QUI EST LA
MYSTERIEUSE DEESSE QUI DONNE SON NOM A LA CONSTELLATION DE LA VIERGE DANS LA IVE BUCOLIQUE DE VIRGILE ?
Virgilius : Virgo.
En -40, date de la composition présumée de la IVè Bucolique
, 713 ans après la fondation de Rome, non loin de Cumes, la ville de la Sibylle
et des vers sibyllins cités par le poème (Cumaei
carminis) , quelques années après le passage de la comète qui avait
accompagné la mort de César, les astrologues égyptiens amenés par Cléopâtre
prédisent la fin de la Grande Année (aevum
dans la bucolique) et la fin du
monde qui se continuera dans le début d’une nouvelle Grande Année
dédiée à un nouvel âge d’or. Au bout d’un certain temps , « tous les
astres, pensent les Grecs, reviendront exactement dans la même
configuration ; cette durée correspondant logiquement au plus petit multiple
commun des périodes de révolution de chacun des astres, chacun y va de son chiffre, selon ses calculs
ou sa fantaisie : 10.800 ans pour Héraclite, 2.484 ans pour Aristarque,
3.942.000 ans pour Diogène le Stoïque, etc. » Au bout de cette période,
qui se termine par un cataclysme assez radical, un déluge ou un embrasement ,
la Terre, avec tout ce qu’elle héberge – animaux, végétaux – sera revenue dans
un état semblable à son état initial. Un nouveau cycle commence qui durera le
même temps ; puis encore un nouveau, etc, et cela sans fin.
Catulle, dans le poème 66-67, prête à la boucle de cheveux
de Bérénice le désir de revenir en arrière, au commencement du cycle, dans les
vers suivants :
Vers 93 : au lieu de la
correction corruerint suivi de utinam
de Budé,p. 73, il faut reprendre la
leçon Corradino et la meilleure édition, celle de l’Anglais Thomson et mettre un subjonctif présent
(potentiel) du verbe iterare :
Sidera cur iterent? Iterum coma
regia fiam!
Proximus
Hydrochoi fulgeret Orion !
Pourquoi les
astres, eux, pourraient-ils renouveler leur position! (allusion à l’éternel retour)
Ah! si, moi, je pouvais reprendre ma place dans la chevelure de ma reine! (subjonctif
à valeur d’optatif). Ah! Si l’étoile Orion pouvait rebrousser chemin et briller
à nouveau à côté du Verseau!(expression du regret, subjonctif imparfait, irréel du présent).
Dans la 4 è bucolique, c’est la constellation de la Vierge et
non celle d’ Orion qui revient réellement à la même place dans le ciel étoilé.
Cette IVè
Bucolique est dédiée au consul Pollion. Qui est Pollion ? Caius Asinius Pollio (78 av. J . -C. -5 ap. J. –C.)fut un partisan de
César , puis d’Antoine ; il
protégea Virgile lorsque , gouverneur de la Gaule Cisalpine au nom d’Antoine,
il fut chargé d’y distribuer des terres aux vétérans et aurait pu
exproprier Virgile de ses biens familiaux. Son fils, Caius Asinius Gallus Saloninus,
fut consul en 8 ap. J.-C et mourut vers 30 ap. J.-C.
Qui est l’enfant à naître de la IV è Bucolique,
ce demi-dieu qui doit sauver le monde ? Jérôme Carcopino, dans Virgile et le mystère de la IVè Eglogue,
a tenté d’établir que l’enfant en
question était ce second fils de Pollion, savoir Saloninus .
D’autres ont vu dans l’enfant
Horus, le fils
d’Isis et du dieu à tête de faucon, Osiris, et l’éclosion à l’équinoxe de
printemps des œufs de faucon, qui
donnera les œufs de Pâques. Ou encore, à cause en partie de la Vierge, le Christ (nova progenies, une
race nouvelle). Saint Augustin,
Lactance et les auteurs chrétiens, puis Dante,
ont vu chez Virgile l’annonce de
la naissance du Christ. En revanche, saint Jérôme, dans une lettre, dit : « Ce sont là
des enfantillages, et c’est pur charlatanisme que de prétendre enseigner ce que l’on ne sait pas. »
Mais aujourd’hui on voit
plutôt en lui le fils, à naître prochainement,
du mariage d’Antoine et d’Octavie,
la sœur d’Octave ( le futur
Auguste), cette Octavie qu’il
vient d’épouser et qu’il répudiera pour Cléopâtre en 36 ap. J. –C. ; ce
pacte de famille est conclu pour éviter le renouvellement des guerres civiles
et Virgile le voit comme la promesse
d’une nouvelle Arcadie mythique, d’un
nouvel âge d’or qui sonne le glas des terribles guerres civiles et qu’il va chanter dans cette églogue .
