LE PORTRAIT DE L’EMPEREUR NERON
DANS LE SATYRICON DE PETRONE ET LE SENS DU
TITRE.
Le titre de l’oeuvre : satyricon ou , selon d’autres manuscrits,
satyrii et la bonne traduction : « du boisbandé »(pour Néron
l’impuissant).
L’explication traditionnelle fait venir le mot satyricon du radical romain satura qui désigne un pot-pourri, une farce
au sens culinaire, et d’un suffixe grec—icon. La satura Menippea
, la satire ménippée, est originellement un mélange de prose et de vers comme le satyricon, un mêli- mêlo) et
la scène se passait dans le monde hellénique chez Ménippe ; mais chez
Varron la scène se passe à Rome. Le
suffixe grec rappellerait les noms grecs des personnages du roman.
Toutefois, en tête de certains manuscrits, comme le
manuscrit du festin de Trimalchion , Codex
Traguriensis (manuscrit découvert à
Trau en Dalmatie en 1650 par M. Statileo et qui appartenait à N . Cippico)
du XVe siècle, Parisinus 7989 : «Petronii
Arbitri Saturii fragmenta expliciunt où saturii
est le génitif de saturium . Le latin saturium, emprunté au grec saturion,
désigne une plante aphrodisiaque utilisée en magie, de la famille
des orchis (orchidées) ou de celle de la Sarrietta montana, la sarriette des montagnes, le pébré d’ai des
Provençaux (poivre d’âne, l’âne étant
réputé pour sa sexualité ). Le
mot sarriette, ancien français saturée, vient d’ailleurs de satureia, drogue aphrodisiaque, féminin populaire de satureion .
Précisément, le chapitre XX, 7, qui
est une scène de désenvoûtement,
consiste à faire boire à l’impuissant un philtre semblable à la boisson que les créoles appellent très
clairement, avec un gérondif archaïque,
le boisbander
, bois pour bander, sorte de
viagra à base de sarriette et d’orchis entre autres . Le pseudo- Apulée,
dans De
herbarum medicaminibus, l’appelle Priapicon. On l’appelle encore
herbe de l’Indien, cannabis indica,
chanvre indien ou testiculum (en grec orchis, théorie de la signature qui,
d’une ressemblance extérieure entre un bulbe d’orchidée et un testicule, en
fait un remède capable d’agir sur l’organe)
leporis, testicule -de- lièvre.
Pour
sa part, Pétrone le nomme satureum, identique pour le sens à medicamentum, philtre magique, et le mot apparaît sept fois au moins, par
exemple penicillo puella, quod et ipsum
satureo tinxerat , Ascylton opprimebat, la fillette, armée d’un pinceau qu’
Ascylte avait aussi même trempé de satureum ,en chatouillait le sexe du pauvre Ascylte .Le neutre suffixé saturicon ou satyricon , tout ce qui
est regarde le philtre,- sur le modèle de priapicon, donne peut-être son nom au roman, où l’impuissance (celle de Trimalchion -Néron en particulier) est
un thème important, puis il n’a plus été
compris , et l’élément satirique contre Néron a contribué à altérer le titre en
Satyricon.
La vie de l’ancien consul Titus Pétrone Arbiter et les allusions à Néron, adepte de la Déesse
syrienne.
D’abord
le prénom de Pétrone : Titus et
non pas Caïus. Plutarque , dans Comment
distinguer l’ami du flatteur dit expressément : « on
reproche aux débauchés leurs infamies comme Titus Pétrone l’a fait contre Néron » ;
Pline le Jeune, livre 7, chapitre 2 : « Titus Pétrone,
consulaire, qui composa le Satyricon
sur le point de mourir »
et surtout Tacite, Annales,
XVI, :18 et 19 « C. (Caius pour Titus ) Petronius décrivit sous
les noms de débauchés et de femmes perdues les vices de Néron » .Tacite a dû
confondre le prénom de notre auteur avec celui de son grand-père, second préfet
d’Egypte sous Auguste entre -20 et -25 contre la reine Candace ,tandis que
Dion Cassius(54, 5,4) cite correctement Caius Petronius (Metellus). Le hasard des inscriptions permet de suivre ce Caius Petronius après l’Egypte jusqu’en Gaule, où,
près de Moirans-en-Montagne dans le Jura, on trouve une inscription concernant
deux Pétrone revenant d’Egypte sous Auguste (Jacques Maissiat, vol. 3, Jules César en Gaule, p. 210), un C. (lu Q à tort) Petronius Metellus et un M.
Petronius Magnus quatuorvir. Pétrone
s’appelait donc Titus, abréviation T., et non Caius.
Nodot n’a pas hésité à publier les clés de ce
roman.
Trimalchion –Néron.
On a
rapproché le grec malkè, engourdissement par le froid des mains, des pieds,
onglée, impuissance (celle de
Néron précisément).En ce cas, malkion est un adjectif dérivé du nom grec malkè, avec ce qui est compris alors comme le préfixe augmentatif tri-, trois fois, et Trimalchio pourrait être un mot
injurieux du type fiotte, lavette, qui
n’aurait pas survécu dans nos dictionnaires.
Le fait
que Trimalchio désigne Néron nous est confirmé par Bourdelot , dans Petronii Arbitri Satyricon, ejusdem
Fragmenta cum notis criticis J. Bourdalot,
1648 , p. 233, qui, selon Nodot dans sa préface, affirme avoir vu une médaille romaine avec à l’avers C. Nero Augustus et au revers
Trimalchio. S’agit-il d’une
médaille satirique, raillant Néron
« le grand impuissant » ?
Ou bien plutôt Néron lui-même fit-il graver
cette pièce, s’estimant le mari de cette
Déesse syrienne ? Trimalchio
, avec son ch typiquement syrien,
peut s’interpréter comme melech,
roi en syrien (cf . Moloch) et tri,
dieu,comme un titre rituel désignant le roi divin ,parèdre de Atargatis. Il s’agit, en effet, dans le roman de Pétrone, d’un affranchi syrien : son nom est
syrien, et on trouve le nom
de Malchion, génitif Malchionos, Adans Lucien de Samosate ( De la manière d’écrire l’histoire, 28), où il désigne un
Syrien. Syrien malch, roi,
+ suffixe hellénistique signifiant
fils de –ion.
Les deux religions adoptées
successivement par Néron selon Suétone et qui sont représentées dans le roman.
Selon Suétone (chapitre
LVI), Néron « méprisait totalement
toutes les formes de croyances religieuses, à l’exception du culte de la déesse
syrienne, à laquelle il témoigna par la suite un tel dédain qu’il la souilla de
son urine,une fois u’il eut été séduit par une autre croyance,mais , à
celle-ci, il demeura obstinément fidèle : c’est une statuette représentant
une jeune fille qu’un homme u peuple, qu’il ne connaissait pas, lui avait
un jour donnée pour le préserver des complots ; or, une conspiration ayant
été découverte peu de temps après, il considéra cette image comme une divinité très
puissante et ne cessa de l’honorer par
trois sacrifices chaque jour ; il voulait que l’on crût que, sur les avis qu’elle
lui donnait, il connaissait l’avenir. Peu de temps avant la fin, il attacha son
attention aussi à l’examen des entrailles des victimes, mais jamais il n’obtint
de présages favorables. »
1 On peut
supposer que le sacrilège commis par Néron en urinant sur une statue de déesse
est représenté dans le roman par le vol des objets sacrés appartenant à Isis et
par leur vente ; la première religion de Néron, comme celle de son épouse
Acté, dont on dit qu ‘elle portait en public le voile d’isis, était la
religion d’Isis. Le thème d’isis court dans le roman et l’impuissance est le
châtiment infligé par la déesse. Suétone a inversé l’ordre des religions et la statue de jeune fille attribuée à la
seconde religion est celle d’isis, donc de la première religion .
2 Mais Néron a ensuite eu des rapports particuliers avec la Déesse
syrienne en l’honneur de qui il fit bâtir un temple à Rome. C’est la religion
qui est le plus raillée dans ce qui nous reste du roman.
Néron fut , en effet, un fidèle de cette déesse
syrienne dont le nom ne se dit pas, - appelée Ma, Man (du nom indien
du dieu Ahriman) ou Mén, identique à
Atargatis ou à Derketo. Apulée dans L’âne
d’or a mis en scène des prêtres mendiants de cette déesse sur laquelle
l’opuscule du pseudo- Lucien nous renseigne.
