vendredi 27 janvier 2017

D’OU VIENT LE RIRE SARDONIQUE ?

                D’OU VIENT LE RIRE SARDONIQUE ?
  En grec sardanios  désigne un rire convulsif, grimaçant et ce dès l’Odyssée. Le verbe grec sairô, de saryô signifie grincer des dents.  On l’a rapproché secondairement de sardonios, sarde, et du latin sardonia herba, la renoncule de Sardaigne à laquelle on attribue propriétés convulsivantes et hilarantes.
 Mais le rire sardonique si l’on en croit G. Dumézil est un rire rituel, lié au cannibalisme et au meurtre des parents âgés. L’enfant adulte passe derrière le parent dont il veut se délivrer, pousse ce rire sardonique et le tue. Le rire consiste à montrer ses crocs et le philosophe Bergson , dans Le rire, cite le fait que lorsqu’on voit quelqu’un tomber, la première réaction est d’éclater de rire, c’est-à-dire de se préparer à sauter sur la proie en position d’infériorité pour l’achever.
Nous chercherons à Rome des exemples due ce rire sardonique rituel.
  La vieille divinité étrusque Vulcain, originellement, le dieu des sillons,de swelk,sillon en indo-iranien,le dieu de la fécondité agricole,  devenu à Rome le dieu du feu, fut aussi appelé  Soranus (qui désigne aussi Pluton, le dieu des morts sous la terre ), qui a même étymologie que Vulcain et provient de swolhw + -anus, la labio-vélaire  donnant soit k comme dans Vulcain,  soit disparaissant comme dans Soranus. Sardonicus , sardonique, ou sardanus ont aussi la même étymologie, le lrd venant de hw devenant dw (cf le traitement en arménien de l’indo-européen duo, deux, devenant erk). Si cette étymologie est juste, le rire sardonique serait lié au culte de Vulcain- Soranus. Il nous resteà le vérifier.
La mère de Vulcain, Maia, celle qui nous a laissé le nom du mois de mai,  se serait moquée à sa naissance de son pied boiteux et aurait éclaté de rire à la vue de l’enfant). Le « mari « de celle-ci était Picus,dontle nom est à rapprocher de pecus, pecoris, menu bétail, chèvre, devin habile, fils de Saturne, autre dieu  de la fécondité agricole. L’hérédité de Picus qui se métamorphosait comme il voulait explique l pied de chèvre de son enfant, car Picus a eu pour enfant Faunus (dont le nom correspond à Pan en grec), un Satyre ou Silène à pieds de chèvre et  à queue de cheval. Quand Pan naquit, sa mère eut peur de cet enfant à l’aspect monstrueux  de chèvre  et s’en moqua, éclatant de rire. Le meurtre de la mère  est une vengeance qui répercute sur elle son rire moqueur, mais en la tuant. . Faunus « chèvre-pied », comme dit Ronsard,  a fondé un culte, celui des Luperques, où intervient le rire sardonique en tant que partie intégrante d’un rite.
Avant la procession, qui avait lieu  le 15 février, le prêtre immolait une chèvre, touchait le front des Luperques de son couteau sanglant, en essuyait la trace avec un flocon de laine imbibé de lait et, à ce moment, chaque  Luperque devait lui répondre en faisant entendre un éclat de rire rituel. On peut rapprocher leur confrérie de celle des Hirpi Sorani (les boucs de Soranus, un autre nom de Vulcain, interprété ensuite comme les loups de Soranus) qui dansaient pieds nus sur des charbons ardents  en l’honneur de Vulcain. Hirpi serait un mot sabin qui signifierait loup, mais hircus désigne en latin le bouc. La labio- vélaire k a pu donner p en sabin, où l’on aurait hirpi au sens de bouc et se confondre avec le nom du loup ou du renard (vulpes en latin), welkw, werkw, le w initial devenant dans hirpi une simple aspiration.
Vulcain était d’abord le dieu de la viande crue ; ce n’est que  par la suite qu’il est devenu le dieu du feu et celui des aliments qu’on fait cuire. Dans le culte des hirpi sorani, on racontait que des loups étaient survenus au cours d’un sacrifice et avaient arraché à la flamme impie des morceaux de chair des victimes. Lors du rire sardonique, la chair des victimes devait être mangée crue.


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