« Cet enfant aura part à la vie des dieux
[Octave , son oncle, adopté par César,
et sa soeur Octavie ] ; il verra les héros [pluriel de majesté pour
désigner Antoine, par flatterie, mais Antoine affirmait descendre d’Hercule et
descendait donc d’un demi-dieu, d’un héros au sens propre] mêlés aux divinités
[Octave], on le verra lui-même parmi elles,
et il gouvernera le monde pacifié par les vertus de son père [il
héritera du pouvoir d’Octave dont Antoine est le chef de guerre] (Trad. Jean
Giono).
Au Vè siècle après
Jésus-Christ, Macrobe, dans ses Saturnales
(3,7, 2), nous apprend que Virgile a puisé dans un ostentarium (liber) ou livre des prodiges étrusque ses prophéties
de fin du monde et de retour de l’âge d’or, ainsi que ses moutons
multicolores. Les vers sibyllins de Cumes cités par Virgile complètent le
climat. L’adunaton (impossibilité) caractéristique
de l’âge d’or est patent : l’abondance
symbolisée pa rle blé règnera, le
raisin poussera sur des ronces
sauvages, les chênes distilleront du
miel lorsque l’enfant grandira. Virgile en parle comme d’un puer (vers 18, 60 et 62), puer désignant
un adolescent jusqu’à dix-huit ou
dix-neuf ans. « Lorsque tu pourras connaître la valeur et les héros,
lire la geste de ton père (parentis,
Antoine], la grappe rouge éclairera la ronce inculte, le miel scintillera sur l’écorce des chênes. Quelques traces de
l’antique malice ( savoir les guerres civiles] » (traduction de J.
Perret). La gestation de l’enfant dure curieusement « dix » mois : certes, dix
mois lunaires, soit neuf de nos mois, mais cette computation lunaire
inhabituelle montre que nous sommes chez les déesses ou , peut-être,sont un
rappel de l’ostentaire étrusque ; .
L’origine étrusque de
l’ostentaire est à lier avec la Vierge,
qui donne son nom à une constellation
dont le retour annonce le retour de
l’âge d’or . Astrea est le son nom étrusque de la Vierge et c’ est l’altération en
étrusque du nom syrien de la déesse, Atargatis.
Les quatre derniers vers(vers 59-63) dont le texte est
corrompu et qui ont donné matière à controverse.
Texte : Incipe,
parve puer, risu cognoscere matrem
-matri longa decem tulerunt fastidia menses- ;
incipe, parve puer, qui non risit parenti ,
nec deus hunc
mensa ,dea nec dignata cubili est.
Ma traduction : Commence,
petit enfant, à montrer à ta mère que tu la reconnais en lui faisant risette (car , à ta mère, [Octavie] dix mois ont apporté de longs
dégoûts), commence, petit enfant :
celui qui n’a pas souri à sa mère [
Octavie], un dieu [Antoine , cf le vers
15 : Ille deum vitam accipiet ,
où le génitif pluriel deum désigne
Octave , sa sœur Octavie et Antoine ] ne
le juge [parfait gnomique] digne de sa
table, ni une déesse [Octavie]de sa couche.
Traduction de J. Perret,
p.54, dans Virgile, « Ecrivains
de toujours » :
Petit enfant, commence à sourire à ta mère,
Ta mère, elle a pâti dix
longs mois ennuyeux ;
Petit enfant, il faut avoir
fait sa risette :
A ceux-là seuls, table des
dieux , lit des déesses. »
Quintilien, au premier siècle
après J. –C., a jugé que la fin du texte
était corrompue. Aussi l’ai-je
corrigé sans vergogne (qui non risit
parenti au lieu de cui non risere parentis ou de cui
non risere parentes).
Les commentateurs voient à
tort dans ce garçon à naître qui, selon
moi est l’enfant d’Antoine et d’Octavie, Vulcain enfant (voir mon blog sur le
rire sardonique), faute de comprendre que le sourire maternel d’Octavie n’est
pas un rire de moquerie, mais, en même temps qu’un rire exprimant la délivrance
et le soulagement d’une gestation portée à son terme, un sourire plein de
tendresse, sourire d’affection que peut partager le père Antoine. Vulcain,
alias Soranus, originellement, le dieu des sillons (de l’indo-européen swelk, sillon) était originellement le dieu étrusque de la fécondité agricole et il est devenu par la suite le dieu du feu.Sa mère
se serait moquée à sa naissance de son pied boiteux et aurait éclaté de rire à
la vue de l’enfant. Sa difformité fit que « Minerve n’en voulut pas pour
mari » (Marcel Pagnol).
Vulcain a eu comme mère Maia,
celle qui nous a laissé le nom du mois de mai, et le « mari » de
celle-ci était Picus, devin habile,
fils de Saturne, autre dieu de la
fécondité de l’âge d’or. Picus a eu pour enfant Faunus (dont le nom correspond à Pan en grec), un Satyre ou Silène
à pieds de chèvre et à queue de cheval.
Quand Pan naquit, sa mère eut peur de cet enfant à l’aspect de chèvre et s’en moqua de lui , éclatant de rire. Faunus ,
le « chèvre-pied », comme dit Ronsard, a fondé un culte, celui des Luperques, où intervient
le rire sardonique en tant que partie intégrante d’un rite.
Avant la procession, qui
avait lieu le 15 février, le prêtre
immolait une chèvre, touchait le front de chaque Luperque de son couteau sanglant, en essuyait
la trace avec un flocon de laine imbibé de lait et, à ce moment, chaque Luperque devait lui répondre en faisant
entendre un éclat de rire rituel. On
peut rapprocher leur confrérie de celle des Hirpi
Sorani (les boucs de Soranus, autre nom de Vulcain) qui dansaient pieds nus
sur des charbons ardents en l’honneur de
Vulcain.
Vulcain était d’abord le dieu
de la viande crue ; ce n’est que
par la suite qu’il est devenu le dieu du feu et celui des aliments qu’on
fait cuire. Dans le culte des hirpi
sorani, on racontait que des loups étaient survenus au cours d’un sacrifice
et avaient arraché à la flamme impie des morceaux de chair des victimes.
Allusions historiques obscures, pour lesquelles je donne la traduction de J. Perret,
ulmien, qui fut mon professeur de latin en Sorbonne , étant rappelé que la
IVè Bucolique fut composée à Baïes en 40 ap. J. –C. :
«On songe encor à traverser
les mers [allusion à Enée ?] ; il faut
Bâtir des camps, forcer la terre par le fer.
Nous reverrons Tiphys [le
pilote du navire Argo qui conquit la
Toison d’or], une seconde Argo [la première guerre punique où la flotte romaine est victorieuse des
Carthaginois aux îles Egates près de la Sicile en -241],
D’autres héros [Scipion
l’Africain]; nous reverrons encor des guerres,
Contre Ilion va repartir un
grand Achille [César partant pour l’Egypte
à la poursuite de Pompée, ; à Alexandrie, nouvelle Troie, Cleopatra
est l’équivalent d’Hélène].
Ces éléments sont transposés par
la magie de l’ostentaire étrusque dans l’irréel, - un âge d’or qui commencera
avec l’année du consulat de Pollion et s’épanouira lorsque le fils
d’octavie et d’Antoine aura pris le pouvoir , si bien qu’on a pu dire que ce
n’était pas vraiment une pastorale. Pourtant, il existe dans ce poème des éléments de bucolique
pastorale malgré tout : le baccar,
l’amome assyrien, plantes odoriférantes, la colocasie, l’acanthe, le sandyx
[herbe rouge], le crocus [de couleur jaune, safran ou gaude], le lierre, la ronce, l’ortie, le blé,
le raisin, le chêne, la chèvre, les bœufs, les agneaux, les tamaris, les
vergers, les bois. A noter que les béliers de
couleur jaune safran portent la couleur des prêtres de la déesse syrienne
(comme aujourd’hui les moines bouddhistes).
On s’est interrogé depuis l’Antiquité
sur l’identité de la déesse à laquelle la Constellation citée par le poète et
annonciatrice de l’age d’or fait référence, savoir la Vierge. Pour certains , c’est la Vierge Marie
et son fils :
1)
« Quarante
ans à peine avant la naissance du Christ, Virgile annonce … qu’une ère nouvelle
va commencer par la naissance d’un enfant », argumente Marcel Pagnol.
2)
De plus, il a une double nature, divine et
humaine ; il est le fils d’un homme
et d’une
femme, mais « des dieux il recevra la vie »(trad.
Perret).
3) Comme dans la prophétie d’Isaïe, le lion
jouera avec l’agneau, car il fera régner sur terre la paix et la douceur.
4)
Le péché originel est évoqué par les mots scelus,
forfait, crime, et fraus,
mauvaise foi, perfidie.
5)
Le serpent, symbole du mal, est présent,
comme l’agneau sanglant, symbole du
Christ innocent sacrifié.
Ce sont certes des similitudes troublantes ; mais, selon moi, s’il y avait une Vierge , et puisée dans le traité
étrusque des prodiges, il ne pourrai
s’agir que de la déesse syrienne, dont le nom ne se dit pas, et sur laquelle nous
avons un précieux opuscule du pseudo- Lucien de Samosate, La déesse syrienne, qui nous raconte une visite en Syrie, en-150
peut-être (voir mon blog Atargatis , la déesse syrienne), au
temple de Hiéropolis, nom qui en grec signifie la ville sacrée. En effet, nous connaissons malgré tout le nom
de cette mystérieuse déesse : Astrée, Astrea en latin (en
grec Asreia), la
Vierge, : c’ était la fille de Jupiter et de Thémis (Justitia, la Justice divinisée ) et la
sœur de la Pudeur divinisée (Pudicitia).Elle
régnait sur la terre au temps de l’Age d’or et répandait parmi les hommes les
sentiments de justice et de vertu ;mais lorsque les mortels commirent des
fautes contre les dieux et dégénérèrent, que la méchanceté humaine envahit le
monde,elle se retira loin des villes d’abord, puis quitta la terre et devint
une constellation. On voit qu’il s’agit d’une religion qui exalte les qualités
morales. Dans un autre opuscule prêté aussi à Lucien, La mort de Peregrinus,
l’auteur évoque la vie édifiante de ce sage qu’on a estimé être un des premiers
chrétiens, mais qui est peut-être tout bonnement un adepte de la déesse
syrienne.
Cette religion prophétisait la fin du monde par la survenue
d’un deuxième déluge qui punirait les hommes mauvais : seuls dans le
nouvel âge d’or seraient sauvés les bons,chrestoi
en grec, et à ce propos il nous faut rappeler que l’une des premières
apparitions du mot chrétien , chez
Tacite, Annales, 15,44, composées
vers 110, quos vulgus chrestianos appellabat, « ceux
que la populace appelait les chrétiens », apparaît, non sous la forme
attendue christianos ( du grec christos avec un i ,qui signifie l’ oint du seigneur), mais sous la forme chrestianos, avec un e comme dans chrestos, bon, parfait, qu’on retrouve
aussi chez Tertullien, Apologeticum,3, composé
vers 197. Il est tentant
de considérer qu’il s’agit, non des chrétiens, mais des adeptes de la
religion dont le nom est dérivé de chrestos,
bon, l’idéal des adeptes de cette déesse syrienne fort ancienne. On a aussi une
autre mention dans Suétone, Néron, 16,
2, composé vers 121 (« espèce d’hommes adonnés à une superstition nouvelle
et nuisible », ce qui désigne peut-être les sectateurs de la déesse) et dans
Apulée, les Métamorphoses, composées
vers 161, où les adeptes de la déesse syrienne sont expressément évoqués comme
p^rêtres mendiants (la Pléiade,
p .294) ainsi que les chrétiens. Le
christianisme à ses débuts sera proche de cette religion : au nord et à
l'est de Hiéropolis, la ville de la déesse syrienne, se trouvait Édesse (aujourd'hui Urfa, nom
arabe de Vénus assimilée tant à Isis qu’à la Déesse syrienne). Selon la légende
chrétienne, Edesse fut le premier
royaume à devenir chrétien avec la présence ancienne d’Adam et Eve d’abord,
puis celle d’Abraham. Un plan d'eau
contenant les poissons sacrés chers à la déesse existe toujours à Urfa, et il est consacré aujourd’hui à
Abraham, en arabe Ibrahim.
