jeudi 29 mars 2018

LES JARDINS SUSPENDUS (en grec ta paradeisia ou ta kèpa krématista) DE BABYLONE


 A QUOI RESSEMBLAIENT LES JARDINS SUSPENDUS (en grec ta paradeisia  ou ta kèpa krématista) DE BABYLONE ?


Je me suis penché déjà sur le sens de la pierre qui surmontait les menhirs à Göbekli en Turquie et à Minorque (voir mon blog sur les menhirs).Selon moi,  si le menhir est une imitation magique de la germination du blé ou de l’orge, la mort du grain, qui, pour les mentalités archaïques , est la condition première de sa germination , est symbolisée par cette dalle horizontale qui surmonte le menhir. Pour représenter plusieurs pousses souhaitées, on représenta un pilier supplémentaire. Il était logique d’étendre ces rites magiques de fécondité et de juxtaposer plusieurs menhirs en marteau les uns à côté des autres. Telle est l’origine des jardins suspendus, d’abord en Perse, à Parsagàdès, puis à Babylone et à Ninive .  « Il y avait dans la citadelle      (de Babylone ] écrit Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, II, 10, 1-6   le célèbre jardin suspendu, ouvrage, non pas de Sémiramis, mais d'un roi syrien postérieur à celle-ci : il l'avait fait construire pour plaire à une concubine. On raconte que cette femme, originaire de la Perse, regrettant les prés de ses montagnes, avait engagé le roi à lui rappeler par des plantations artificielles la Perse, son pays natal.»
Bérose attribue cette construction à Nabuchodonosor II (604-562 av J.-C.[)]. Il aurait fait construire cet édifice pour son épouse, originaire de Médie, pays montagneux de l'Iran occidental, pour soigner sa nostalgie de son pays natal et de sa verdure, qui contrastait avec le relief plat et le climat aride de Babylone. Un autre passage de Bérose indique le nom de la reine, Amytis, que Nabuchodonosor avait épousée à la suite de l'alliance entre son père Nabopolassar et le roi des Mèdes Cyaxare au moment de la destruction de l'Assyrie.

I Une première évolution des menhirs en marteau avec les cupules creusées sur la dalle horizontale où l’on plante des graines  sur la dalle horizontale et la levée du deuil  pris pour la mort du blé :  le modèle de  Parsagadès .  
La première capitale de la Perse, à quelque 40 kilomètres de Persépolis, fut Parségadès, dont le nom dérive avec anticipation  du s et transformation du n en d,  de phalang-s, le fleau de la balance à cause des deux plateaux, entendons les deux pieds de certains menhirs, nom du linteau qui surmonte les menhirs en marteau,  à partir de phaleg°nes, paregades .Pareillement, nos mots paradis et  parc (ce dernier à rapprocher du grec kèpos, jardin, de parak-os ) sont tous deux des variations dialectales médo- persanes de phalangs (parideisos en persan, le jardin, venant, avec l voyelle [la]noté li et rhotacisme, puis  transformation du n en d,  de phal°donnant parid- + suffixe de ressemblance –eidos, parideidos , avec dissimilation paradeisos .
Les cannelures des colonnes sont l’héritage des stries des pseudo -polissoirs  (voir mon blog sur les pseudo- polissoirs)  représentant les sillons où meurt le grain.

Sur le linteau représentant la mort du blé, dans les cupules , on mettait un peu d’humus et des graines diverses , on arrosait, une ou deux semaines avant l’équinoxe de printemps et on considérait cette poussée comme une levée du deuil permettant magiquement la  sortie des germes. Quelles étaient ces plantes ?
Les végétaux du « jardin »  du linteau : les plantes funèbres accompagnant la mort du blé : le lis (krinon en grec cf . corn en anglais, etc.) , la rose,  le grenadier , les cyprès et les palmiers à fruits rouges  (grec phoinix) .
Le grenadier (sidè en grec ou rhoia,de doia , orge, granatum en latin ou la pomme phoinika,, pourpre  ) et la mythologie.
Du fait de l’homonymie du nom du grain (seia) d’orge (da, cf. Daa mèter, la mère de l’orge,  grec kritha ,latin hordea,  vieux haut allemand gersta ,  cf. grec sitos, pain ;, seiros, silo, nom gaulois de la déesse Sirona),et d’un  nom grec de la  grenade (sidè)  , à rapprocher de son nom latin (gran+atum, orge), ont été inventé es les légendes qui lient Perséphone, la déesse de l’orge mort, et les grains de grenade  . dans le « jardin d’Hadès » poussait , en effet , un grenadier  auquel il ne fallait pas toucher sous peine de mort perpétuelle, -entendons le maintien aux Enfers toute l’année, ce qui n’est pas sans faire songer à certaine  pomme de même couleur pourpre du jardin d’Eve. Or, Perséphone se laissa tenter, et, soit inadvertance de sa part, soit que Hadès lui  eût tendu un piège,, elle avala un grain fatidique. Il fallut l’intervention pressante de sa mère Dèmèter pour la racheter.
Les  fèves et autres légumes sacrés poussant sur le linteau.
Il y avait, bien entendu, des jardins royaux à l'époque du roi Mérodach- Baladan II (721-713 et 703 av. J.-C.) décrits sur la tablette d'argile BM.46226 : description des plantes qui poussent dans le jardin, sans doute servant pour la table du roi : ail, oignons, poireaux, laitues, concombres, radis, nombreux condiments et aromates[. 8].



II La suite de l’évolution des menhirs à Babylone et à Ninive : la présence de montagnes, les terrasses superposées  et l’irrigation grâce à des avales ou adductions d’eau en terrasses descendantes appelées pirogues en Océanie.

Pourquoi se donner le mal de créer un jardin suspendu quand on pourrait si facilement en disposer un au sol ?Quand, pour complaire à sa concubine originaire de Parsagadès, Amytis, Nabuchodonosor II (604-562 av J.-C.) décida de transférer à Babylone des jardins qui rappelassent à sa bien –aimée les jardins persans, il se heurta à des contraintes, en particulier le relief escarpé qui existait dans le peu d’espace qui existait la citadelle qui était entourée des célèbres remparts , le palais royal hors les remparts   et l’Euphrate (destiné à  arroser les jardins ) .  Amytis voulait légitimement pouvoir, à partir du palais royal,  se  promener dans s les futurs  jardins,car Diodore nous l’apprend, les piliers donnaient accès aux appartements royaux. Un carré de 120 mètres de côté (14400 m², soit environ1 hectare et demi ou 1400 ares ) de  fut donc tracé entre l’Euphrate et le palais pour y asseoir, grâce à 20 piliers,   une espèce d’amphithéâtre de 11 gradins, séparé en deux, semble-t-il, par un  escalier, mais cet espace mordait fortement sur la montagne où la citadelle et les remparts qui la ceignaient était bâtie. Aussi ses ingénieurs mirent-ils au point un système novateur, une sorte de « bélier » permanent actionné par le courant, pour irriguer en permanence  les jardins, fût-ce en été et en hauteur. Aussi tout un savant système de menhirs juxtaposés avec un sol étagé entre eux  fut-il établi de telle façon que le plus haut partît du niveau du sol pour atteindre le niveau de la citadelle.  Les arbres furent plantés dans les colonnes, creusées à un bout .Qu’est-ce qui justifia le « classement » de ces  jardins dans les sept merveilles du monde antique par un certain Philon ? C’est probablement l’exploit technique présenté par leur irrigation, et non l’agrément et la diversité des plantations, bien établis pourtant.  