Les castrations
ordonnées par Néron, son culte des lions, en sont des indices. La barbe de Néron mise dans un coffret d’or est un autre indice : la depositio barbae était
une cérémonie privée. Or, celle de Trimalcion comme celle de Néron furent de fastueuses cérémonies publiques. Suétone, Budé, p. 340,
chap. XII, écrit qu’il se fit couper la barbe tandis que l’on sacrifiait en grande pompe des
bœufs, l’enferma dans un coffret d’or, orné de perles très précieuses et les
consacra au Capitole ; Pétrone nous révèle que Encolpe remarque dans un coin
de l’atrium « une grande armoire avec, au-dedans, un reliquaire contenant
des Lares d’argent, une statue de Vénus (ancêtre de César, certes, mais surtout
assimilée à Isis et à la Déesse syrienne) et une boîte d’or qui était fort
grande et passait pour renfermer la première barbe du maître de
maison »Trimalchion. Pétrone y revient, p 74, .au chapitre LXXIII :
« c’est aujourd’hui qu’un de
mes esclaves fête sa première
barbe. » Lucien, dans De dea Syria,
chap.60, nous en parle également : « Ils ont encore une autre coutume, qui ne leur est
commune qu'avec un autre peuple de la Grèce, les habitants de Trézène. Je vais
dire ce qui a lieu chez ces derniers. Les habitants de Trézène ont fait une loi
qui défend aux jeunes filles et aux jeunes gens de contracter mariage, avant
d'avoir coupé leur chevelure en l'honneur d'Hippolyte. La même loi existe aussi
à Hiérapolis [en Syrie]. Les jeunes gens y consacrent aussi les prémices de
leur barbe. On laisse croître les cheveux [et la barbe] des enfants depuis leur
naissance, pour les consacrer aux dieux; arrivés dans le temple, on les leur
coupe, on les dépose dans des vases d'argent, et quelquefois d'or, qu'on
attache avec des clous ; on inscrit le nom de chaque enfant sur le vase et l'on
s'en va. Il y a encore dans le temple mes cheveux et mon nom. »
Le bassin
La construction par Néron d’un immense vivier
dans son palais avec des poissons sacrés,
au lieu de l’impluvium
traditionnel, en est un indice. Ascylte tombe dans le vivier (piscina) : «le chien à
l’attache nous accueillit avec un tel vacarme qu’Ascylte tomba dans le
vivier » (chapitre LXXII). Selon Lucien dans la Déesse syrienne (45), à Hiérapolis, aujourd’hui Urfa, la grande ville de la déesse, il y avait un
lac sacré, dans lequel on nourrissait
une grande quantité de poissons sacrés de toute espèce. « Quelques-uns
sont devenus énormes. Ils ont des noms, et ils viennent quand on les appelle.
J'en ai vu un entre autres qui avait un ornement d'or ; c'était un bijou
attaché à sa nageoire ; je l'ai vu souvent avec son bijou. La profondeur de ce
lac est très considérable ; je ne l'ai pas sondée, mais on m'a dit qu'elle
était au moins de deux cents brasses. Au milieu s'élève un autel de marbre. On
dirait, à première vue, qu'il flotte, porté sur l'eau, et la foule le croit
ainsi ; mais je crois, pour ma part, que l'autel est soutenu sur une haute
colonne. En tout temps, il est couronné de guirlandes, et l'encens y fume sans
cesse. Beaucoup de gens, couronnés de fleurs, s'y rendent chaque jour à la nage,
afin d'y faire leur prière ».
Un plan
d'eau contenant les poissons sacrés chers à la déesse existe toujours à Urfa, bien qu'il soit maintenant consacré à
Abraham, en arabe Ibrahim.
Au nord
et à l'est de Hiéropolis se trouvait Édesse (aujourd'hui Urfa, nom arabe de
Vénus assimilée tant à Isis qu’à la Déesse syrienne) qui, selon la légende
chrétienne, fut le premier royaume à devenir chrétien avec la présence ancienne
d’Adam et Eve d’abord, puis d’Abraham. Les Kurdes, d’origine ibère appellent la cité et la déesse Riha, les
Araméens Orhai, les Grecs Osroë, les Arméniens Urhai, les Syriens Urhoy, ce
qui semble signifier la ville de Rhéa (cf.
le latin rabia, rage, transports
furieux, transes comme celles qui agitaient la déesse), en grec Rhéïa, assimilée à Cybèle et à
Atargatis, à la, Fortuna, souveraine avec Kronos du monde. Il faut rapprocher
le nom d’Atargatis à Rome du nom de la déesse dite la Vierge, celle de la IVè
bucolique de Virgile où saint Augustin voyait une préfiguration de la Vierge
chrétienne, Astréa, altération étrusque du nom d’Atargatis, ainsi que, pour la
Grèce, de Rhéa (en grec Rheïa), d’Artémis, et de (la
terrible déesse de) Rha-mnon-te, dont
le nom est composé de Rha et de Men. En orient, on peut rapprocher Ahriman. Toutefois, au V e
siècle de notre ère, la cité avait encore un temple dédié à Atargatis (comme
elle en avait un autre dédié à un avatard’Isis, l'étoile Vénus, Urfa). L’évêque chrétien de
cette période a dû interdire l'auto- castration qui se pratiquait toujours en l'honneur
de la déesse.