Pour les adeptes de la déesse, l’Age d’or reviendra, annoncé
par la naissance d’un sauveur. Ainsi,
dans Lucien, op . cit. , 41 : « Dans la cour [du temple de
Hiéropolis] paissent en liberté de grands
bœufs, des chevaux, des aigles, des ours et des lions. Ils ne font de mal à personne; ils sont tous consacrés
et privés ». Virgile brosse dans
la IVe églogue à peu près le même
tableau utopiste, peut-être emprunté également à l’ostentaire étrusque. La
prophétie d’Isaïe, 11, 6, dit : « Le loup habitera avec l’agneau, la
panthère se couchera avec le chevreau ; le veau , le lionceau et le bétail
qu’on engraisse seront ensemble ; et un petit enfant les conduira .La
vache et l’ourse auront un même pâturage, leurs petits un même gîte, et le lion
, comme le bœuf, mangera de la paille.
Le nourrisson s’ébattra sur l’antre de la vipère. » .
Etymologie d’Astréa
C’est l’altération étrusque du nom syrien Atargatis. Pour la
Grèce, c’est le nom d’Atlas qu’il
faut rapprocher de Astrea , comme celui
d’Atlantis (de atar et de atis) doit
être rapproché de Atargatis.
Atlas, cité par le pseudo- Lucien (La déesse syrienne, 18), a participé à la lutte des géants contre les
dieux et, pour cette faute, encouru de Jupiter une punition éternelle :
soutenir le ciel sur ces épaules. C’était, selon Platon, l’aîné d’une paire de
jumeaux issue de Poseidon et de Clito. Poseidon avait eu, dans le partage du
monde, l’Atlantide et l’Atlantique.
Une forme araméenne du nom d’Atargatis s'écrivait Ataratha, dont les
Grecs ont fait Derketo, citée par Lucien (14). On peut en rapprocher
l’indo-iranien Ahri-man, (la
terrible déesse de) Rha-mnon-te, dont le nom est composé de Rha et de
Men (la déesse de Commana).la déesse
Rhéa
(en grec Rheïa), liée à Saturne, Artémis.
Le nom d’Atargatis signifie peut-être l’épouse d’Atar ; son image apparaît sur une "variété déconcertante" de
pièces de monnaie datant de la dernière partie du IVe siècle et du début du IIIe
siècle avant notre ère et, au V e siècle de notre ère, la cité de Hiéropolis avait encore un temple dédié à Atargatis
(comme elle en avait un autre dédié à un avatar d’Isis, l'étoile Vénus, Urfa). L’évêque chrétien de
cette période a dû interdire l'auto- castration qui se pratiquait toujours en
l'honneur de la déesse.
Les Kurdes appellent
la cité d’Hiéropolis et la déesse Riha,
les Araméens Orhai, les Grecs Osroë, les Arméniens Urhai, les Syriens Urhoy,
ce qui semble signifier la ville de Rhéa
(cf. le latin rabia, rage,
transports furieux, transes comme celles qui agitaient la déesse), assimilée à
Cybèle, à Atargatis, à la Fortuna, souveraine
du monde.
Pour nous, tri
dans le Trimalchion du Satyricon est une forme syrienne de Atar
(gata) + melchion, roi, de melch signifiant
roi, et d’un suffixe -ion, ou -ior, signifiant fils de, cf. Melchior. Trimalchion signifie ainsi le roi dieu et constituait peut-être un titre rituel pour le royal époux
d’ Arargatis, assimilé à Jupiter. Lucien, dans De Dea Syria, 31, écrit : « [Dans l’enceinte du
temple de Hierapolis], sont placées les
statues de Junon et de Jupiter,
auquel ils donnent un autre nom. Ces
deux statues sont d'or, et assises, Junon sur des lions, Jupiter sur des taureaux.
