puis le sorcier se coupe la langue avec un couteau de pierre, crache sang et salive mêlés sur l’os, l’enduit du sang qu’il fait couler de l’orifice de la subincision en Australie, de la superincision en Calédonie, et le recouvre  pour finir de duvet. On dit que l’os de la mort est extrait d’une zone du corps située entre le pénis et l’anus ; il est censé pénétrer dans le corps de la victime par le scrotum, c’est-à-dire la peau très fine qui entoure les testicules comme un sac. Les Nambutji  cachent l’os dans un trou, à l’endroit où la victime a coutume d’uriner, la pointe dressée vers le haut : lorsque la victime urine, l’os pénètre dans son corps par le jet d’urine et le tue. Souvent, on agit à distance, parfois à plus de 100 km. Le guérisseur tient l’os à deux mains, comme s’il s’agissait, pour ce subincisé ,de son pénis , et le dirige vers l’ennemi. Pour que ce dernier, où qu’il se trouve, ne puisse apercevoir l’opérateur, celui-ci jette en l’air de l’urine et des excréments qui forment un nuage et dissimulent l’os. Le plus souvent, l’os est pointé dans le prolongement d’un bras et d’une  jambe en extension, l’autre bras maintenant la ficelle contre l’autre jambe ployée à terre.
Selon Roheim, dans L’énigme du Sphinx, p. 59, le sorcier prend du sperme de son pénis et des excréments de son anus (les narrateurs miment avec du sable la façon dont il procède) et , en les lançant dans la direction de l’ennemi, fait apparaître un nuage derrière lequel il se cache comme le poulpe derrière le  nuage d’encre qu’il projette.

Roheim,op .  cit. ,  p. 171, compare ce rituel totémique des tribus australiennes avec celui des tribus mélanésiennes de Normanby, la tribu  des Marindan-im notamment, et en particulier  le sable lancé, l’éparpillement des graines, le lancer de copeaux empreints de sang, ou de duvet blanc d’oiseau L’action de jeter ou d’éparpiller est l’équivalent de l’éjaculation et le sable ou le duvet blanc est un symbole du sperme. 

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