Sources antiques
Mesures : 1 pied : 0,296 mètre .
1 coudée : 1 pied et demi, soit 0,444 mètre.  
1 plèthre : 100 pieds,  29,6 mètres .
Quinte-Curce, 1er siècle ap.J.C., dans son Histoire d’Alexandre.  V, I, 32-35 : « (32) Au-dessous de la citadelle [et des remparts] (et non au-dessus comme le porte par erreur le texte, cf. Diodore de Sicile : ci-dessous : la colonne la plus élevée, de cinquante coudées (0m444) de haut (22  mètres) supportait le sommet du jardin, et [partant du sol] était de niveau avec les balustrades des remparts, confirmé par la suite de ce texte). se trouvent  ces jardins suspendus, merveille devenue célèbre par les récits des Grecs; ils atteignent le sommet des Remparts  [qui furent aussi considérées comme une des Sept Merveilles du monde, indépendamment des Jardins], et doivent un grand charme à une foule d'arbres élevés et à leurs ombrages.  Les piliers qui soutiennent tout l'ouvrage sont construits en pierre: au-dessus de ces piliers il y a  un lit de pierres carrées [c’est là ce qu’est devenu le linteau surmontant les menhirs en marteau] fait pour recevoir la terre que l'on y entasse à une grande profondeur, ainsi que l'eau dont elle est arrosée .Telle est la force des arbres qui croissent sur ce sol artificiel qu'ils ont à leur base jusqu'à huit coudées  de circonférence (3,52 m) , s'élancent à cinquante pieds de hauteur (22 mètres), et sont aussi riches en fruits que s'ils étaient nourris par leur terre maternelle.  D'ordinaire,  le temps, dans son cours, détruit, en les minant sourdement, les travaux des hommes et jusqu'aux œuvres de la nature ; ici, au contraire, cette construction gigantesque, pressée par les racines de tant d'arbres et surchargée du poids d'une si vaste forêt, dure sans avoir souffert aucun dommage : c'est que vingt larges piliers la soutiennent, séparés les uns des autres par un intervalle de onze pieds (3,19 mètres) [il faut comprendre que  : l’ensemble est divisé  en deux  moitiés par un escalier monumental , large de 70 mètres environ  ,  de telle sorte que, dans le lointain, on dirait des bois qui couronnent la montagne où ils sont nés.  La tradition rapporte qu'un roi de Syrie, qui régnait à Babylone, entreprit ce monument par tendresse pour son épouse, qui, sans cesse regrettant l'ombrage des bois et des forêts dans ce pays de plaines, obtint de lui d'imiter, par ce genre de travail, les agréments de la nature. »
Diodore de Sicile, op . cit. : «  Ce jardin, de forme carrée, avait des côtés de quatre plèthres [120 mètres environ, 1 plèthre =29, 6 m]. On y montait, par des  gradins             [situés au milieu]   sur des terrasses posées les unes au-dessus des autres, en sorte que le tout présentait l'aspect d'un amphithéâtre. Ces terrasses ou plates-formes, sur lesquelles on montait [par l’escalier] étaient soutenues par des colonnes qui, s'élevant graduellement de distance en  distance, supportaient tout le poids des plantations ; la colonne la plus élevée, de cinquante coudées (0m444) de haut (22  mètres) supportait le sommet du jardin, et [partant du sol] était de niveau avec les balustrades des remparts. Ces [11] terrasses,  solidement construites à grands frais, avaient vingt-deux pieds de largeur  (1 pied =0, 29) [plus de 6 mètres], et chaque saillie qui  dépassait et qui servait pour sortir vers l’escalier avait dix pieds de largeur (2 mètres 20). Elles  étaient composées de blocs de pierres dont la longueur, y compris la saillie, était de seize pieds (2 mètres 20)  sur quatre (1, 2 mètre] de largeur. Ces blocs étaient recouverts d'une couche de roseaux mêlés de beaucoup d'asphalte ; sur cette couche reposait une double rangée de briques cuites, cimentées avec du plâtre ; celles-ci étaient, à leur tour, recouvertes de lames de plomb, afin d'empêcher l'eau de s’infiltrer à travers les atterrissements artificiels, et de pénétrer dans les fondations. Sur cette couverture se trouvait répandue une masse de terre suffisante pour recevoir les racines des plus grands arbres. Ce sol artificiel était rempli d'arbres de toute espèce, capables de charmer la vue par leurs dimensions et leur beauté. Les colonnes s'élevaient graduellement, laissaient par leurs interstices pénétrer la lumière, et donnaient accès aux appartements royaux, nombreux et diversement ornés. Une  de ces colonnes était creuse depuis le sommet jusqu'à sa base et  contenait des machines hydrauliques qui faisaient monter du fleuve une grande quantité d'eau, sans que personne pût rien voir à l'extérieur. Tel était ce jardin …  »
Strabon, Géographie, XVI, I, 5 : « Babylone est située, elle aussi, dans une plaine. Ses remparts ont trois cent soixante-cinq stades de circuit, trente-deux pieds d'épaisseur et cinquante coudées de hauteur (22 mètres) dans l'intervalle des tours, qui elles-mêmes sont hautes de soixante coudées (26 mètres). Au haut de ce rempart on a ménagé un passage assez large pour que deux quadriges puissent s'y croiser. On comprend qu'un pareil ouvrage ait été rangé au nombre des Sept Merveilles du monde, et le Jardin suspendu pareillement.
Ce jardin, immense carré de quatre plèthres de côté [120 mètres environ] se compose de plusieurs étages de terrasses supportées par des arcades dont les voûtes retombent sur des piliers de forme carrée. Ces piliers sont creux et remplis de terre, ce qui a permis d'y faire venir les plus grands arbres. Piliers, arcades et voûtes ont été construits rien qu'avec des briques cuites au feu et de l'asphalte. On arrive à la terrasse supérieure par les degrés d'un immense escalier, le long desquels ont été disposées des limaces ou vis hydrauliques, destinées à faire monter l'eau de l'Euphrate dans le jardin, et qui fonctionnent sans interruption sous  la surveillance d’ouvriers [détail en contradiction avec l’emplacement invisible dans une colonne  indiqué par Diodore, moins fiable à mon avis] . L'Euphrate coupe en effet la ville par le milieu. Sa largeur est d'un stade et le jardin suspendu le borde. »


On peut dériver le toponyme de Babylôn  qui est à rapprocher de Paphlagôn,  de phalang, nom du linteau des menhirs en marteau, à partir de paphl°gn [l voyelle donnant la ou ul l]   .
Conclusions.
Les  inventeurs du rite agricole des menhirs en marteau en tant que gage de la fécondité de la terre et des techniques de taille de la pierre, de l’irrigation en escalier comme à Babylone et à Ninive se sont répandus dans le vaste monde où ils  se sont métissés et fondus dans d’autres cultures,  ainsi que le faisait remarquer Paul Rivet : par exemple, en Afrique noire (on trouve en Sénégambie et au Sénégal des « pierres- lyres », en Micronésie  , en Polynésie où le trilithe de Tonga pris à tort pour un porche (vers nulle part ?) est leur plus fameuse création, mais non la seule, à l’île de Pâques où le « chapeau) des fameuses statues sont en réalité des avatars des linteaux qui dominaient les menhirs (voir mon blog sur l’île de Pâques).Il ne faut pas oublier les rizières de montagne en Asie et les pseudo -tarodières de Nouvelle-Calédonie (voir mon blog sur le sujet).

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