Le nom d’Atargatis qui signifie peut-être l’épouse
d’Atar et dont une statue figure au temple
de Hiérapolis selon Lucien (voir mon
blog sur Atargatis, la
déesse syrienne et à paraître celui sur
la Vierge préchrétienne de la 4e Bucolique) et son image
apparaissent sur une "variété déconcertante" de pièces de monnaie datant
de la dernière partie du IVe siècle et du début du IIIe siècle avant notre ère
Une forme araméenne de son nom s'écrivait Ataratha, dont les Grecs ont fait Derketo .
Pour nous, tri dans Trimalchion est une forme syrienne de Atar
(gata) + melchion, roi, de melk signifiant
roi, et d’un suffixe -ion, ou -ior, signifiant fils de, cf. Melchior. Trimalchion signifie ainsi le roi dieu, et constituait peut-être un titre rituel pour l’époux royal
d’ Arargatis, assimilé, à Jupiter. Lucien, dans De Dea Syria, 31, écrit : « [Dans l’enceinte du temple de
Hierapolis], sont placées les statues
de Junon et de Jupiter, auquel ils donnent un autre nom. Ces deux statues sont
d'or, et assises, Junon sur des lions, Jupiter sur des taureaux. La statue de
Jupiter représente parfaitement ce dieu : c'est sa tête, son costume, son trône
; on le voudrait, qu'on ne pourrait le prendre pour un autre. » L’ « autre
nom » donné par les indigènes
syriens est Trimalchion.
Une
des épouses de Néron, Acté,
était sectatrice d’Isis et dérangeait les Romains par l’étrangeté de ses
rites (voile, etc.), mais c’était en réalité
une sectatrice de la Déesse syrienne, la Fortunata du roman. Fortunata est la fille d’un affranchi grec et
sort de la boulange, -comme Acté,
l’épouse de Néron, qui sortait elle aussi, de la boulange. Pourquoi
ce nom ? Fortuna,
équivalent de la déesse grecque Tuchè,
Fortuna en latin, était assimilée à la déesse syrienne, maîtresse du monde.
Autres indices.
Dans les Annales de Tacite, I, 15, ce que nous confirme Suétone, Néron, Poche , p. 352, chapitre XXVI (« Dès le crépuscule,
prenant un bonnet ou un béret, il allait dans les bouges et errait dans les rues,
en courant des risques, puisqu’il avait coutume de frapper les gens qui
revenaient de dîner … »), on
apprend que, Néron aimait à détrousser des citoyens et à revendre les objets
ainsi volés à la porte de derrière du
palais, comme nos héros le font dans le roman en revendant dans un marché aux
voleurs , la quintana (d’où notre mot
cantine au sens premier de lieu d’achat pour les militaires ), c’est- à dire
une large rue traversant le camp, un
manteau « chaud ». » « Néron installa dans le palais un marché
où l’on dépensait l’argent produit par le butin ainsi amassé [par les vols de Néron] et qu’il faisait
mettre aux enchères. »
Le trésor de Didon : Suétone, Poche, p. 357,
chap. XXXI : « Néron fut poussé à cette frénésie de dépenses … par
l’espoir qui lui vint brusquement de découvrir des ressources immenses et
cachées, à la suite d’une révélation faite par un chevalier romain qui lui
promettait comme une chose certaine que les trésors amenés autrefois par la
reine Didon, lorsqu’elle s’enfuit de Tyr, étaient en Afrique dissimulés dans
d’immenses cavernes et qu’on pouvait les ramener au jour avec très peu
d’effort. .. Cet espoir fut déçu. » Pétrone : « Trimalchion
a réussi à attraper le bonnet d’un
incube et il a trouvé ainsi un trésor. »
L’eau à la neige à laquelle fait
allusion Trimalchion (Pétrone, Budé, p. 20, chapitre
XXXI).
