Le nom de
la Conie et le souvenir de deux chefs
carnutes cités par César : Conconnetodumnos
et Cotuetos.
Les patronymes des chefs gaulois sont souvent
empruntés au sacrifice de l’orge où se faisaient les rois et les chefs portaient souvent des noms de céréales,
comme Brennus, de brannos, blé, à rapprocher de l’anglais
bran. Ainsi,
le nom de Vercingetorix
est-il à analyser en urk,
sillon, geto , orge, et rix , roi, celui qui est fait roi dans le sacrifice des sillons de l’orge,
comme celui d’Orgétorix, un Gaulois
helvète, de orgeto , sillon pour orge, et de
rix, roi., ou des Caturiges, catu de geto, grains d’orge, et de urig , sillon .
Il faut en
rapprocher un nom du Mars carnute, Mogetes,
de ma, grand, de urk,
sillon, et de geta, grains d’orge, cf
latin seges, de segets ,
moisson , champ d’orge, Seia, déesse
des semailles, Segesta, déesse des
moissons ainsi que vieux haut allemand gersta, grains d’orge.
Conconnetodumnos, chef d’un
important pagus (subdivision de la civitas
ou nation des Carnutes), a laissé
la première partie de son nom à la Conie, la rivière de son royaume. Le mot latin cuniculum qui veut dire
lapereau, connil en ancien français,
ne peut s’appliquer ici, le lapin ayant été introduit d’Espagne en Gaule
beaucoup plus tard. D’autre part, il existe un lieu-dit le Conni près d’Illiers,
mais ce nom ne renvoie, ni aux
lapins, ni à une propriété du chef gaulois, étant préceltique et remontant à la
tribu ibère des Kunésiens. .
Le patronyme gaulois
Conconnetodumnos est apparenté au grec kenchros, millet à grappes ou millet des
oiseaux (panicum italicum),
orge, et
aussi à konkos ou kokkos, grain (d’orge), qui donne le gaulois concon- + –etos (de uetos,
cf anglais wheat, froment, ou oats, avoine, allemand weizen,
et gaulois uet dans Cotuetos ou uit dans uituriges ou Bituriges), et au gaulois dumnos,
fourré, buisson, champ. Mais peut-être dumnos
est-il ici une altération volontaire,
pour des raisons de secret religieux, de methuos,
c’est-à-dire l’homme qui fait le sacrifice, et peut-être son nom véritable
était-il Conconnetomedhuos, celui
qui fait le sacrifice de l’orge, donc celui qui fait le sacrifice d’êtres
humains. Le siège du royaume était peut-être près du Bois de Moléans, dans le
hameau de Conie, à Conie-
Molitard, union de deux communes, Molitard étant l’altération du gaulois molitor, meunier d’un moulin à eau, car il y avait deux de ces moulins au bord de la
Conie. Saint-Christophe, Saint-Maur et surtout le bois de Moléans se trouvaient
dans son royaume.
Le bois de Moléans dans la commune de Saint- Maur- sur -le
-Loir.
Le nom de Moléans, comme Mauléon, Médan, Meudon, Melun, ou Milan, dérive, non d’un mot medhiolanum, signifiant plaine du centre, mais du composé gaulois
medhuanos, de medhu (sanskrit medhu), sacrifice, avec
un suffixe adjectivant -anos, signifiant (le lieu) sacrificiel, du sacrifice.
Dans Saint-Maur, maur vient du gaulois mar, la pierre sur
laquelle est sacrifié le cheval dans le sacrifice du cheval, sacrifice
appelé en sanskrit ashvamedhu. Le nom
mar
a été secondairement christianisé. Quelle pouvait donc être cette pierre
qui donna son nom à la commune ?
Max Gilbert dans Pierres mégalithiques (menhirs et dolmens)
en Normandie, Guernsey Press, Guernesey,
1956, parle d’ « un bloc regardé comme un autel des
sacrifices », d’une pierre
druidique au sens propre dans le groupe mégalithique du Baignon.
Elle « se trouve à gauche de la route de Saint-Maur à
Flacey, entre la route et la rivière du
Loir, dominant le ravin formé par la boucle de la rivière ; de la route,
on voit des pierres paraissant hautes au-dessus du sol, mais peu longues.»
Le caractère sacré de l’obscur village de Saint-Maur et de son
l’église dédiée à saint Maur a
survécu dans la ferveur populaire grâce à des pèlerinages très anciens -ferveur curieusement disproportionnée pour
ce saint inconnu qui, en tout état de cause, n’a rien à voir avec le disciple
de saint Benoît, lequel n’est jamais venu en France. Il y a
d’ailleurs 14 autres saints du même nom, dont
5 martyrs. Le pèlerinage a lieu
le 15 janvier, date de la fête du saint Maur
qui était l’élève de saint Benoît, mais
reprend peut-être , plus ou moins
la date solsticiale du vieux rassemblement annuel des druides
carnutes.
Mémillon
et Mamilia à Rome.
Mémillon, du
gaulois Memillon, est à rapprocher du
latin Mamilia qui intervient aussi avec la Tour Mamilia dans le rituel du Cheval
d’octobre destiné à sacrer les rois. Selon
Faustus, cité par G. Dumézil, Fêtes d’été et d’automne, Un sacrifice humain, Gallimard, Paris, 1975, p. 146 ,
une course sérieuse (à bord d’un raeda ou chariot à quatre roues pour les
Gaulois , à bord d’un
char pour les Indiens et pour les
Romains) , avec comme enjeu la tête du
cheval immolé , « s’engage entre les gens de Suburre et ceux de
la Sacra Via, pour accrocher cette tête
, les gens de la Via Sacra au mur de la Regia [le
palais où siégeaient les rois étrusques de Rome], les gens de Suburre à la Tour Mamilia. La queue du même cheval
est portée à la Regia avec tant de célérité qu’il doit encore en tomber des
gouttes de sang sur le foyer de l’autel, pour
faire participer la royauté au
sacrifice. » Chez les
Carnutes, la compétition devait avoir
lieu entre Mémilllon, équivalent gaulois de Mamilia, et Meuves, où l’on peut supposer que se trouvait le Palais royal de
Conconnetodumnos, et où la queue du cheval était apportée encore
faiblement saignante au bout d’un trajet à cheval de 3 à 4
minutes. Il est tentant d’analyser
le gaulois memilion en sacrifice d’êtres humains, gaulois medhu, sacrifice, et gaulois
nar, homme, sous la forme du génitif pluriel naron, donc à partir de
medhunaron, devenu medhuron, puis Mémillon, par conséquent comme renvoyant anciennement à un sacrifice
humain à Mars, sacrifice dans lequel au fil du temps le cheval a été substitué à l’homme. Jacques Guillemin,
dans « Saint-Maur –sur-le- Loir, mottes féodales et châteaux « in Bulletin de la société archéologique d’Eure-
et- Loir, n°52, 1er tr. 1997, p.3, évoque la situation d’une
tour en bois au sommet d’une motte
féodale, la Tour Mémillon, qui, pour
nous, fait écho à la Tour Mamilia à
Rome. Memillon est bien un mot gaulois, comme l’attestent les mots mirmillonium,
qui désigne en latin l’armement du sacrificateur et mirmillones,
les gladiateurs armés du mirmillonium pour un combat rituel. Tel
devait être l’armement des hommes, -les mirmillones,
ou en grec myrmidones, - qui s’affrontaient après le sacrifice des
chevaux, combat qui était l’équivalent atténué du sacrifice humain nécessaire plus anciennement pour
« sacrer « le roi. On le retrouve dans myrmidones, le nom des guerriers d’Achille, avec même dans l’Iliade un souvenir de l’anthropophagie
rituelle qui l’accompagnait, lorsqu’ Achille dit à Hector agonisant :
« Ah ! Que ne puis –je dévorer ton cœur tout cru !» Ceux qui, pour réfuter l’étymologie
indo-européenne de Mémillon , voudraient tirer argument du nom de Guillelmus de
Mémillon , Mansio Melinis (la maison
de Milon ou Ménélas), Mesium Milonis en
1232, Mansium Menelaüm vers 865, lequel est attesté en 1194 comme
premier seigneur de Mémillon (J. Guillemin,
op.cit. , p.10), ne doivent pas oublier qu’il s’agit là d’une
étymologie de scribe destinée à ennoblir
le noble en question et que, en 1200-1201, on appelle simplement
celui-ci Mesmillo., ou de Mesmillon.
, puis en 1215 Mémillon.Ce type
d’endroit et de nom n’était pas le seul
en Gaule : il suffit de songer à Montmédy
dans la Meuse, de medhuaron et de
Rueil –Malmaison dans les Hauts- de-
Seine :Rueil vient de Lutekia +suffixe
indiquant un champ, l’équivalent du champ de Mars à Rome, savoir ialensin abrégé en ogilo. , (r)u(tek)ogilo, donnant
Rueil et medhunaron, mermillon, melmansion, malmaison.
Le toponyme de Meuves, du gaulois medhuos, dans la même commune de
Saint-Maur –sur –le -Loir, vient du gaulois medhu
et correspond au sanskrit medhu, de maidhu,
sacrifice, lié au radical
indo-européen du cheval.
L’ami de Conconnetodumnos :
le chef Cotuetos .
A la tête
d’un autre pagus voisin , Cotuetos (du patronyme gaulois
répandu Cottus auquel les Alpes Cottiennes
doivent leur nom), dont le nom était
apparenté au grec kachrus, grain d’orge grillée,devenu cotu- et à edha, , de dhéa, orge,
devenu en gaulois – et (à rapprocher
du grec homérique zéia,, épeautre pour les chevaux, du sanskrit yavah, orge,et de la racine
indo-européenne yew-, orge ), a laissé son nom à Thuy (de [co] tuet) sur la commune de Logron. Il y avait à Thuy de nombreux
mégalithes, qui, vers 1950, furent
étudiés et photographiés en hélicoptère, mais l’exploitant agricole les a
démolis et a même fait disparaître le
dernier sous un dépôt d’ordures ! Le royaume de Cotuetos devait s’étendre
jusqu’au château de Chantemesle (dont le nom signifie la pierre, mar,
à orge) : là se trouvait le « polissoir » qui assurait la
fécondité des moissons du royaume de Cotuetos et il s’étendait jusqu’à Douy , de (co) thouy, nom qui vient aussi de Cotuetos, nom que portait aussi le père du rebelle. .
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