vendredi 13 janvier 2017

LE NOM DE LA CONIE EN BEAUCE ET LE SOUVENIR DU CHEF GAULOIS CONCONNETODUMNOS

Le nom de la  Conie et le souvenir de deux chefs carnutes cités par César : Conconnetodumnos et Cotuetos.
Les patronymes des chefs gaulois sont souvent empruntés au sacrifice de l’orge où se faisaient les rois et les chefs portaient souvent des noms de céréales, comme Brennus, de brannos, blé, à rapprocher de l’anglais bran.  Ainsi,  le nom de Vercingetorix est-il  à analyser en  urk, sillon,  geto , orge, et rix , roi, celui qui est fait  roi dans le sacrifice des sillons de l’orge, comme celui d’Orgétorix, un Gaulois helvète, de orgeto , sillon pour orge, et de rix, roi., ou des  Caturiges, catu de geto, grains d’orge,  et de urig , sillon .
 Il faut en rapprocher un nom du Mars carnute, Mogetes, de ma, grand,  de urk, sillon,  et de geta,  grains d’orge, cf    latin seges, de segets , moisson , champ d’orge, Seia, déesse des semailles, Segesta, déesse des moissons ainsi que  vieux haut allemand gersta, grains d’orge.
   Conconnetodumnos, chef d’un important  pagus (subdivision de la civitas ou nation des Carnutes),   a laissé la première partie de son nom à la Conie, la rivière de son  royaume.  Le mot latin  cuniculum qui veut dire lapereau, connil en ancien français, ne peut s’appliquer ici, le lapin ayant été introduit d’Espagne en Gaule beaucoup plus tard. D’autre part, il existe un lieu-dit le Conni près d’Illiers,  mais ce nom ne renvoie,  ni aux lapins, ni à une propriété du chef gaulois, étant préceltique et remontant à la tribu ibère des Kunésiens. .
 Le patronyme gaulois Conconnetodumnos   est apparenté au grec kenchros, millet à grappes ou millet des oiseaux (panicum italicum), orge,  et  aussi à konkos ou kokkos, grain (d’orge),   qui donne le gaulois concon- +etos (de uetos,   cf anglais wheat, froment, ou oats, avoine, allemand weizen,  et gaulois  uet dans Cotuetos ou uit dans uituriges ou Bituriges),   et au gaulois   dumnos, fourré, buisson, champ. Mais peut-être dumnos est-il ici  une altération volontaire, pour des raisons de secret religieux, de methuos, c’est-à-dire l’homme qui fait le sacrifice, et peut-être son nom véritable était-il Conconnetomedhuos, celui qui fait le sacrifice de l’orge, donc celui qui fait le sacrifice d’êtres humains. Le siège du royaume était peut-être près du Bois de Moléans, dans le hameau de Conie, à Conie- Molitard, union de deux communes, Molitard étant l’altération   du gaulois molitor, meunier d’un moulin à eau, car il y  avait deux de ces moulins au bord de la Conie.  Saint-Christophe, Saint-Maur  et surtout le bois de Moléans se trouvaient dans son royaume.
Le bois de Moléans dans la commune de Saint- Maur- sur -le -Loir.
 Le nom de Moléans, comme Mauléon, Médan, Meudon,   Melun, ou Milan, dérive, non d’un mot medhiolanum, signifiant  plaine du centre, mais du composé  gaulois medhuanos, de  medhu (sanskrit medhu), sacrifice, avec un suffixe adjectivant -anos,  signifiant (le lieu) sacrificiel,  du sacrifice.
Dans Saint-Maur, maur vient du gaulois mar, la pierre sur laquelle  est sacrifié le cheval dans le sacrifice du cheval, sacrifice appelé en sanskrit ashvamedhu. Le nom mar  a été secondairement christianisé. Quelle pouvait donc être cette pierre qui donna son nom à la commune ?  
 Max Gilbert  dans Pierres mégalithiques (menhirs et dolmens) en Normandie, Guernsey Press, Guernesey,  1956,  parle d’ « un bloc regardé comme un autel des sacrifices », d’une pierre druidique au sens propre dans le groupe mégalithique du Baignon. Elle «  se trouve à gauche de la route de Saint-Maur à Flacey,  entre la route et la rivière du Loir, dominant le ravin formé par la boucle de la rivière ; de la route, on voit des pierres paraissant hautes au-dessus du sol, mais peu longues.» 
  Le caractère sacré de l’obscur  village de Saint-Maur  et de son  l’église dédiée à saint Maur a  survécu dans la ferveur populaire grâce à des  pèlerinages très anciens  -ferveur curieusement disproportionnée pour ce saint inconnu qui, en tout état de cause, n’a rien à voir avec le disciple de  saint Benoît, lequel  n’est jamais venu en France. Il y a d’ailleurs 14 autres saints du même nom, dont  5 martyrs.  Le pèlerinage a lieu le 15 janvier, date de la fête du saint Maur  qui était l’élève de saint Benoît, mais  reprend peut-être  , plus ou moins la date solsticiale    du  vieux rassemblement annuel des druides carnutes.
Mémillon et Mamilia à Rome.