Suétone, p. 353, chap. XXVI, nous explique
l’allusion : « Néron plongeait …l’été, dans de
l’eau rafraîchie avec de la
neige. » et p. 377, chapitre XLVII : Néron, traqué, puise avec sa main de l’eau
dans une flaque qui se trouvait à ses pieds, s’exclamant
: « Voilà donc la boisson de Néron ! » , faisant
allusion à sa célèbre invention qui consistait en de l’eau que l’on avait fait bouillir et que l’on
avait refroidie en y mettant de la neige importée des Alpes.
Enfin, le monument funèbre que
Trimalchion fait construire rappelle la
vanité de Néron.
Le maître de rhétorique, Agamemnon : il s’agit de Sénèque, le premier ministre de Néron.
Eumolpe, celui qui chante bien en vers :
c’est la caricature du poète que pensait être Néron. La prise de Troie et La
guerre civile font allusion aux poèmes de Néron, dont le premier fut chanté par lui
en grec sur sa lyre pendant l’incendie de Rome. Les poèmes du Satyricon La
prise de Troie et La guerre civile font songer aux poèmes créés par
Néron sur les mêmes sujets afin de rivaliser avec les homérides et avec Lucain
qu’il fit mourir parce qu’il se rendait compte que Lucain était un bien meilleur poète que lui. La guerre civile est une
critique de la Pharsale de
Lucain, à qui Néron venait d'interdire
la publication des livres succédant au 3e livre de la Pharsale ainsi que
la publication de sa Prise de Troie, poème destiné
à montrer la ridicule prétention au talent poétique de Néron.
Eumolpe
impose l'obligation de manger de la chair humaine contre de l'argent, ceci faisant écho au fait que Néron fit
jeter, selon l'anecdote rapportée par
Suétone au chap. 37, des hommes vivants
à déchirer et à avaler , contre argent, à un Egyptien famélique accoutumé à
manger la chair crue et tout ce qu’on lui donnait.
Circé est une femme de sénateur, Silia, dont parle Tacite. Elle s’était
éprise de Néron dont elle avait pourtant fait la connaissance sous l’habit d’un
esclave (Tacite raconte que Néron aimait rôder la nuit déguisé en esclave, avec
souvent une bande de voyous). Quand Néron l’eut trompée, elle révéla le secret de
l’empereur, savoir son impuissance : celui-ci l’exila.
Polyaenos , en grec homérique celui qui est
digne de louanges (ironique) , évoque en réalité le nom originel de Néron
: Aenobarbus, à barbe couleur de
cuivre : tel est le déguisement d’Encolpe qui séduit sous l’aspect d’un
esclave une dame romaine, Silia,
mais se révèle impuissant :on comprend la colère de Néron à cette
révélation, même si elle est déguisée sous le nom de Polyaenos- Encolpe. Divers
épisodes de la vie de Néron sont raillés par Pétrone, comme le fait d’avoir mis
à mort un ouvrier qui avait inventé le procédé du verre incassable afin de
garder ce procédé pour lui..
Sous le
nom de Pannychis (en grec, Pan-eunouchias,
castré complètement) , se dissimule le
jeune Sporus dont Néron avait fait
un eunuque et qu'il épousa en justes noces, double sacrilège puisqu’il
s’agissait d’un mariage homosexuel et de
la parodie d'une cérémonie sacrée. Suétone (28) nous rapporte que Néron épousa en
grande cérémonie l'esclave Sporus portant le flammeum, le voile du marié
et les chaussures couleur safran ce qui
devient le mariage de Pannychias et de Giton dans le Satyricon. Le rôle
de la matrona qui présentait la mariée, la pronuba, est rempli de
façon sacrilège par un efféminé, Embasicoetas qui semble bien être, ici du
moins, non un nom commun comme le pense Ernout,
mais le nom propre donné par Pétrone à son personnage avec jeu sur son
double sens : celui qui introduit la mariée dans la couche, équivalent de la pronuba,
et efféminé.
L’ oeuvre n’a pas été écrite durant la lente agonie du suicide de Pétrone et Néron ne la connaissait pas encore à ce
moment: le perscripsit de Tacite veut dire, non pas qu’il écrivit ce
roman durant la dernière semaine de son existence, mais que , pendant la
dernière semaine de sa vie, ’il en délivra copie à Néron (Cf. Gaffiot, perscribere , 2, orationem, Cicéron, envoyer lacopie
d'un discours) .
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