La statue de Jupiter représente parfaitement ce dieu : c'est sa tête, son
costume, son trône ; on le voudrait, qu'on ne pourrait le prendre pour un
autre. » L’ « autre
nom » donné par les indigènes
syriens est Atargatis pour
Junon et Trimalchion pour Jupiter.
Le culte de cette déesse fut répandu dans tout le sud de l’Italie,
Naples en particulier sous le nom de
Parthénopée (la Vierge Opis) et en Corse (voir mon blog sur le drapeau
corse); en Asie mineure, à Ephèse, Artémis avait pour parèdre une vierge
appelée Parhénopée, Oupis .A Ephèse se trouve
la maison qui aurait été habitée par Marie avant son Assomption qui eut
lieu à partir de cette ville, ce qui montre la continuité entre christianisme
et culte de la déesse syrienne.
De nombreuses traductions existent (en prose :
Giono ; en vers Paul Valéry, en prose rythmée J. Perret) J’ai choisi la traduction de Marcel Pagnol :
« Muse sicilienne, il faut changer de style.
Les humbles tamaris, les buissons inutiles
Ne plaisent pas à tous dans leur rusticité.
J’abandonne Tityre à sa douce indolence
Et que, du fond des
bois, les échos du silence
Soient dignes du consul qui m’écoute chanter.
Voici l’âge dernier prédit par la Sibylle.
Voici venir, d ‘un pas solennel et tranquille,
Des siècles révolus le cycle renaissant.
La Vierge brille au font de la voûte nocturne
Et, pour la race d’or du règne de Saturne,
L’enfant prodigieux du ciel vers nous descend.
Et toi, chaste Lucine, à celui qui va naître,
Accorde ta faveur .C’est par ce nouveau maître
Que la race de fer disparaîtra demain.
L’âge d’or nous ramène
à l’époque première,
Le règne d’Apollon commence, et sa lumière
Resplendit de nouveau sur tout le genre humain.
C’est toi qui des grands mois conduiras le cortège,
Pollion ! Tu seras le consul qui protège
Les hommes accablés par le mal et la mort,
Et si de notre crime
il reste quelque trace,
C’est toi qui vas
enfin délivrer notre race
De l’éternelle peur, de l’éternel remords…
L’enfant, prédestiné par sa haute naissance,
Vivant chez les humains, sera d’une autre essence.
Il voit les dieux assis parmi les demi-dieux…
Lui-même, il a son rang dans la troupe éternelle
Et, fidèle héritier de l’âme paternelle,
Il gouverne la paix d’un monde radieux.
Pour orner de présents ce siècle qui commence
La terre fournira, sans effort ni semence,
Une nappe de fleurs autour de tes berceaux,
Le baccar à l’odeur de miel et d’ambroisie,
Le lierre vagabond et la colocasie
Et la rieuse acanthe aux graciles arceaux…
La chèvre d’elle-même apporte aux bergeries
Son pis gonflé de lait. Au bétail des prairies
Le lion dévorant offre son amitié…
Le serpent va mourir, et l’herbe vénéneuse
Est morte ; au lieu d’ortie et de ronce épineuse,
L’amome assyrien pousse au bord du sentier.
Mais dès que tu liras les leçons de l’histoire,
Les héros et ton père
et leur longue victoire,
Et que de la vertu tu sauras la valeur,
Alors, le blé doré sur la plaine moutonne,
Le doux raisin mûrit sur les buissons d’automne
Et le chêne de fer
distille un miel de fleurs…
Mais tout n’est pas
payé de ta faute première…
Sur la mer ténébreuse où tremble une lumière,
Le pin navigateur porte encor le marchand,
Les remparts meurtriers
gardent toujours la ville,
Il faut toujours, penché sur l’araire servile,
Dans le sein de Cérès pousser le soc tranchant.
Puis un second Tiphys , sur un nouveau navire..
Et des héros pareils à ceux qui le suivirent
Partent pour conquérir une autre Toison d’or,
La guerre de nouveau saignera sur la plaine …
Sous une autre ilion, qui garde une autre Hélène,
Farouche, un autre Achille égorge un autre Héctor.
Mais déjà tu parviens à la saison virile.
L’inutile marin, sur la vague stérile,
Ne porte plus les fruits d’un travail épuisant….
Tout climat produit tout. L’herbe est luisante et drue….
Plus de serpe à la vigne, aux champs plus de charrue
Et du front des grands bœufs tombe le joug pesant.
De trompeuses couleurs n’imprègnent plus la laine.
Le bondissant bélier des verdoyantes plaines
Nous garde une toison qui ne mentira pas.
Il est vêtu de pourpre, ou de safran d’Espagne.
Coloré d’écarlate, un agneau l’accompagne
Et broute le sandyx qui saigne sous ses pas…
Sur l’ordre du destin humblement accordées
Les Parques, les trois sœurs aux vieilles mains ridées,
Ont dit : « Filez, fuseaux, ce siècle de
bonheur ! »
Enfant chéri des dieux dont tu as la nature,
Du puissant Jupiter noble progéniture,
Il est temps de monter au faîte des honneurs.
Vois ! Le monde
vers toi penchant sa lourde sphère
Te salue… Et la mer, et le ciel, et la terre,
Tout proclame sa joie au seuil des temps nouveaux…
Puisé-je au soir lointain d’une vieillesse heureuse
Garder assez de souffle et d’ardeur généreuse
Pour chanter dignement ta gloire et tes travaux !
Le fils de Calliope, en son divin délire,
Ni Linus, inspiré par le dieu porte- lyre,
N’égaleraient mon chant, par les cœurs entendu…
Et Pan lui-même, dieu des chants et de la flûte,
Et toute l’Arcadie arbitrant notre lutte,
Pan baisserait la tête et dirait : « J’ai
perdu ».
Du fond de ce
berceau que tous les dieux chérirent,
Petit enfant, connais ta mère à son sourire ;
Elle a subi pour toi dix mois fastidieux…
Ouvre tes yeux brillants de rêve et de chimères :
Celui qui n’a pas vu lui sourire sa mère
Ne s’est jamais assis à la table des dieux.
Victor Hugo évoquait la « lumière
étrange » qui se
dégageait des vers de Virgile. Dans cet esprit, voici quelques vers
anciens :
A Virgile
Virgilius : Virgo
I
Semeur mystérieux d’une tristesse obscure,
Sur les guérets sanglants que le divin Amour
Défonça, déchira, retourna, d’un labour
Dont personne que toi n’as senti la blessure,
Virgile, tes moissons, tes combats, tes pâtures,
Ont aux Muses redit jusqu’à la fin des jours
L’accord du sang farouche et de l’alme séjour
Qui vit naître et grandir la romaine aventure :
Mais la forêt de myrte et ses buissons secrets,
Agitant nos soucis, nos désirs, nos regrets,
Te racontent toi-même, ô Vierge taciturne,
Toi, ta chère Didon, votre gémissement
Près de l’ancien époux, loin du nouvel amant,
Lunes qui vous glissez sous les branches nocturnes !
II
Lunes qui vous
glissez sous les branches nocturnes,
Allaitez doucement la mémoire des Morts :
Le vin pâle et doré qui coule de vos urnes
Refleurisse à jamais les Ames et les corps !
Le murmure est tari de la fausse rivière,
Les flots de ce Léthé sont un rêve qui ment.
Le lys épanoui de vos glauques lumières
Chante :-TOUT CE QUI FUT DURE ETERNELLEMENT.
O trésor d’Eleusis, ô dépouille de Cumes,
Vers dorés de Samos à Parthénope inscrits,
Bûchers accumulés où la sagesse allume
Le faisceau prolongé des flammes de l’esprit ;
Et vous, lunes glissant sous les branches nocturnes,
Miroirs virgiliens qui opposent dans le soir
Aux célestes flambeaux la Vierge taciturne,
O larmes, fleur et fruit des graines de l’Espoir.
Le vain mot de tristesse est la mystique amphore
Où les Dieux ont caché le froment du Retour
Pour le temps que les feux d’une nouvelle aurore
Mûriront sa douceur dans l’âme de l’Amour.
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