Mémillon, du gaulois Memillon, est à rapprocher du latin Mamilia  qui intervient aussi avec la Tour Mamilia dans le rituel du Cheval d’octobre destiné à sacrer les rois.  Selon Faustus,  cité par G. Dumézil, Fêtes d’été et d’automne, Un sacrifice humain, Gallimard, Paris, 1975, p. 146 ,  une course sérieuse (à bord d’un  raeda ou chariot à quatre roues pour les Gaulois , à  bord  d’un  char pour les Indiens et pour  les Romains) , avec comme enjeu  la tête du cheval immolé , «  s’engage entre les gens de Suburre et ceux de la Sacra Via, pour accrocher cette tête  , les gens de la Via Sacra au mur de la Regia [le palais où siégeaient les rois étrusques de Rome], les gens de Suburre à la Tour Mamilia. La queue du même cheval est portée à la Regia avec tant de célérité qu’il doit encore en tomber des gouttes de sang sur le foyer de l’autel, pour  faire participer la royauté au sacrifice. »  Chez les Carnutes,  la compétition devait avoir lieu entre Mémilllon, équivalent gaulois de Mamilia, et Meuves, où l’on peut supposer que se trouvait le Palais royal de Conconnetodumnos, et où la queue du cheval était apportée encore faiblement  saignante  au bout d’un trajet à cheval de 3 à 4 minutes. Il est  tentant    d’analyser  le gaulois memilion en  sacrifice d’êtres humains, gaulois medhu, sacrifice, et  gaulois nar, homme, sous la forme du   génitif pluriel naron,  donc à partir  de medhunaron, devenu medhuron, puis Mémillon, par conséquent  comme renvoyant anciennement à un sacrifice humain à Mars, sacrifice dans lequel au fil du temps  le cheval a été substitué à l’homme.   Jacques Guillemin, dans «  Saint-Maur –sur-le- Loir, mottes féodales et châteaux «  in Bulletin de la société archéologique d’Eure- et- Loir, n°52, 1er tr. 1997, p.3, évoque la situation d’une tour en bois  au sommet d’une motte féodale, la Tour Mémillon, qui, pour nous, fait écho à la Tour Mamilia à Rome.  Memillon est bien un mot gaulois, comme l’attestent les mots  mirmillonium, qui désigne en latin l’armement du sacrificateur  et mirmillones, les  gladiateurs armés du mirmillonium pour un combat rituel. Tel devait être l’armement des hommes, -les mirmillones, ou en grec myrmidones,  - qui s’affrontaient après le sacrifice des chevaux, combat qui était l’équivalent atténué du sacrifice humain  nécessaire plus anciennement pour « sacrer « le roi. On le retrouve dans myrmidones, le nom des guerriers d’Achille, avec même dans l’Iliade un souvenir de l’anthropophagie rituelle qui l’accompagnait, lorsqu’ Achille dit à Hector agonisant : « Ah ! Que ne puis –je dévorer ton cœur tout cru !»  Ceux qui, pour réfuter l’étymologie indo-européenne de Mémillon , voudraient tirer argument du nom de Guillelmus de Mémillon , Mansio Melinis (la maison de Milon ou Ménélas), Mesium Milonis en 1232, Mansium Menelaüm vers 865, lequel est  attesté en 1194 comme premier seigneur de Mémillon (J. Guillemin, op.cit. , p.10),  ne doivent pas oublier qu’il s’agit là d’une étymologie de scribe destinée à  ennoblir le noble  en question   et que, en 1200-1201, on appelle simplement celui-ci  Mesmillo., ou de Mesmillon. , puis en 1215 Mémillon.Ce type d’endroit et de nom  n’était pas le seul en Gaule : il suffit de songer à Montmédy dans la Meuse, de medhuaron et de Rueil –Malmaison  dans les Hauts- de- Seine :Rueil vient de Lutekia +suffixe indiquant un champ, l’équivalent du champ de Mars à Rome, savoir ialensin abrégé en ogilo. , (r)u(tek)ogilo, donnant Rueil et medhunaron, mermillon, melmansion, malmaison.
Le toponyme de Meuves, du gaulois medhuos, dans la même commune de Saint-Maur –sur –le -Loir, vient du gaulois medhu et correspond au  sanskrit medhu, de maidhu, sacrifice, lié au radical indo-européen du cheval.  
L’ami de  Conconnetodumnos : le  chef Cotuetos .  
   A la tête d’un autre pagus voisin , Cotuetos (du patronyme gaulois répandu  Cottus auquel les  Alpes Cottiennes doivent leur nom),  dont le nom était apparenté au grec  kachrus, grain d’orge grillée,devenu cotu- et à edha, , de dhéa, orge, devenu en gaulois – et (à rapprocher du grec homérique  zéia,, épeautre pour les chevaux, du sanskrit yavah, orge,et  de la racine indo-européenne yew-, orge ), a laissé son nom à Thuy (de [co] tuet) sur la commune de Logron. Il y avait à Thuy de nombreux mégalithes, qui, vers 1950,  furent étudiés et photographiés en hélicoptère, mais l’exploitant agricole les a démolis et a même  fait disparaître le dernier sous un dépôt d’ordures ! Le royaume de Cotuetos devait s’étendre jusqu’au château de Chantemesle (dont le nom signifie la pierre, mar,  à orge) : là se trouvait le « polissoir » qui assurait la fécondité des moissons du royaume de Cotuetos et il s’étendait jusqu’à Douy , de (co) thouy, nom qui vient aussi de Cotuetos,  nom que portait aussi le  père du rebelle. .
.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire